Deux congolaises ont pris part à la 31ième réunion technique sur la paix en RDC et dans la région des Grands lacs, qui a eu lieu à Nairobi au mois de juillet. Il s’agit, selon le mécanisme national de suivi, d’une première intégration de la femme dans les négociations de paix, depuis la reprise de l’activisme du mouvement rebelle M23 dans la zone Est du pays.
« Notre participation avait pour but de parler de la réalité des conflits tels que nous les vivons sur le terrain. C'est ainsi que j'ai d'abord parlé du contexte de Beni-Ituri sur deux volets. La situation des déplacés, mais aussi les violences basées sur le genre et l'exploitation sexuelle dont sont victimes les femmes, en particulier les femmes et jeunes fille qui ont été kidnappées par les ADF », précise Rose Kahambu coordinatrice de la Dynamique des femmes pour la bonne gouvernance (DYFEGOU) qui prenait part à ces assises.
En ce qui qui concerne les violences sexuelles, elle a basé son plaidoyer sur la situation des femmes déplacées dans les camps leurs dédiés où dans les familles d'accueil. Notamment, le fait que DYFEGOU a enregistré 33 cas de violences sexuelles dont 08 mineurs pour la période allant de janvier à juin 2022.
« J’ai aussi présenté le malheur des filles mineures qui, après kidnapping, sont victimes d’exploitation sexuelle par les ADF. Certaines se sont échappées avec des grossesses. En tout, le rapport semestriel fait état de 18 cas dont 4 filles qui ont atteint l’âge majeur en brousse. J’ai mené un plaidoyer pour la protection de ces femmes conformément à la Résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations Unies ».
Vérité et Justice
En matière de gestion des conflits au niveau de la RDC, Rose Kahambu Tuombeane a présenté la vérité et la justice comme gage d’une paix durable dans la région. Elle a demandé aux représentants des pays ainsi qu'aux organisations, d'éviter de voiler la vérité.
Et de renchérir, « concrètement, il s’agit, pour les États membres de demander aux pays agresseurs c'est-à-dire le Rwanda et l'Ouganda de la RDC d'arrêter et de les sanctionner. J'avais par conséquent montré que si la vérité autour des conflits que traverse la RDC est dite et que la justice est rendue, cela peut apaiser les victimes et les préparer au pardon. A partir de ce moment, la paix qui sera retrouvée par cette voix sera une paix durable ».
Rose Kahambu Tuombeane a aussi relevé ses doutes à propos des mécanismes de paix qui n’intègrent pas la participation des victimes, notamment aux assises qui se tiennent à l'extérieur de la RDC.
Elle a recommandé aux participants d'appuyer l'idée d'organiser des dialogues au niveau interne du pays, avant de dénoncer le fait que les Nations Unies et d'autres organisations Internationales et régionales se donnent beaucoup de temps et déploient beaucoup d'énergie pour condamner les réactions des victimes à leur douleur « avec ce qu'ils ont appelé discours de la haine pendant qu'il ne sont pas en mesure de faire la même chose pour condamner les exactions que vivent au quotidien les victimes ».
Elle a également encouragé les organisations garantes de paix à améliorer leur communication pour rester en connexion avec les communautés victimes des conflits pour construire une paix pour et avec les victimes et qui sera par conséquent durable.
Exploiter le potentiel des femmes
Toujours dans son plaidoyer, la coordonnatrice de la DYFEGOU a invité les participants à élaborer des mécanismes et mener des négociations de paix en y intégrant le genre et la participation des femmes.
« Exploitez le potentiel et expertise qu’ont les femmes au travers des organisations à la base pour qu’elles apportent leur contribution au processus de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation (DDRS-C), car elles maîtrisent les groupes armés et ceux-ci se confient facilement aux femmes (…) Il faut investir dans la participation active des femmes à la restauration de la paix. Cette participation passe aussi par l’amélioration de la représentativité des femmes dans les institutions tant nationales qu’internationales qui travaillent pour la paix. Les femmes sont en mesure de jouer un rôle important pas seulement comme associées ou observatrices. Elles sont des médiatrices, des facilitatrices et certaines ont des acquis sur la diplomatie préventive ».
Par ailleurs, même si la participation de Rose Kahambu de Butembo et Thérèse Mujinga de Goma, est perçu par le mécanisme national de suivi de l’Accord-Cadre d’Addis Abeba à Kinshasa, comme une importante avancée en termes d’intégration de la femme aux pourparlers sur les conflits, pour les organisations féminines, cela n’est pas signifiant étant donné que les deux congolaises y ont pris part mais elles ne représentaient pas le gouvernement congolais.
Rose Kahambu a fait savoir qu’elles y ont pris part sur invitation du bureau de l'envoyé spécial du secrétaire général des Nations Unies en RDC.
Prisca Lokale