Mondial 2026: les Kinois partagés entre rêve de qualification et doutes persistants

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Un mois après le choc de Kinshasa, les supporters congolais pansent encore leurs plaies. Le 9 septembre, lors de la 8ᵉ journée des éliminatoires de la Coupe du monde 2026, les Lions du Sénégal ont créé la surprise en s’imposant 3-2 face aux Léopards, au stade des Martyrs. Une défaite douloureuse pour la RDC, survenue dans un scénario renversant qui a marqué les esprits. La tension était telle que certains supporters, en colère, ont vandalisé des installations du stade. Depuis, la ferveur populaire est mise à rude épreuve, entre frustration et espoir de rebond.

À Kinshasa, où le football fait battre le cœur de la ville, les réactions oscillent entre frustration et résilience. Si certains voient en cette équipe nationale un groupe en reconstruction capable de créer la surprise, d’autres, à l’exemple d’Héritier, redoutent les difficultés structurelles qui minent depuis des années le football congolais. « La gestion interne, le manque d’infrastructures, ou encore l’irrégularité des performances ; voilà les problèmes qu’il faut commencer par résoudre avant d’envisager une quelconque qualification ».

Pour Nanga Jérémie, passionné de football et arbitre en deuxième division, il faut relativiser : « Je n’irais pas jusqu’à parler de malédiction comme certains. Oui, il y a eu de la déception, mais il faut aussi reconnaître qu’on a affronté une grande nation du football, l’une des meilleures d’Afrique et bien classées au niveau mondial. La défaite était logique et méritée ».

Il tempère toutefois les attentes autour des Léopards : « C’est une équipe jeune, encore en phase de reconstruction. Il faut lui laisser du temps pour mûrir. Mais honnêtement, je doute fortement d’une qualification au mondial. Vu notre position (5e parmi les barragistes), nos chances sont très faibles. Même espérer les barrages me semble irréaliste, surtout quand on observe le mental et la fragilité psychologique des joueurs. C’est un défi de taille ».

Espoirs fragiles et réalisme lucide

« La qualification à la Coupe du monde 2026 demeure toujours possible ! (…) tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir », a déclaré Cédric Bakambu, attaquant des Léopards de la RDC, dans une interview accordée à la FIFA.

Comme lui, certains fans refusent de céder au découragement et croient encore à une qualification "historique". « J’ai confiance. Ces Léopards peuvent nous surprendre, ils nous ont déjà montré qu’ils en étaient capables. On a du talent, il faut juste un peu de discipline et de continuité. Nous devons garder la tête haute et aborder ces deux matchs restants avec courage. Tout est encore possible », dit Christian.

Ce point de vue optimiste n’est pas partagé par tous. Malgré la lueur d’espoir, la pilule reste encore amère à avaler pour d’autres supporters. Gradi, habitant de Kisenso, avoue avoir perdu "totalement" confiance. « Je regarde tous les matchs, mais honnêtement, je n’y crois plus. Il faut dire adieu à la qualification, de toute façon, on est habitué à ces genres de scénarios. On parle de projet, de reconstruction, mais cela fait des années qu’on entend le même discours. On manque de mental, de constance et d’organisation ».

« les léopards ont des comptes à rendre »

Sur le plan sportif, la situation est compliquée. À l’approche du choc face aux Éperviers du Togo, la pression monte du côté des Léopards. 
La RDC est provisoirement sortie du top 4 des barragistes, et occupe actuellement la cinquième place. Les Léopards n’ont plus leur destin totalement en main.

Pour Lionel Ngolo, journaliste et analyste sportif contacté par ACTUALITÉ.CD, la qualification reste possible, mais à certaines conditions : « Mathématiquement, rien n’est perdu. Mais il faut une série de victoires convaincantes et, surtout, une stabilité dans le jeu. Le coach doit renforcer la cohésion et la gestion mentale du groupe. Les Congolais veulent rêver, mais ils veulent aussi des preuves sur le terrain ».

Cette analyse trouve écho chez Osée, étudiant en journalisme, pour qui le soutien doit désormais s’accompagner d’exigence. « Aimer  ou avoir confiance en l’équipe nationale ne nous empêche pas de demander des comptes. On veut voir une équipe structurée, des joueurs engagés. Sans ça, on continuera à rêver sans jamais y arriver ».

Au-delà du sport, cette campagne éliminatoire révèle une fois de plus la passion viscérale des Kinois pour leur sélection. Dans la capitale, chaque match des Léopards devient une affaire collective : drapeaux, maillots, chants et débats. Même dans la défaite, la ferveur ne s’éteint jamais complètement à Kinshasa.

« Les Léopards, c’est plus qu’une équipe. C’est quand même notre fierté, notre identité. On peut les critiquer, mais on ne peut pas les abandonner », confie Patrick, trouvé sur la place Victoire.

Malgré une Coupe du monde 2026 qui semble s’éloigner, la flamme du football congolais, elle, est loin de s’éteindre. Dans les "nganda", on refait le match, on imagine des scénarios de qualification et, surtout, on garde foi.

Après un stage de 3 jours à Abidjan, les Léopards de la RDC sont arrivés mercredi à Lomé, où ils affronteront les Éperviers du Togo ce vendredi 10 octobre. Le 14 octobre, ils recevront le Soudan au stade des Martyrs de la Pentecôte pour la 10 et dernière journée des éliminatoires de la Coupe du monde 2026 (Groupe B).

James Mutuba