Malgré la signature de la déclaration de principes sous la médiation du Qatar et l'optimisme des partenaires tels que les États-Unis d'Amérique, organisations régionales et autres, le gouvernement congolais et la rébellion de l'AFC/M23 semblent ne pas être prêts à parler le même discours censé conduire à la résolution de la crise sécuritaire dans l'Est de la République Démocratique du Congo.
Après les communications de Kinshasa autour de cette déclaration de principes, la rébellion soutenue par le Rwanda a accusé le gouvernement de torpiller l'esprit de la déclaration qui, selon elle, risquerait de bloquer la suite du processus.
Au cours d'une conférence de presse organisée vendredi 25 juillet à Goma, Benjamin Mbonimpa, secrétaire exécutif de l’AFC/M23 a explicité les différents points de la déclaration de principes signée à Doha sous la médiation du Qatar. Concernant la restauration de l'autorité gouvernementale dans les zones occupées par la rébellion, M. Mbonimpa souligne “qu’il s'agit du nouvel ordre politique, c'est-à-dire l'accord qui sera signé va définir qu'est-ce qu'on appelle autorité de l'État, qui sont les animateurs”
“C'est pourquoi même l'intitulé est différent de contenu, il est dit c'est sur l'étendue du territoire national, ce n'est pas seulement sur les zones contrôlées par l'AFC/M23. Quand on aura signé un accord qui traite toutes les causes profondes du conflit et puis on commence à mettre en œuvre, à la fin viendra ce qu'on appelle la restauration de l'autorité de l'État où l'AFC/M23 sera acteur majeur", a expliqué Benjamin Mbonimpa.
Pour l’AFC/M23, la restauration de l'autorité de l'État ne se fera pas avec l'actuel gouvernement.
"L'accord qui sera signé définira les modalités, les étapes et le calendrier de la restauration de l'autorité de l'État sur l'ensemble du territoire national. Ce n'est pas à fixer le regard sur les territoires, sur les espaces, sur les zones que notre organisation contrôle mais ça sera sur toute l'étendue du territoire national ou de la République. Pas ce gouvernement que vous voyez, d'autres acteurs seront les personnes, les acteurs majeurs pour la mise en œuvre de la restauration de l'autorité de l'État, pour dire la sécurité qu'il y a ici, la paix qu'il y a ici, l'ordre qui règne à Goma, Bukavu et dans l'ensemble de l'espace nous allons l'étendre jusqu'à Kinshasa pour que nos compatriotes qui vivent dans des espaces troublés de Kamwina Nsapu, Mobondo et partout ailleurs de Codeco dans l'Ituri, dans le Maniema, dans le Kongo Central eux aussi puissent bénéficier de l'ordre et de l'autorité de l'État qui sévit dans notre espace".
Fédéralisme, meilleure type de gestion de la RDC
Dans le même registre lié au point sur la restauration de l'autorité de l'État, Benjamin Mbonimpa a révélé que son mouvement a prévu de faire des propositions notamment sur le fédéralisme.
"Dans ce point de restauration de l'autorité de l'État, ce qu'ils ne vous ont pas dit, est qu'à Doha nous avons discuté sur les différentes réformes qui auront lieu pour une bonne gouvernance et nous allons proposer des réformes qui vont dans le sens d'améliorer le quotidien des congolais et aussi booster l'économie et le développement de notre pays. Par exemple, nous allons parler sur le fédéralisme, nous n'en cachons pas, nous pensons que c'est la meilleure forme de l'État qui puisse arriver afin de faire décoller ce pays qui 65 ans durant a pataugé dans la boue", a révélé le secrétaire exécutif de l’AFC/M23.
Et de poursuivre :
"C'est l'une des causes profondes du conflit et nous devons travailler sur cela avec méthode, responsabilité afin de mettre à côté cette gouvernance chaotique qui a élu domicile dans les chefs des animateurs qui sont à Kinshasa. Donc la restauration de l'autorité de l'État c'est la finalité du processus après avoir signé un accord et traité et résolu toutes les causes profondes du conflit, ce n'est pas au 17 août comme certains pensent et vous disent qu'ils seront à Goma le 17 aout, je pense que cela viendra lorsque nous aurons déjà résolu toutes les causes profondes du conflit, ça viendra je pense quand on aura épuisé toutes les voies nécessaires qui mettent le pays sur le rail et ça ne sera pas avec le gouvernement qui est à Kinshasa".
Le texte, paraphé après trois mois de négociations directes facilitées par l’État du Qatar, vise à encadrer les prochaines étapes du processus de paix. Selon le document, les Parties s’engagent à mettre en œuvre les dispositions de la présente déclaration de principes immédiatement après sa signature, et au plus tard le 29 Juillet 2025. Les parties conviennent d’ouvrir des négociations directes immédiatement après la mise en œuvre des engagements contenus dans la présente déclaration de principes, en vue de lancer les discussions sur un accord de paix au plus tard le 8 Août 2025.
Selon toujours la déclaration de principes, ces négociations s’inscriront dans le cadre de l’Accord de paix entre la République Démocratique du Congo et la République du Rwanda, signé à Washington le 27 Juin 2025. Les Parties s’engagent à mener les négociations d’un accord de paix global dans un esprit de responsabilité, de coopération et de compromis, avec pour objectif de parvenir à un consensus et de signer l’accord au plus tard le 17 Août 2025.
La signature de cet accord de principes intervient dans un contexte marqué par des accusations entre le gouvernement congolais et la rébellion de l'AFC/M23 de renforcement militaire dans les lignes des fronts et sur l'ensemble du théâtre des opérations. Pour Kinshasa, la rébellion de l'AFC/M23 soutenue par le Rwanda ambitionne de prendre le contrôle de la ville d'Uvira dans la province du Sud-Kivu et d'autres parties du pays encore sous contrôle des FARDC.
Depuis le début de l'année, les violences se sont intensifiées dans cette partie du pays frontalière du Rwanda à la suite des offensives de l'AFC/M23 et des troupes rwandaises (RDF) sur Goma et Bukavu dans les provinces du Nord et Sud-Kivu. Ces combats avec l'armée régulière ont fait des milliers de morts, selon le gouvernement congolais et l'ONU aggravant davantage la crise humanitaire pour des centaines de milliers de personnes déplacées.
Yvonne Kapinga et Clément MUAMBA