La RDC, l’un des 10 pays africains visités sous le pontificat du feu le pape François

La foule au stade des Martyrs à l'invitation du Pape François
La foule au stade des Martyrs à l'invitation du Pape François

Durant son pontificat entre mars 2013 et avril 2025, le pape François a effectué cinq voyages en Afrique au cours desquels il a visité 10 pays. Son dernier périple sur le continent l’a conduit en République démocratique du Congo et au Soudan du Sud. Retour sur sa visite congolaise dans un contexte de violences et nombreux conflits armés. 

Le pape François est décédé le lundi de pâques, dans la matinée de ce 21 avril à l'âge de 88 ans. Jorge Mario Bergoglio, de son vrai nom, est succombé d’un Accident Vasculaire Cérébral (AVC), a annoncé le Vatican. 

Durant son règne, le pape argentin aura été un homme de terrain. En 12 ans, il compte, à son actif, 47 voyages  à travers le monde dont cinq (5) en Afrique au cours desquels il a visité dix (10) pays. Le Kenya, la République Centrafricaine (RCA) et l’Ouganda en 2015 pour son premier voyage, soit deux ans après sa prise de fonction. La RDC et le Soudan du Sud sont les derniers pays du continent visités par François. Ce qui restera son dernier périple en Afrique (du 31 janvier au 5 février 2023). Les cinq (5) autres pays visités par ce souverain pontife sont : le Mozambique, l’Egypte, le Maroc, Madagascar et l'Île Maurice. 

En RDC, la visite de François, placée sous le thème " tous réconciliés en Jésus-Christ ", est intervenue dans un contexte très particulier, marqué par des nombreux conflits armés et des violences dans l’est du pays, non sans conséquences. A Kinshasa, le pape avait également dénoncé des politiques du néocolonialisme économique. 

Retirez vos mains de la RDC, retirez vos mains de l’Afrique ! 

Durant quatre jours, dans la capitale congolaise, le pape François a tenu au respect d’un calendrier pastoral mêlant discours, messe et plusieurs rencontres. 31 janvier 2023. Tel une rock star, le pape François foule le sol congolais pour la première fois. Kinshasa reçoit alors le pape sur son territoire pour la deuxième fois seulement de son histoire - après Jean-Paul - à deux reprises : 1980 et 1985 -. 

Après près de 25 kilomètres en papamobile entre l’aéroport international de N’djili et le Palais de la Nation, François est reçu par le président de la République, Félix Tshisekedi. Les deux personnalités s’entretiennent à huis clos. Ce n’est qu’après, qu’ils se présentent en public, devant plusieurs autorités locales, la société civile, le corps diplomatique, etc. Chacun livre un discours. C’est l’occasion pour celui que l’on surnomme le Pape des pauvres et de la compassion en référence à saint François d’Assise de dénoncer “le néocolonialisme économique”

« Retirez vos mains de la RDC, retirez vos mains de l’Afrique ! Cessez d’étouffer l’Afrique : elle n’est pas une mine à exploiter ni une terre à dévaliser », a-t-il lancé dans un discours qui restera gravé dans la mémoire collective, avant de qualifier, de “génocide oublié”, la situation sécuritaire qui prévaut en RDC

Plus d’un million de fidèles à Ndolo

Mercredi 1er février 2023. Pour son deuxième jour à Kinshasa, François dit une messe solennelle à l’aéroport de Ndolo. D’après les autorités, cette célébration eucharistique a rassemblé plus d’un million de fidèles catholiques et autres. Plusieurs fidèles ont témoigné être arrivés à Ndolo dès la soirée du mardi 31 janvier afin d’y passer la nuit, craignant un manque de place ou un accès difficile le jour de la messe.  

Dans son homélie introduite en Lingala (une des quatre langues nationales), le 266e pape de l’Eglise catholique a invité les jeunes à “ ne pas céder aux divisions devant les blessures du pays”. 

Le souverain pontife a évoqué trois sources pour recouvrer la paix : le pardon, la communauté ainsi que la mission. Il a appelé les Congolais à écrire, dans les chambres, sur les vêtements, à l'extérieur des maisons : Paix à vous ! Ce qui sera une prophétie pour le pays, une bénédiction du Seigneur sur ceux qu’ils rencontrent. 

Outre Félix Tshisekedi, les présidents de deux chambres du Parlement de l’époque : Modeste Bahati Lukwebo et Christophe Mboso, plusieurs personnalités politiques dont des opposants de premier rang tels que Moïse Katumbi ou encore Martin Fayulu y étaient présents. 

Faites taire les armes, mettez fin à la guerre

Dans l’après-midi du 1er février, le pape François a reçu, à la Nonciature apostolique de Kinshasa, les victimes des conflits armés dans la partie Est du pays. Après une série de témoignages ahurissants, François a tenu à adresser un message de réconfort et de soutien à ces victimes. Il a aussi lancé un vibrant appel aux commanditaires des violences en RDC : taire les armes et mettre fin à la guerre. 

« J'adresse un vibrant appel à toutes les personnes, à toutes les entités internes et externes qui tirent les ficelles de la guerre en RDC, en la pillant, en la flagellant et en la déstabilisant. Vous vous enrichissez par l'exploitation illégale des biens de ce pays et le sacrifice cruel de victimes innocentes. Entendez le cri de leur sang, faites taire les armes, mettez fin à la guerre », a rapporté le Pape François.

“+ Pas de corruption +”, la demande du pape aux jeunes 

Plus de 65.000 personnes (jeunes et catéchistes) ont répondu à l’invitation du pape au stade des Martyrs de la pentecôte jeudi 2 février. Ici, le pape a, entre autres, vilipendé la corruption, un fléau en RDC. " Tous ensemble disons : + pas de corruption + ! ", demandait François aux jeunes qu’ils considèrent comme des dirigeants de demain. Devant cette foule, il a aussi abordé : la résilience, l’amour et la paix. 

Pour leur part, la jeunesse a demandé à François de faire un plaidoyer de sa situation auprès des autorités au niveau tant international que national. « Nous jeunes, voulons travailler, mais le chômage nous guette. Insister auprès des dirigeants du monde, auprès des dirigeants du Congo, qu'ils s'occupent réellement des jeunes. Nous voulons bâtir notre église et notre société congolaise dans la justice et dans la réconciliation mais nous sommes tentés de tomber dans la recherche exclusive de l'intérêt personnel au détriment des autres », avait lancé, au nom de la jeunesse, David Bode Nguamba.

Rencontre avec les religieux et les évêques 

La rencontre du pape François avec les prêtres, religieuses et séminaristes à la Cathédrale Notre Dame du Congo, le 2 février, a coïncidé avec la célébration de la journée mondiale de la vie consacrée, une initiative du pape Jean-Paul II depuis 1997. François a ainsi appelé tous ces consacrés à ne pas céder à la "tentation du confort mondain".

Vendredi 3 février. Peu avant de prendre son avion et rallier Juba, la capitale du Soudan du Sud, le pape François a échangé avec les évêques de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO). La rencontre a eu lieu au siège de l’épiscopat, à Kinshasa. Il a invité les évêques, dirigeant une quarantaine de diocèse sur l’ensemble du pays, à “être des instruments de la réconciliation”. 

A Kinshasa, le décès du pape François n’a pas laissé indifférent. Des réactions affluent tant du côté des politiques que des acteurs de la société civile en plus des fidèles catholiques. Dans les églises de la capitale, les cloches ont retenti à midi au cours de la journée du lundi 21 avril. 

Japhet Toko