Guerre de l’AFC/M23 et ses conséquences: rupture de stock de médicaments dans plusieurs structures de santé de Lubero à cause notamment de la fermeture de l’aéroport de Goma qui empêche d’acheminer les intrants

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La zone de santé de Lubero fait face à une carence de produits médicamenteux, une situation qui inquiète les autorités sanitaires locales. Le docteur Mumbere Cyrille Musivirwa, médecin chef de zone, alerte sur les conséquences dramatiques de cette pénurie, notamment sur les déplacés de guerre, dont le nombre ne cesse de croître dans cette région du Nord-Kivu.

Selon ce médecin, l’afflux massif des déplacés fuyant les violences liées aux affrontements entre l’armée et les rebelles de l’AFC/M23, a lourdement pesé sur les capacités des structures sanitaires locales. Si dans un premier temps l’arrivée des ONG humanitaires a permis d’assurer la gratuité des soins grâce à des dotations en médicaments, cette dynamique s’essouffle aujourd’hui.

« En fait, depuis juin 2024, nous avons reçu un afflux massif de déplacés qui nous a mis dans cette région, dans une situation d’urgence. Et nous avons eu à prendre en charge énormément de déplacés. Et comme vous le savez, ce sont des gens qui partent pour sauver leur vie, ils n’ont rien, ils doivent recevoir des soins gratuits. Vu cette situation, nous avons eu aussi des humanitaires qui se sont présentés dans le milieu, pour justement parer cette situation. Alors, il y a eu des mesures de résilience qui ont été mises en place, dont l’instauration du système de gratuité de soins dans toutes les structures de la place. Cette gratuité de soins s’accompagne par la livraison des médicaments par les humanitaires, et maintenant, les ruptures de stocks, il y en a presque pour tous produits», explique-t-il.

Le fonctionnement des centres de santé est compromis car les rares ressources disponibles doivent désormais être réaffectées à la prise en charge des patients les plus vulnérables.

La fermeture de l’aéroport de Goma a également compliqué l’approvisionnement en médicaments, limitant la capacité logistique des partenaires humanitaires. Résultat : la pénurie s’étend bien au-delà de la localité de Kayina et touche au moins 12 aires de santé dans la région.

Malgré cela, certains partenaires du gouvernement, dont le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), Médecins Sans Frontières (MSF), Care International et Medair, continuent de soutenir certaines structures sanitaires. Grâce à eux, les soins de santé primaires restent accessibles à un certain nombre de déplacés.

« Les humanitaires rapportent qu’ils rencontrent des problèmes de livraison, car ils ne savent pas faire atterrir des avions à Goma. Cela complique leur intervention. Ils envisagent désormais d’acheminer les médicaments par la route, en passant par Kasindi. En conséquence, les structures sanitaires qui offrent des soins gratuits sont contraintes d’acheter elles-mêmes les médicaments pour sauver des vies. Les alertes ont déjà été lancées, une réponse favorable permettrait non seulement de soulager ces structures sanitaires, mais aussi les déplacés ainsi que les communautés locales qui les ont accueillis », a fait savoir docteur Mumbere Cyrille Musivirwa.

Face à des rumeurs faisant état de décès liés à cette pénurie, le docteur Mumbere se veut rassurant : «Aucun cas de décès en lien direct avec cette situation n’a été enregistré à ce jour dans notre zone de santé ». Il lance toutefois un appel pressant au gouvernement congolais et à ses partenaires afin qu’ils interviennent rapidement pour prévenir une catastrophe humanitaire.

La société civile de Lubero s’est également mobilisée, dénonçant une situation devenue critique. Elle réclame une action immédiate de l’État pour soutenir les milliers de déplacés et les familles hôtes qui, malgré leur précarité, continuent d’offrir refuge à ces victimes de guerre.

« Il est urgent que les organisations humanitaires et le gouvernement interviennent pour venir en aide à plusieurs structures sanitaires, une carence généralisée en médicaments touche presque toutes les structures de santé de Lubero, compromettant gravement la qualité des soins offerts à la population. Les patients, en majorité des personnes déplacées, affluent vers les centres de santé de Manguredjipa-centre et de Mambowa, qui peinent à répondre à cette demande en raison du manque de médicaments essentiels. Nous lançons un appel aux autorités et aux partenaires humanitaires afin qu’ils dotent ces structures des ressources nécessaires pour garantir un accès équitable aux soins de santé pour tous, en particulier les plus vulnérables », a plaidé Mukekulu Justin, coordonnateur de la nouvelle société civile congolaise dans cette partie du territoire de Lubero.

Par ailleurs, la situation sanitaire à Lubero s'est aggravée par la fermeture de plusieurs centres de santé, notamment dans le secteur de Bapere et la chefferie des Baswagha, contraints à cesser leurs activités après des attaques répétées des rebelles ADF il y a plus de cinq mois.

Josué Mutanava, à Goma