RDC : à Goma, un journaliste disparu depuis quatre mois, sa famille fait le deuil sans avoir retrouvé son corps

Félix Tshisekedi
Ville de Goma

Après quatre mois de recherches, la famille du journaliste Patient Murhula Ciza, porté disparu depuis le 3 juin 2025 à Goma, a pris la douloureuse décision d’entamer son deuil, sans avoir retrouvé son corps.

Originaire de la ville de Bukavu, Patient Murhula Ciza travaillait à la radio Alpha Omega (RAO FM), une chaîne locale basée à Goma. Il vivait seul dans sa maison, au quartier Ndosho (commune de Goma), au moment de sa disparition

Selon Freddy Kulondwa, membre de la famille contacté par ACTUALITÉ.CD, l’alerte a été donnée lorsqu’il n’a plus donné signe de vie du jour au lendemain. Inquiets, ses proches se sont rendus à son domicile. Sur place, ils ont découvert tous ses effets personnels intacts : vêtements, documents et autres biens étaient toujours là. Aucun signe de lutte, de départ précipité ou de mise en scène n’a été relevé.

Malgré des recherches menées par la famille et les proches, aucun indice, appel de ravisseurs ni revendication n’a permis de comprendre ce qui s’était réellement passé.

C’est seulement la semaine dernière que la famille a reçu une information de la part d’un ami de son grand frère Freddy Kulondwa, qui s’est récemment enrôlé dans la rébellion de l’AFC/M23 et qui était parti en formation à Rumangabo, dans le territoire de Rutshuru. Il aurait envoyé un message en swahili révélant que « ton frère est mort à Rumangabo ». Le message ne précisait ni la date ni les circonstances du décès.

« C'était depuis le mois de juin, précisément le mardi 3 juin, que mon frère a disparu. Il est originaire de Bukavu, où il a fait ses études, mais il avait choisi de partir vivre à Goma pour y construire sa vie.

Là où il logeait, les voisins ont remarqué son absence, car il avait l’habitude de rentrer le soir et de saluer tout le monde autour de sa maison qu’il louait.

Le mercredi 4 juin, ils ont constaté qu’il n’était toujours pas rentré. C’est seulement le jeudi matin que notre famille a été alertée. À partir de ce moment-là, nous avons commencé les recherches pour tenter de le retrouver.

Nous avons contacté les responsables de la radio où il travaillait, et les recherches ont été lancées, mais malheureusement, cela n’a rien donné.

Il y a un ami avec qui nous avons terminé l’université. Lorsque la ville de Bukavu est tombée entre les mains du M23, il avait décidé de rejoindre ce mouvement depuis le mois de mars.

La semaine dernière, j’ai reçu un message de lui, écrit en swahili, me disant que mon frère, Patient, est mort à Rumangabo… sans préciser les circonstances de sa mort. », témoigne Freddy Kulondwa.

Après cette révélation et en l’absence de toute autre piste, la famille a décidé d’entamer le deuil. Les cérémonies se tiennent actuellement à Bukavu, où réside une partie de la famille du journaliste.

Depuis la résurgence du conflit entre les Forces armées congolaises (FARDC) et le mouvement rebelle AFC/M23, les journalistes en République démocratique du Congo (RDC), notamment dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, paient un lourd tribut. Arrestations arbitraires, enlèvements, exils forcés et assassinats se multiplient.

Le cas le plus récent est celui de Yoshua Kambere Machozi, journaliste à la radio communautaire Mpeti, basée dans le territoire de Walikale (Nord-Kivu). Selon les responsables de sa radio, il avait été enlevé par les rebelles de l'AFC/M23 et détenu pendant 8 jours. Son corps en décomposition avait été retrouvé au bord d’une rivière dans le village de Katobi, à environ quatre kilomètres de Mpeti.

Un autre meurtre a récemment endeuillé la profession ; celui de Fiston Wilondja Mukamba, journaliste basé à Bukavu, chef-lieu du Sud-Kivu. Son corps a été découvert dans la nuit du lundi au mardi 5 août dernier, dans un lieu connu sous le nom de Chez Mangaza, près du marché Nguba, dans la commune d’Ibanda. Enlevé par des hommes non identifiés, son corps a été retrouvé ligoté, portant des traces évidentes de violences.

Patrick Maki