Kinshasa : les commerçants entre enthousiasme et inquiétude avant la réouverture du marché central "Zando"

Nouveau marché central "Zando". Photo prise de l'extérieur
Nouveau marché central "Zando". Photo prise de l'extérieur

Depuis près de cinq ans, le marché central de Kinshasa communément appelé « Zando » est en pleine reconstruction. Les travaux touchent visiblement à leur fin et laissent entrevoir l'inauguration dans les jours à venir de cette infrastructure moderne. Lors d’un récent passage sur le site, le gouverneur de la ville, Daniel Bumba, a annoncé une nouvelle grille tarifaire : 420 dollars américains exigés pour l’acquisition d’un espace, assortis d’un loyer mensuel de 60 dollars par étalage contre 10 dollars auparavant d’après certaines langues. La nouvelle ne fait pas que des heureux. 

Malgré la joie exprimée par de nombreux commerçants à l'idée d'intégrer un bâtiment flambant neuf, plusieurs d'entre eux peinent à accepter les montants demandés. Ce sentiment partagé oscille entre fierté nationale et frustration économique. Bethy Ngongo, vendeuse de produits cosmétiques, exprime un mélange d’enthousiasme et de désillusion. 

« Nous sommes très heureux et nous attendons juste l’inauguration. Il semblerait que tout soit déjà prêt, il ne reste que quelques détails. Mais ce que je ne conçois pas, c’est qu’on nous demande 420 dollars et 60 dollars chaque mois. C’est du vol. Le taux du dollar est déjà élevé, nos revenus sont faibles et nous avons d’autres responsabilités. Le gouvernement devrait revoir ces montants », déplore-t-elle.

Même son de cloche chez Louis Mbambi, un autre commerçant : « les autorités ne nous aiment pas. Pourtant, nous, nous aimons ce pays. Le bâtiment est magnifique, c’est vrai, mais ce n’est pas normal d’exiger autant. »  

Le nouveau marché central présente une allure impressionnante. Propreté, toilettes neuves, caméras de surveillance, espaces bien agencés : le site offre une montée en gamme notable. Le nombre de pavillons passe de 10 à 500, avec une capacité d’accueil estimée à 80 000 vendeurs et jusqu’à 200 000 usagers au total. Plus de 630 magasins seront répartis sur les trois étages du bâtiment. 

Par ailleurs, les préoccupations ne se limitent pas aux coûts. De nombreux commerçants appellent les autorités à garantir à cet ouvrage un entretien régulier afin de préserver sa beauté et son efficacité.

Pour Kaléha Samuel, « le véritable problème sera l’entretien. Nous exhortons l’hôtel de ville de Kinshasa à mettre en place un service d’assainissement spécial, bien financé, pour veiller à la propreté du site. Sans cela, le marché risque de se dégrader rapidement ».  

James Kadima, quant à lui, insiste sur la responsabilité partagée : « nous devons tous nous impliquer pour maintenir ce marché en bon état. Les autorités doivent surveiller de près son entretien, et nous, commerçants, devons également en prendre soin. Sans rigueur, ce marché pourrait perdre tout son éclat en quelques mois. Ce serait dommage que, peu après son inauguration, on retrouve des déchets entassés, toilettes bouchées, des biens immobiliers dégradés et des flaques d’eau stagnante. »

« Zando » est le plus grand centre commercial populaire de la capitale congolaise. En mai 1989, il accueillait près de 15 500 vendeurs. Démoli en 2020 en raison de son état de délabrement avancé, il renaît aujourd’hui dans une version modernisée, qui ambitionne de répondre aux besoins croissants de la population urbaine.

Haradie Moza (stagiaire)