La majorité parlementaire se définit comme étant la majorité absolue des représentants du peuple à l’Assemblée Nationale (ce qui exclut l’hypothèse d’une majorité parlementaire au Sénat), élus sur la base d’une liste électorale présentée par un parti ou par un regroupement politique, de qui provient le Premier Ministre. Ladite majorité parlementaire soutient le Gouvernement, mieux les actions du Gouvernement, ce Gouvernement qui est seul politiquement responsable devant l’Assemblée Nationale.
Ainsi, trois critères permettent de définir une majorité parlementaire : la majorité des députés à l’Assemblée Nationale membres d’un parti ou d’un regroupement politique (1), de qui provient le Premier Ministre (2), et qui soutient l’action du Gouvernement (3).
1. Qu’entend-on par « parti politique » et par « regroupement politique » ?
En effet, l’art. 101 al. 2 de la Constitution du 18 février 2006 dispose ce qui suit : « Les candidats aux élections législatives sont présentés par des partis politiques ou par des regroupements politiques. Ils peuvent aussi se présenter en indépendants ».
La définition d’un parti politique est donnée à l’article 2 de la loi 04/002 du 15 mars 2004 portant organisation et fonctionnement des partis politiques. Aux termes de cette disposition, il faut entendre par parti politique une association des personnes physiques de nationalité congolaise qui partagent la même idéologie et le même projet de société, en vue de conquérir et d’exercer démocratiquement et pacifiquement le pouvoir. Et le législateur de la loi électorale révisée définit un regroupement politique comme étant une association créée par les partis politiques légalement constitués en vue de conquérir et d’exercer le pouvoir démocratique. Il s’agit, à la lecture de l’exposé des motifs de la loi de 2004 sur les partis politiques, des associations momentanées formées au gré de la conjoncture politique. Ils peuvent présenter, comme pour les partis politiques, une liste électorale pour des élections démocratiques.
2. A quoi sert un informateur, pourquoi et quel est le fondement juridique et philosophique ?
L’article 78 de la Constitution de la RDC du 18 février 2006 dispose que le Président de la République nomme le Premier ministre au sein de la majorité parlementaire après consultation de celle-ci. (…) Si une telle majorité n’existe pas, le Président de la République confie une mission d’information à une personnalité en vue d’identifier une coalition. La mission d’information est de trente jours renouvelable une seule fois.
La République Démocratique du Congo est dans un régime politique démocratique semi-présidentiel, dit aussi « régime semi-parlementaire ». Il s’agit d’un régime politique mixte, développé autrefois par Maurice Duverger, qui présente à la fois les caractéristiques du régime présidentiel (Art. 70 al. 1er : le Président de la République est élu au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois ; Art. 148 : En cas de crise persistante entre le Gouvernement et l’Assemblée nationale, le Président de la République peut, après consultation du Premier ministre et des Présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat, prononcer la dissolution de l’Assemblée nationale.) et celles du régime parlementaire (Art. 78 al. 1er : Le Président de la République nomme le Premier ministre au sein de la majorité parlementaire après consultation de celle-ci. Il met fin à ses fonctions sur présentation par celui-ci de la démission du gouvernement ; Art. 90 al. 4 et 5 : Avant d’entrer en fonction, le Premier ministre présente à l’Assemblée nationale le programme du Gouvernement. Lorsque ce programme est approuvé à la majorité absolue des membres qui composent l’Assemblée nationale, celle-ci investit le Gouvernement ; Art. 100 al. 2 de la Constitution : Sans préjudice des autres dispositions de la présente Constitution, le Parlement vote les lois. Il contrôle le Gouvernement(…) ; Art. 146 et 147 de la Constitution).
Ainsi, si le parti ou le regroupement politique du Premier Ministre est minoritaire à l’Assemblée Nationale, lui et son Gouvernement ne pourraient fonctionner correctement, et pourrait ad nutum subir les sanctions prévues aux articles 146 et 147 de la Constitution.
A l’heure actuelle, il saute aux yeux qu’il n’existe plus de majorité parlementaire appartenant au Front Commun pour le Congo, FCC en sigle. Le Président de la République, qui n’a pas reçu de la Constitution un quelconque pouvoir d’appréciation en pareil cas de circonstance, devra absolument nommer un informateur afin de faire application correct de son devoir constitutionnel prévu à l’article 78 alinéa 1er de la Constitution.
3. Quelle conséquence juridique en cas d’une nouvelle majorité parlementaire ?
Le Premier Ministre en fonction devra présenter au Président de la République sa démission afin de permettre au Président de la République de nommer un nouveau Premier Ministre qui formera le Gouvernement. Si par impossible le Premier Ministre en fonction ne présente pas démission au Président de la République, une hypothèse envisageable compte tenu de la crise politique actuelle au sein des institutions de la République, le Président de la République nommera, par ordonnance présidentielle, un nouveau Premier Ministre, conformément à l’article 78 de la Constitution. Une telle ordonnance abrogera toutes les dispositions antérieures ayant le même objet, c’est dire concrètement que la nouvelle ordonnance abrogera l’ancienne en vertu de laquelle le Premier Ministre actuelle tire sa légalité. Une telle situation, qui par ailleurs est à éviter, sera équipollente à une démission d’autorité, à une révocation, et sera conforme à la Constitution.
Le droit est beau, mais le raisonnement en droit est difficile.
Grâces MUWAWA, DESK JUSTICE/ACTUALITE.CD