La République démocratique du Congo (RDC) a pris une part active aux travaux de la Conférence de soutien à la paix et à la prospérité dans la région des Grands Lacs, organisée par la France en coordination avec le Togo, médiateur de l’Union africaine sur les Grands Lacs. Présent à ces assises aux côtés de ses homologues français et togolais, Félix Tshisekedi, président de la RDC, a présenté une vision ambitieuse post-conflit pour la reconstruction des provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu.
Au cœur de son intervention, une enveloppe chiffrée à hauteur de 5 milliards de dollars américains, destinée à relancer la vie économique et sociale dès la fin des hostilités dans l’Est du pays. Le président du pays le plus affecté dans la région des Grands Lacs a décrit ce projet comme "un pacte national et international", réunissant les efforts du gouvernement congolais, des partenaires bilatéraux et multilatéraux, ainsi que des acteurs humanitaires et du secteur privé.
"Dès la fin des hostilités, nous lancerons un Plan d’aide d’urgence pour la reconstruction du Nord-Kivu et du Sud-Kivu. Ce plan, que nous concevons comme un pacte national et international, intégrera, dans une approche concertée et coordonnée, l’ensemble des programmes et projets destinés à la stabilisation, au relèvement et au développement durable des provinces affectées. Il visera à mobiliser environ 5 milliards de dollars à l’horizon 2026 pour la réouverture des écoles, la réhabilitation des centres de santé, la reconstruction des routes, le rétablissement des services sociaux essentiels et le retour digne des personnes déplacées. Il ciblera également la sécurité alimentaire, car nourrir une famille, c’est déjà commencer la paix. Ce plan sera coordonné, unifié et transparent : aucun territoire ne sera abandonné, aucune communauté laissée en marge" a annoncé Félix Tshisekedi, jeudi 30 octobre 2025 à Paris.
Protéger les plus vulnérables et responsabiliser les auteurs de crimes
Le président congolais a ensuite présenté son deuxième engagement, consistant à protéger les populations vulnérables et à poursuivre les auteurs de violations des droits humains dans les zones actuellement sous contrôle de la rébellion de l’AFC/M23, soutenue par le Rwanda.
"Nous allons renforcer notre cadre juridique relatif à la protection des déplacés et des victimes de catastrophes humanitaires, notamment par l’intégration en droit national de la Convention de Kampala de l’Union africaine et l’adoption d’un dispositif légal pérenne de financement de l’action humanitaire et de réduction des risques. Dans cette perspective, une loi sur le financement de l’action humanitaire et la gestion des risques de catastrophes sera prochainement adoptée, afin de doter le gouvernement de mécanismes pérennes, conformément au Cadre de Sendai 2015-2030 et aux engagements pris lors du Sommet humanitaire mondial d’Istanbul en 2016" a précisé Félix Tshisekedi.
Et de poursuivre :
"Nous veillerons à ce que les survivantes de violences sexuelles soient reconnues comme victimes de guerre, accompagnées, soignées et réparées. La redevabilité constitue une exigence fondamentale de la paix durable. Les administrations parallèles instaurées par l’AFC/M23, les violations graves des droits humains et les atteintes aux civils ne resteront pas impunies. Des poursuites seront engagées, dans le respect du droit international, contre tous ceux qui se rendent coupables de crimes contre le peuple congolais".
Transformer la crise en levier de stabilité régionale
Le troisième engagement de Félix Tshisekedi vise à transformer la crise sécuritaire et humanitaire actuelle en levier de stabilité régionale. Pour le président congolais, la paix durable dans les Grands Lacs passe par l’intégration économique et la prospérité partagée, plutôt que par le pillage et la prédation.
"Nous ne venons pas seulement demander de l’aide humanitaire. Nous venons défendre une vision politique : la paix durable dans les Grands Lacs ne sera possible que si la région choisit l’intégration économique et la prospérité partagée plutôt que le pillage et la prédation. L’avenir de la région ne peut pas être fait de trafics transfrontaliers illégaux d’or, de coltan ou de cobalt alimentant des groupes armés ; il doit reposer sur la coopération économique formelle, des infrastructures interconnectées, l’industrialisation locale, la création de valeur ajoutée sur le continent et des opportunités offertes à la jeunesse. C’est cela, la paix durable. La sécurité est nécessaire à la prospérité, mais la prospérité est aussi une condition de la sécurité", a-t-il souligné dans son intervention.
Organisée par la France en coordination avec le Togo, la Conférence de Paris visait à mobiliser la communauté internationale face à l’urgence humanitaire dans l’Est de la RDC, tout en soutenant les efforts de médiation et de négociation menés par les États-Unis, le Qatar et l’Union africaine.
Selon ses initiateurs, la rencontre a également permis de discuter du renforcement de l’intégration économique régionale, considérée comme un levier essentiel pour une paix durable. Paris souligne que la conférence a offert à la communauté internationale une occasion concrète de réaffirmer son engagement en faveur de la paix et du développement dans la région des Grands Lacs, au bénéfice direct des populations locales.
Clément MUAMBA