RDC: malaise au Fonds forestier entre le Conseil d'administration et la Direction Générale, Rigobert Kuta insiste sur le respect des textes réglementaires

Photo d'illustration
Rigobert Kuta Mwana Kuta, président du Conseil d'administration du Fonds Forestier National ( FFN) face à la presse.

Près de 7 mois après l'installation du nouveau comité de gestion du Fonds Forestier National ( FFN), un climat délétère règne au sein de cet établissement public suite aux tensions perceptibles entre le Conseil d'administration et la Direction Générale du Fonds Forestier National (FFN). Face à la presse réunie à l'hôtel Rotana  jeudi 29 février 2024, le président du Conseil d’administration Rigobert Kuta Mwana-Kuta a présenté des avancées et faiblesses enregistrées la mise en place du nouveau comité de gestion.

Dans son argumentaire, Rigobert Kuta Mwana-Kuta a évoqué la non application ou non exécution des recommandations ou résolutions du conseil d'administration par la Direction Générale en violation de l'article 47 du règlement intérieur du Fonds Forestier National.

"Ainsi depuis son installation, le 2 août 2023 soit 7 mois jours pour jours,conformément aux instructions de la tutelle lors de la remise et reprise, notre conseil a pris durant l'année 2023, 50 Résolutions, décisions et recommandations, relatives à la gestion générale du Fonds, qui ont été transmises au Directeur général et à son adjoint pour exécution, conformément à l'article 47 du Règlement intérieur du Fonds Forestier National. L'évaluation de l'impact de nos décisions, recommandations, résolutions sur la gestion Générale du Fonds ne pourra avoir lieu qu'après la transmission par la Direction Générale au conseil d'administration des documents relatifs à la Reddition des comptes et bilans c'est-dire à l'examen et à l'adoption de l'inventaire, de l'état d'exécution du budget, du bilan et du tableau de formation du résultat pour les exercices 2023 ainsi qu'au rapport sur les éléments d'informations sur l'activité du Fonds Forestier National au cours des exercices 2023, conformément aux articles 28, 29,30 du décret N°09/24 du 21/2009 et 5, point 9 de son règlement intérieur" a-t-il fait savoir dans sa communication. 

S'agissant de la mobilisation et recouvrement des ressources ( taxes et recettes), il a rappelé que le Fonds a pour missions d'assurer le financement des opérations de reboisement et d'aménagement forestier et de toute opération de nature à contribuer à la reconstitution du capital forestier. C'est ainsi que la mobilisation et le recouvrement des ressources, notamment, les taxes de reboisement, de déboisement, d'abattage, le crédit Carbone... ont figuré parmi les priorités de notre Conseil durant l'année 2023.

"En rapport avec le crédit carbone, le conseil d'administration note avec regret qu'en violation de l'article 8 point 3 du décret N°09/24 du 21/05/2009 qui octroie au Fonds 10% de crédit Carbone, l'arrêté interministériel N°006 et N°120 du 15 septembre 2023, signé respectivement par la Ministre de l'Environnement, notre Tutelle et le Ministre des finances a exclu le fonds de son droit au crédit Carbone. Le recours gracieux et hiérarchique introduit par le Président du Conseil d'administration en date du 27 septembre 2023 pour obtenir la révision et/ou ou l'annulation de cet arrêté interministériel sont restés sans réponse. En conséquence pour éviter la forclusion et le risque que le Fonds ne perde ses droits au credit carbone, le conseil d'administration a rappelé au Directeur Général et à son adjoint d'introduire urgemment un recours contre cet arrêté interministériel auprès du Conseil d'Etat qui viole le décret", a indiqué Rigobert Kuta Mwana-Kuta. 

Et de poursuivre :

"Sans entrer dans l'analyse et le contrôle des États financiers du Fonds durant l'exercice 2022 qui ne concerne pas notre conseil ayant débuté notre mandat le 2 août 2023, mais au regard du chiffre d'affaires réalisé par le Fonds, au cours de l'exercice de 2022, soit 14616119793,57 francs congolais, le conseil constate que le taux de mobilisation des recettes reste trop faible, voire même insignifiant, compte tenu des possibilités de recouvrement des ressources que lui offre l'article 10 du décret. Outre les taxes, la Direction Générale a droit aux subventions budgétaires, et doit recourir aux apports extérieurs, aux dons et legs, ce qui n'est pas le cas pour le moment au regard de ses États financiers durant l'exercice 2022. Ainsi, les recommandations, décisions et résolutions du conseil d'administration envoyées au Directeur Général et à son Adjoint sont un tableau de bord du Fonds qui devait les guider en vue de la mobilisation des recettes durant l'année 2023".

Au nom du Conseil d’administration, Rigobert Kuta Mwana-Kuta a exprimé ses inquiétudes face aux multiples correspondances sans succès adressées à la ministre d'État, ministre de l'Environnement et Développement. Allusion faite aux demandes d'ordres de mission de contre-vérification devant permettre aux membres du conseil d'inspecter les réalités de financement des projets de reboisement sur le terrain.

"Faute d’une réponse de la tutelle ( NDLR : ministère de l'environnement et Développement durable) et de la direction générale pour disponibilité le budget relatif à ces missions, notre conseil était contraint d’annuler toutes ses missions. Actuellement, nous sommes incapables de dire si réellement ces projets ont été effectivement réalisés. A cet effet, le conseil d’administration attend de la direction générale le rapport détaillé de l’ensemble des projets de reboisement financés par le Fonds Forestier National entre 2019 et 2023, ainsi que leur agrément par le Conseil d’administration", a révélé Rigobert Kuta Mwana-Kuta, président du Conseil d’administration.

Répondant à la question relative aux préfinancements des projets de reboisement dans l'espace Grand Katanga notamment Haut-Katanga et le Lualaba, Rigobert Kuta Mwana-Kuta se dit surpris et ne reconnaît pas avoir donné son aval sur cette question. 

"Il n’y a ni dans le décret, ni dans le règlement d’ordre intérieur où on parle de préfinancement des projets. S’il y a préfinancement, il doit obtenir au préalable, l’autorisation de la tutelle et celle du conseil d’administration. C’est un sujet que nous allons suivre très attentivement, j’inviterais le DG pour m’expliquer la situation pour savoir qui a tort et qui a raison. Si ce sont ces ONG qui ont raison, c’est une situation très grave qui salit l’honneur du FFN. Nous allons saisir notre tutelle, et nous ferons en sorte qu’elles soient remises dans leur droit", a promis le président du Conseil d'administration. 

Le Fonds Forestier National (FFN) est un établissement public à caractère technique et financier. A ce titre, il est doté de l’autonomie de gestion administrative et financière. Depuis 2015, le Fonds a acquis le statut de Compte d’affectation spéciale. La mission du FFN étant d’assurer le financement des opérations de reboisement, d’aménagement forestiers et toute autre opération de nature à concourir à la Reconstitution du Capital Forestier sur toute l’étendue du territoire national. L’accomplissement de cette mission nécessite la mobilisation  des ressources financières conséquentes.

Clément MUAMBA