Kasaï-Oriental : comment les partis politiques se préparent pour une participation massive des femmes aux élections de 2023 ?

Une électrice glisse son bulletin de vote dans l'urne.

2023 est une année électorale en République Démocratique du Congo (RDC). Le processus électoral conduit par la Commission électorale nationale indépendante (CENI) est à l'étape de l'identification et l'enrôlement des électeurs.

Au Kasaï oriental, les formations politiques du pays se préparent pour affronter ces échéances. Comme à chaque processus en RDC, la question de la participation massive des femmes aux élections se pose avec acuité. En tant qu'analyste indépendant, Serge Tshianga estime que l'implication de la femme dans le processus électoral ne devrait pas faire objet d'une fixation des quotas, au nom de l'égalité Homme-Femme.

« Tout part d'un modèle de société qui renvoie à trouver des arguments nécessaires pour imposer un avis pour qu’il y ait une certaine proportion, trente pourcents (30%) de femmes minimum dans les institutions. Mais à mon avis, ce calcul n'a pas un sens en RDC. Il n'est pas utile de fixer un quota ou un seuil, que chacun trouve des armes idéologiques nécessaires pour pouvoir créer une certaine écologie sociale capable de faire adhérer à son opinion. Homme ou femme n’y a pas de souci. Ne vous y prenez pas en dernière minute, tout doit être préparé. C'est un processus qui doit se préparer dans la durée », a-t-il indiqué.

Dans le camp de la société, on lie la faible élection de la femme à chaque scrutin "au désintéressement" constaté chez les femmes elles-mêmes. Pour Berthe Kanyiki, les mérites de la femme ne sont pas reconnus.

« On a constaté que beaucoup de femmes n’avaient pas voté pour les femmes lors des dernières élections, une situation que nous déplorons », déplore Berthe.

« Mais parfois, il y a aussi des femmes qui se désintéressent de la politique. Elle devrait plutôt se former, se valoriser dans ce qu'elle fait. Il ne faudrait pas qu'elle demeure celle qu'on a mobilisée juste pour venir applaudir. On se souhaite que la femme se batte dans les partis politiques pour briquer des postes de prise des décisions. Ça veut dire, cette représentativité dépend d'abord de la femme elle-même. Il y a des barrières qu'il faut briser. La femme elle-même ne veut pas être là où on prend les décisions. Cela fait que plusieurs sous-estiment les mérites de la femme. Dans un autre chapitre, il faut dire qu'il y a des préjugés, des stéréotypes qui font frein au développement de la femme », a-t-elle expliqué.

Acteurs principaux dans le processus électoral, les partis politiques s'activent pour prendre part à ces scrutins. Du côté de l'Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS/Tshisekedi), fédération de Mbuji-Mayi, on assure prendre au sérieux de la représentativité de la femme. Le président fédéral de cette formation politique prend pour exemple l'existence de ligue de la femme au sein du parti.

« J'aimerais vous dire que nous sommes déjà bien organisés dans notre parti. Nous avons toute une structure appelée ligue des femmes. Rappelez-vous que lorsque le chef de l'État a pris le pouvoir, il a vivement encouragé la participation féminine au sein de son gouvernement. C'est pour vous dire que dans notre parti politique, nous attachons une grande importance à la participation des femmes dans les affaires politiques. Je voudrais vous dire que dans la commission ad hoc, nous avons encore une fois tenu compte des femmes. Dans cette commission, il y a la présence de la ligue des femmes et des jeunes. Dans toutes nos structures, la femme a toujours sa place. Il faut dire que c'est un combat, les femmes doivent de leurs côtés être assidues et debout. Elles doivent mettre de côté le complexe », a dit Jean Paul Mbwebwe.

La présidente fédérale du parti politique Congo Espoir, madame Christine Tshibuaya,  assure que la formation politique dont elle est membre accompagne les femmes ambitieuses dans la matérialisation de leur vision.

« Au niveau de notre parti Congo espoir, nous encourageons les femmes à adhérer massivement pour être alignées sur des listes de notre parti. Notre autorité morale est un grand défenseur des droits des femmes. Au sein de notre formation politique, toute femme ambitieuse sera toujours la bienvenue et bénéficiera d’un encadrement pour arriver à matérialiser son rêve », a-t-elle lancé.

Partant des chiffres des élections de 2018, la participation de la femme au processus électoral 2023 semble être un grand défi.

Selon les statistiques livrées par le Secrétaire Exécutif Provincial de la Commission Électorale Nationale Indépendante CENI (CENI), seulement 51 femmes s'étaient portées candidates lors du scrutin législatif national de 2018, un taux (6%) extrêmement bas. À l'issue des votes, deux  femmes ont  été élues.

« En termes des effectifs, nous avons eu dans l'ensemble pour ce qui est de la députation nationale, un total de 335 candidatures dont 51 femmes soit un taux de 6 pourcents. Pour la députation provinciale, nous avions reçu 291 candidatures avec un taux de 12% des femmes. En termes d'élus pour la députation nationale, une seule femme était sortie députée. Au niveau provincial, deux femmes ont été élues », a dit le numéro un de la CENI au Kasaï Oriental Anaclet Mbuyi. D'un avis personnel, Anaclet Mbuyi estime que la faible participation de la femme au processus électoral est liée à la place accordée à la femme dans notre société. Elle est souvent reléguée au second plan dans la prise de certaines décisions. Cela freine son engagement dans le monde politique. « Du point de vue de la culture, vous savez qu'il y a encore du travail à faire ici chez nous. Très souvent dans la culture kasaïnne, la femme est toujours reléguée au second plan dans la prise des décisions. C'est ainsi qu'elle a du mal à se décider pour des postes politiques », a-t-il expliqué. Les élections générales en RDC sont prévues pour le 20 décembre 2023.

Déjà en cours, le processus électoral est à l'étape de la révision du fichier électoral. Elle concerne actuellement les provinces du centre et de l'Est de la RDC. Une opportunité à capitaliser, reste la matérialisation de l’article dans son deuxième alinéa qui encourage l’élaboration des listes électorales respectant le genre à proportion égale.

En respectant ladite disposition, le parti ou regroupement politique qui présente une telle liste, sera exemptée du paiement de la caution électorale.

Marie-Jeanne Molly Mupela, à Mbuji-Mayi