C'est une alerte plus qu’inquiétante. Le diocèse catholique de Butembo-Beni dénonce, derrière les tueries de Beni (Nord-kivu), l'existence d'un plan de balkanisation de la République Démocratique du Congo (RDC).
Dans une note de plaidoyer publié le 19 décembre dernier, par sa commission locale "Justice et paix", l'Eglise catholique signale que ce sont les provinces du Nord et du Sud-Kivu ainsi que celle de l'Ituri qui sont visées.
Cette commission qui dit détenir des informations "de plus en plus persistantes", soupçonne des officiers militaires, anciens des rébellions du RCD, CNDP et M23, d'être derrière ce plan de balkanisation.
Stratégie ? Certains officiers, infiltrés au sein de l'armée congolaise, orchestraient, d'après la commission, des tueries de civils de Beni, en vue de permettre l'occupation des terres des populations autochtones massacrées par un groupe d'allochtones.
La commission soupçonne l'existence d'un programme d'occupation des terres arables des populations de Beni, suite aux vagues des mouvements des populations d'origine inconnue, signalées depuis 2014 au Nord-Kivu.
Il s'agit des populations qui déclarèrent quitter le petit nord (du côté de Masisi) pour le grand nord et l'Ituri, à la recherche, d'après elles, des nouvelles terres arables.
Ce qui inquiète le diocèse catholique de Butembo-Beni
"Comment expliquer qu'un groupe d'hommes occupent les terres pourtant abandonnées par d'autres à la suite des massacres ? Ne seraient-ils pas de connivence avec ceux qui orchestrent ce phénomène des massacres pour créer de la psychose au sein de la population autochtone pour la pousser à abandonner ses terres pour les occuper après ?", s'interroge la commission diocésaine "Justice et paix".
Elle redoute que ces personnes en mouvement soient des "réfugiés hutus rwandais chassés dernièrement de la Tanzanie" et qu'on voudrait installer à Beni. Cette commission demande au gouvernement congolais de prendre au sérieux cette question pour ne pas être "surpris quand la balkanisation aura commencé".
En clair, la commission diocésaine "Justice et paix" de Butembo-Beni exige la permutation de tous les militaires, officiers et soldats de rang issus des anciennes rébellions pro-rwandaises, de l'est vers l'ouest et la neutralisation de tous les groupes armés mai-mai.
Elle sollicite aussi le déploiement à Beni d'une opération spéciale du type Artémis afin de répondre à ce qu'elle qualifie d"'inefficacité actuelle" de l'armée congolaise et d'éviter "le génocide à Beni et la balkanisation de l'est de la RDC".
La commission exige aussi une "enquête internationale indépendante" afin d'identifier les auteurs de massacres de Beni pour qu'ils soient jugés. Elle suggère, pour ce faire, aux autorités de se baser sur différents rapports qui indexent des "officiers bien connus", ayant travaillé pour le régime de Joseph Kabila, d'être impliqués dans les tueries.
C'est depuis octobre 2014, il y a de cela donc 5 ans, que la région de Beni connaît une série de massacres de civils que l'armée attribue aux rebelles ougandais des Forces démocratiques alliées (ADF).
Ce diocèse parle de plus de 2 000 personnes massacrées, dont plus de 150 depuis le lancement, fin octobre dernier, des opérations de "grande envergure" contre les présumés ADF.
Claude Sengenya