Recensement en RDC : ne pas disposer d'une capacité de maîtriser notre population est très grave, c’est une question de volonté politique (Jacques Djoli)

Le député national Jacques Djoli
Le député national Jacques Djoli

Le professeur Jacques Djoli estime que l’organisation du recensement ne demande pas seulement des préalables techniques et budgétaires. Bien plus, il faut une volonté politique. Le dernier recensement au pays remonte à 1984 sous Mobutu.   

Lors de la journée scientifique organisée par la faculté de droit de l'Université de Kinshasa samedi dernier, ce professeur de droit constitutionnel juge grave cette situation pour un État comme la République Démocratique du Congo qui ne dispose pas d'un outil permettant de maîtriser l’effectif de la population pour planifier son développement.

« Ce n'est pas seulement un problème technique, ce n'est pas un problème budgétaire, l'institut national des statistiques dispose suffisamment des compétences pour mener le schéma recensement, mais c'est la question de la volonté politique, je dirai la culture de gouvernance, à partir du moment où la planification des politiques publiques n'est pas sentie comme une priorité et que dans cette planification on a besoin des chiffres. La culture statistique n'existe pas. C'est un problème très grave sur l'ensemble des secteurs de l'État de ne pas disposer d'un outil, d'une capacité de maîtriser notre population », a déploré Jacques Djoli dans son intervention axée sur l’enrôlement des électeurs et la cartographie électorale.

Il regrette par ailleurs que le recensement soit utilisé par le pouvoir pour parvenir à se maintenir au pouvoir au-delà du mandat.

« On a lié cette question aux élections tout simplement comme une stratégie de déviation, c'est-à-dire amener la question de recensement pour tomber dans cet amour de glissement chronocratique. Le glissement trouve comme argument technique le recensement. On dit, il faut au moins trois ans, on va commencer ça vers fin 2021 comme ça on va avoir un argument technique, on recourt à cet argument fallacieux parce que si le ministère du Plan prend en charge cette question, il y a des partenaires qui sont prêts à nous accompagner », a indiqué Jacques Djoli.

Et de poursuivre :

« Lorsque nous enrôlons nous arrivons à des montants extraordinaires 400.000.000 USD qui sont sortis dans l'urgence mais on peut faire le recensement même l'identification avec ce montant. L’ONIP n'existe pas aujourd'hui, l'ONIP était une priorité lorsqu'il fallait nous amener à des discussions politiciennes en 2015 et lorsque ça n'a pas été retenu mon frère le DG de l'ONIP de l'époque n'en parlait plus (Adolphe Lumanu, Ndlr), l'ONIP était un épouvantail pour obtenir une stratégie de conservation de pouvoir par des moyens soi-disant technique ».

Les opérations combinées de recensement, d’identification de la population congolaise et d’enrôlement des électeurs ont été évaluées à hauteur de 600 millions de dollars américains comme l’avait présenté au Premier ministre Sama Lukonde le 7 septembre 2021 par les membres de la commission mixte d’experts sur les opérations de recensement et d’identification de la population. D'après Christian Mwando, Ministre d'État du Plan, le travail fait par les membres de cette commission d’Experts a permis de déterminer un budget global de 600 millions de dollars en lieu et place de 900 millions de dollars qui seraient dépensés par le gouvernement si les opérations étaient organisées de manière séparée.

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Clément Muamba