Élections législatives en RDC : les enjeux cruciaux du seuil légal de représentativité et du quotient électoral

Les membres du bureau de la CENI avec Denis Kadima au centre
Les membres du bureau de la CENI avec Denis Kadima au centre

Plus de 23 600 candidats aux élections législatives nationales sont en alerte en République démocratique du Congo (RDC). Ils attendent la proclamation imminente des résultats provisoires des scrutins du 20 décembre 2023. Or, seuls 500 sièges sont en jeu à la chambre basse du parlement congolais, ouvrant ainsi la voie à plusieurs contentieux électoraux au niveau de la Cour constitutionnelle après la publication des résultats provisoires par la Commission électorale nationale indépendante (Céni).

Les prochains requérants et leurs avocats devraient toutefois maîtriser les notions relatives au seuil légal de représentativité, au quotient électoral des listes des partis et regroupements politiques dans des circonscriptions électorales, ainsi que la notion du meilleur élu, selon Samir Malanda Matabulu, avocat au barreau près la cour d’appel de Kinshasa/Matete et conseiller juridique de Denis Kadima, président de la Céni.

Le seuil légal de représentativité dans un système électoral à listes

À la différence du seuil de recevabilité applicable lors des dépôts des candidatures, le seuil légal de représentativité est un préalable à toute attribution des sièges après les scrutins. Il n'est pas applicable aux candidats indépendants, encore moins aux candidats à la présidence de la République.

« Il doit s'appliquer aux circonscriptions plurinominales, c'est-à-dire à plusieurs sièges, et celles uninominales, c'est-à-dire à un seul siège. Nous sommes dans un scrutin des listes. Après les opérations de vote, les voix sont d'abord comptabilisées pour la liste du parti ou regroupement politique. Au niveau national, le seuil légal de représentativité est de 1%, 3% au niveau provincial et 10% au niveau communal », a expliqué Me Samir Malanda.

Il indique par ailleurs que seuls les partis ou regroupements ayant atteint ce seuil participent à l'attribution des sièges. Ceux ne l'ayant pas atteint sont écartés.

Le quotient électoral : passage obligé pour l'obtention d'un siège

Atteindre le seuil légal de représentativité n'est pas gage de l'obtention d'un siège pour la liste d'un parti ou regroupement politique. Il faut atteindre un deuxième seuil, dit « naturel » : le quotient électoral.

« Il représente tout simplement les suffrages valablement exprimés des listes seuils, c'est-à-dire des listes qui ont préalablement atteint le seuil, que l'on divisera par le nombre des sièges mis en compétition dans la circonscription. C'est le résultat obtenu que l'on appelle quotient électoral. Seuls les partis et/ou regroupements politiques ayant atteint ce quotient peuvent prétendre avoir un siège », a-t-il expliqué.

Me Samir Malanda précise toutefois que le siège obtenu après l'atteinte de deux seuils par le parti ou regroupement politique « revient au candidat en ordre utile sur la liste ».

« Au moment du dépôt des candidatures, les partis et regroupements politiques présentent les candidats selon l'ordre qu'ils veulent. Les électeurs viennent les reclasser par leurs votes. Dans ce sens, le dernier sur la liste peut devenir le candidat en ordre utile, s'il réunit le plus grand nombre des voix. C'est à lui que reviendra le siège », a-t-il précisé. Et d'ajouter.

« S'il arrive que le premier parti politique à qui le siège revient a un plus fort reste, il obtiendra un deuxième siège, qui reviendra au candidat de la liste qui vient en ordre utile après celui qui avait obtenu le premier siège, et ainsi de suite, jusqu'à épuiser tous les nombres des sièges dans la circonscription ».

Meilleur élu : une exception à la notion du seuil

Dans une circonscription, il peut arriver qu'un candidat se voie octroyer un siège, même si la liste de son parti ou regroupement n'a pas atteint le seuil légal de représentativité, ou encore s'il est indépendant. C'est dans le cas où il est meilleur élu. « Est meilleur élu un candidat ayant obtenu la moitié des suffrages valablement exprimés au sein de la circonscription », précise toutefois Me Malanda Tabulu.

Cette notion revêt une autre connotation dans une circonscription électorale où aucune liste de parti ou regroupement politique n'a atteint à la fois le seuil légal de représentativité et le quotient électoral.

« Lorsqu'aucun parti politique n'atteint le seuil national, le calcul se fera sur base de la proportionnelle intégrale, parce qu'il faudra que le siège soit attribué. C'est le meilleur élu, ayant démontré son ancrage au sein de cette circonscription qui se verra octroyer le siège », a-t-il précisé.

Les votes des 82 candidats députés nationaux ont été annulés par la Céni notamment pour fraude, détention illégale des Dispositifs électroniques de vote (Dev) et menaces contre les agents électoraux.

Saisi pour l'annulation de la décision de la centrale électorale, le Conseil d'État s'est déclaré « incompétent » de statuer sur la requête, selon Me Aimé Tshibangu, président du collectif de quelques candidats qui avaient saisi le conseil d'État. « Pour l'instant, nous attendons la publication des résultats pour attaquer la décision de la CENI à la cour constitutionnelle, parce que nous avons des preuves », déclarait-il ce vendredi.

Bruno Nsaka