Le bras de fer verbal entre Kinshasa et Kigali s’est poursuivi ce week-end, sur fond d’appels au dialogue et de vives répliques diplomatiques.
Deux jours après la main tendue du président Félix Tshisekedi à son homologue rwandais Paul Kagame, le ministre rwandais des Affaires étrangères Olivier Nduhungirehe a opposé un refus catégorique, tout en multipliant les accusations à l’encontre du chef de l’État congolais.
« Il pourra toujours attendre jusqu’aux calendes grecques, car le Rwanda n’est vraiment pas intéressé à participer à cette “commedia dell’arte” improvisée, destinée à un public congolais et international non averti », a déclaré le ministre rwandais dans une réaction transmise à la presse.
Olivier Nduhungirehe a ajouté :
« En revanche, en matière d’attente : c’est plutôt le médiateur américain qui attend toujours que le Président Tshisekedi revienne sur sa décision de rejeter le Cadre régional d’intégration économique (REIF), pourtant approuvé par la délégation congolaise à Washington le 3 octobre 2025 ;
c’est plutôt le médiateur qatari qui attend toujours que le Président Tshisekedi mette fin à ses blocages et fasse des progrès significatifs dans le processus de paix de Doha ;
et ce sont plutôt les médiateurs, les parties aux deux processus de paix et la communauté internationale qui attendent toujours que le Président Tshisekedi cesse de violer le cessez-le-feu par ses avions de chasse et ses drones d’attaque, qu’il cesse les attaques contre les villages Banyamulenge et autres Congolais Tutsi, qu’il neutralise effectivement les génocidaires FDLR, qu’il cesse de collaborer avec des milices criminelles Wazalendo sous sanctions internationales, qu’il mette fin aux discours de haine et à une attitude belliqueuse contre le Rwanda, et qu’il renonce à faire recours à des mercenaires, ce qui est en violation du droit international. »
Cette réaction intervient après les propos tenus samedi à Bruxelles par Félix Tshisekedi, qui a défendu sa démarche de paix malgré le rejet de sa main tendue par Kigali.
S’adressant à la communauté congolaise, le président congolais a affirmé :
« Les aigris, les ignorants, laissez-les parler. Nous, nous savons ce que nous faisons. Je peux vous garantir qu’en aucun moment je ne trahirai mon pays ni mon peuple. Surtout, ce que vous devez savoir, faire la paix, ce n’est pas une faiblesse. Croyez-moi, je suis très loin d’être faible. Je crois que j’ai réussi à le prouver à plusieurs reprises. »
Il a poursuivi :
« Si aujourd’hui on parle sanctions, médiation africaine, américaine et qatarienne, je crois que c’est grâce quelque part à ce que j’ai réussi à faire. Ce n’est pas du tout une faiblesse, au contraire, c’est une noblesse de savoir faire la paix des braves. Je l’ai proposée. J’attends la réponse. »
Et de conclure :
« Je sais que ça a troublé, je ne tiens pas compte de ce qui est sorti, je sais qu’ils vont réfléchir et ils vont réfléchir et vont me faire une offre, et c’est ce que j’attends. »
Deux jours plus tôt, également à Bruxelles, Olivier Nduhungirehe avait déjà sèchement réagi à la main tendue du président congolais, estimant :
« C’est quand même assez consternant de voir un chef d’État qui est en train d’abuser d’un forum ou d’un podium qui est destiné à la coopération entre l’Union européenne et les pays africains pour en faire une tribune pour faire du cinéma politique. »
Interrogé sur cette main tendue, il avait ajouté :
« Mais de quelle main tendue parlez-vous ? Moi, je vous ai dit que c’est du cinéma politique, puisque le président Tshisekedi sait lui-même qu’il y a déjà un accord qui a été signé, mais que c’est lui qui viole cet accord. »
Les échanges verbaux entre les deux capitales surviennent dans un contexte de tensions persistantes à l’est de la République démocratique du Congo, où les autorités congolaises accusent le Rwanda de soutenir le mouvement rebelle M23, accusation que Kigali continue de démentir.