Médecins Sans Frontières (MSF) a dévoilé ce lundi un rapport accablant sur la prise en charge des violences sexuelles en République démocratique du Congo (RDC), révélant qu'en 2023, 25.166 victimes ont été soignées à travers le pays, soit plus de 2 victimes par heure. Ces chiffres, les plus élevés jamais enregistrés par l'organisation en RDC, marquent une hausse dramatique par rapport aux années précédentes.
Ce rapport, basé sur des données recueillies dans cinq provinces (Nord-Kivu, Sud-Kivu, Ituri, Maniema et Kasaï-Central), montre que les équipes de MSF ont traité un nombre sans précédent de victimes de violences sexuelles, avec une concentration particulièrement marquée dans la province du Nord-Kivu, en proie à des conflits armés intenses. Entre janvier et mai 2024, MSF a pris en charge 17.363 victimes rien qu'au Nord-Kivu, représentant 69% du total des victimes soignées en 2023 dans les cinq provinces concernées. Les femmes et les filles, majoritairement déplacées en raison des combats entre le M23 et l'armée congolaise, sont les premières victimes, exposées à des agressions, souvent sous la menace d'armes, dans et autour des camps de déplacés.
Face à cette situation, MSF appelle à une action urgente de la part des autorités congolaises, des acteurs humanitaires et des bailleurs internationaux. L'organisation met en avant trois axes d'intervention prioritaires : d'abord, elle exhorte toutes les parties au conflit à respecter le droit international humanitaire, en interdisant les violences sexuelles et en garantissant la sécurité des camps de déplacés. Elle demande également que les conditions de vie dans ces camps soient améliorées de manière significative, notamment en assurant un meilleur accès à la nourriture, à l'eau et à des hébergements éclairés et sécurisés pour les femmes et les filles. Enfin, MSF insiste sur l'importance d'un renforcement massif de la prise en charge des victimes, tant au niveau médical que psychologique et juridique, avec des financements à long terme pour garantir la continuité des soins.
Le rapport met également en lumière que 98% des victimes soignées en 2023 sont des femmes et des filles, dont 10% sont mineures. La détérioration des conditions de vie dans les camps de déplacés, conjuguée à l'insécurité omniprésente, aggrave cette crise humanitaire. Les femmes sont souvent agressées en sortant des camps pour collecter du bois ou de l'eau, ou lorsqu'elles sont contraintes de se déplacer dans les champs. Certaines sont même victimes d'exploitation sexuelle pour subvenir aux besoins de leur famille.
Christopher Mambula, responsable des programmes de MSF pour la RDC, a souligné que "les quelques programmes existants sont trop limités dans le temps et largement sous-dimensionnés. La mobilisation de tous est nécessaire pour protéger les femmes et répondre aux besoins urgents des victimes." Il a également mis en garde contre la fragilité des financements humanitaires et a plaidé pour une réponse plus durable à cette crise.
Les violences sexuelles en RDC constituent une urgence médicale et humanitaire de premier ordre. Le dernier rapport du Gender-Based Violence Area of Responsibility (GBV AoR) RDC a révélé que 55.500 survivants de violences sexuelles ont reçu une prise en charge médicale au cours du deuxième trimestre 2024, soulignant l'ampleur de la crise.
MSF appelle à des actions concrètes et immédiates pour enrayer ce fléau et protéger les populations civiles, notamment les femmes et les filles, qui en sont les premières victimes.