La République démocratique du Congo (RDC) ambitionne de transformer la filière cacao en un pilier majeur de son économie, a déclaré Julien Paluku, ministre du Commerce extérieur, lors d’un briefing de presse à Kinshasa, vendredi. Le pays vise une production annuelle de 3 millions de tonnes de cacao d'ici à 2030, soit une augmentation spectaculaire par rapport aux estimations actuelles de 100 000 à 200 000 tonnes.
« Si nous atteignons 3 millions de tonnes de cacao d'ici à 2030, avec une moyenne de 10 000 dollars par tonne, cela représenterait 30 milliards de dollars pour notre PIB. C’est une opportunité de transformation radicale de notre économie », a affirmé Julien Paluku.
La RDC dispose de 80 millions d’hectares de terres arables, dont une partie pourrait être consacrée à la culture du cacao et d’autres produits agricoles stratégiques. « Contrairement à ce qui est souvent avancé, nous utilisons ces terres arables sans toucher à nos 155 millions d’hectares de forêt tropicale, ce qui garantit que notre production respecte les normes internationales en matière de déforestation », a précisé le ministre.
Le cacao congolais, produit essentiellement dans les provinces de l’Est, comme le Nord-Kivu et l’Ituri, ainsi que dans la Tshopo, bénéficie d’une réputation de qualité exceptionnelle. Il est entièrement biologique, cultivé sans engrais chimiques, ce qui en fait un produit prisé sur les marchés internationaux.
Face aux nouvelles exigences européennes en matière de traçabilité et de lutte contre la déforestation, la RDC a pris des mesures pour garantir la conformité de ses produits. La certification des champs de cacao par des auditeurs internationaux a été obtenue en août 2024, avec une validité d’un an.
Julien Paluku a également annoncé un plan pour renforcer les institutions locales, telles que l’ONAPAC (Office National des Produits Agricoles du Congo) et l’ANAPEX (Agence nationale de promotion des exportations), afin de garantir une certification nationale des produits agricoles. Par ailleurs, le gouvernement prévoit d’investir dans des zones économiques spéciales dédiées à la transformation du cacao à l’échelle locale.
« Notre objectif est clair : transformer notre cacao sur place, dans des zones comme Musienene (Nord-Kivu) ou Maluku (Kinshasa), pour maximiser la valeur ajoutée et réduire notre dépendance aux exportations de matières premières brutes », a-t-il ajouté.
Pour pallier les risques liés aux mesures européennes, la RDC envisage de diversifier ses débouchés en se tournant vers des marchés alternatifs. « Nous avons réintégré l’AGOA, un programme américain qui facilite l’exportation sans frais de douane. Nous explorons également les marchés indien et chinois, qui comptent des milliards de consommateurs potentiels », a précisé le ministre.
Cependant, les ambitions de la RDC s’inscrivent dans un contexte international complexe. Le règlement de l’Union européenne sur la déforestation zéro, initialement prévu pour entrer en vigueur en 2024, a été reporté à 2025, laissant un délai supplémentaire pour le dialogue.
Julien Paluku a dénoncé certaines incohérences dans l’approche européenne, rappelant que les cultures de cacao et de café sont des arbres qui participent à la capture du CO2. « Nous sommes contributeurs à la lutte contre le réchauffement climatique et non des destructeurs de l’environnement », a-t-il martelé.
Avec ces initiatives, le gouvernement congolais espère faire de la filière cacao un levier stratégique pour le développement économique et l’amélioration des conditions de vie des 240 000 planteurs recensés dans le pays.