Kwango : des projets inachevés, rétrocommission et détournement, la société civile peint un tableau sombre de la province

Statue de la femme pleureuse de Kenge érigée en mémoire des victimes du massacre de mai 1997 dans la ville
Statue de la femme pleureuse de Kenge érigée en mémoire des victimes du massacre de mai 1997 dans la ville

Le cadre de concertation de la société civile du Kwango a dressé un tableau pour le moins préoccupant de la situation sécuritaire, judiciaire, infrastructurelle et du processus de décentralisation dans la province. Cette évaluation a été présentée au terme de son assemblée tenue samedi à Kenge.

« Rétrocommission, détournement, décentralisation sur papier, dépendance, corruption et sous-développement », des mots forts qui, selon la société civile, résument l’état du Kwango depuis sa création en 2015.

Malgré son autonomie politique, la société civile dénonce le fait que toutes les recettes perçues par les services financiers déconcentrés soient encore gérées par la province du Kwilu. Une situation qui empêche le Kwango d’être compté parmi les provinces pourvoyeuses de recettes pour la République. Autre constat alarmant : sur près de 40 chefs de division, seuls trois ont bénéficié d’ordonnances présidentielles les reconnaissant officiellement dans leurs fonctions, traduisant une administration encore incomplète et fragilisée.

Sur le plan sécuritaire, la société civile déplore une totale dépendance du Kwango envers le Kwilu, notamment en matière de justice militaire. Face à l’activisme de la milice Mobondo, elle regrette l’absence d’une véritable volonté politique et affirme « ne pas sentir la volonté d’y mettre fin et offrir un environnement de paix à la population ».

« La province affiche le visage d’enfants des parents pauvres », déclare la société civile pour décrire l’état de délabrement des infrastructures. 

Les programmes financés par le gouvernement central se sont soldés, selon elle, par des échecs répétés. L’exemple le plus frappant reste la route Kenge–Mawanga, dont les travaux ont été lancés à plusieurs reprises sans aboutir. La structure dresse également un bilan insatisfaisant du Programme de développement local de 145 territoires. Même constat pour les travaux de l’Office des voiries et drainage, qui avancent au ralenti. Face à ces projets inachevés, la société civile s’interroge sur le rôle du Bureau technique de contrôle, censé assurer le suivi des chantiers.

La déclaration finale note un dysfonctionnement total de la justice au Kwango : manque criant de magistrats, absence d’infrastructures adaptées et fraude minent le secteur. La société civile rapporte qu’un million de FC est obligatoire pour obtenir la liberté provisoire.

 « Celui qui accuse le premier, même sans preuve, a toujours raison. La procédure se clôture par une remise en liberté provisoire pour ceux qui ont de l’argent. Ceux qui n’ont pas de relations personnelles ni de sommes à payer sont envoyés en prison, où l’on compte plus de détenus que de condamnés », déplore la société civile.

La déclaration révèle que la visite des détenus est conditionnée par un paiement dans les cachots comme dans les prisons.

Le cadre de concertation de la société civile plaide pour la poursuite effective du processus de décentralisation, l’évaluation des projets financés par le gouvernement central, ainsi que la lutte contre les inachevés, la rétrocommission et le dysfonctionnement de la justice.

Jonathan Mesa