<span style="font-weight: 400;">Le président du parti “Peuple au service de la nation” (PSN), Rudy Mandio, réclame le corps du militant de son parti, Fortunat Ngimbi, abattu au cours des manifestations de septembre 2016 destinées à réclamer l’alternance. Un an, jour pour jour, après le drame, Rudy Mandio a, au cours d’une interview accordée à ACTUALITE.CD ce mardi 18 septembre 2017, accusé le gouverneur de la ville de Kinshasa, André Kimbuta, d’avoir confisqué le corps, privant ainsi à la famille biologique et au parti le droit d’un enterrement par leurs propres moyens.</span>
<b>Un an depuis que la population était descendue dans la rue pour exiger les élections. La répression a fait des victimes dont un membre de votre parti, Fortunat Ngimbi. Quelle est la situation aujourd’hui, l’avez-vous déjà enterré ?</b>
<span style="font-weight: 400;">Non. Nous ne l’avons jamais enterré. Nous ne savons même pas où se trouve son corps aujourd’hui. On a été privé de son corps. Nous n’avons pas pu jouir de notre droit en tant que famille politique et biologique.</span>
<b>Pourquoi ce corps n’a toujours pas été enterré ?</b>
<span style="font-weight: 400;">En septembre 2016, les gens ont manifesté pour réclamer l’alternance. Et parmi les manifestants, il y a l’un de nos militants au nom de Fortunat Ngimbi qui a été sauvagement abattu par les forces de l’ordre parce que la répression était sanguinaire. Après cela, nous avons entamé des démarches auprès du gouvernement provincial (de la ville de Kinshasa, Ndlr). Nous sommes allés à la morgue pour réclamer le corps de notre militant. Il y avait aussi beaucoup de gens qui réclamaient les corps de leurs membres de famille. Ensuite, nous avons vu le gouverneur Kimbuta nous proposer 5000 USD avec un cercueil pour enterrer notre militant. Mais, nous avons refusé cette proposition et avons décidé d’enterrer notre vaillant soldat nous-mêmes par nos propres moyens. Mais, après cela, le corps ne nous a jamais été rendu. Nous ne savons pas si c’est parce que nous avions refusé la proposition de Kimbuta qu’ils ont décidé de ne pas nous rendre le corps de notre militant. C’est à Kimbuta de nous le dire. Ça fait déjà une année que nous attendons ce corps.</span>
<b>Vous dites que le gouverneur a refusé de vous rendre le corps. D’après vous, pour quelle raison ?</b>
<span style="font-weight: 400;">Vous et nous, sommes dans la confusion. Peut-être que c’est à cause des manœuvres auxquelles le gouvernement se livre et qui ne respecte pas les droits de l’homme. Ils savent eux-mêmes la raison. Mais nous voulons savoir où a été enterré le corps de notre militant. Parce qu’on ne peut pas rester comme ça sans avoir des suites. Nous avons pensé à aller déposer des fleurs sur sa tombe mais nous ne savons pas où aller. Nous sommes là pour demander des explications à Kimbuta parce que c’est lui qui est le gouverneur de la ville. C’est lui qui était chargé de gérer les familles qui étaient à la recherche des corps de leurs membres.</span>
<b>Mais avez-vous vu quand même le corps quand vous étiez à la morgue ?</b>
<span style="font-weight: 400;">D’abord, il y a eu beaucoup de tracasseries au niveau de la morgue. Et on nous avait exigé une note du gouvernorat autorisant aux familles d’aller identifier les corps de leurs proches. Nous avons ensuite entamé les démarches avec le gouvernement. Mais juste quand nous avons refusé la proposition de 5000 USD avec un cercueil et un lieu d’enterrement que tout a été bloqué. Alors que le corps existait bien à la morgue de Mama Yemo. Et nous ne savons pas ce qui se passe.</span>
<b>Donc le corps n’existe plus à l’heure actuelle à la morgue de l’hôpital Mama Yemo ?</b>
<span style="font-weight: 400;">Nous ne savons pas. Je n’en ai aucune idée. Je pense que c’est à Kimbuta de nous dire où se trouve le corps de Fortunat Ngimbi.</span>
<b>Mais la famille politique ou biologique n’a-t-elle pas entrepris des démarches pour savoir si le corps est toujours à la morgue ?</b>
<span style="font-weight: 400;">Au niveau de Mama Yemo, nous n’y avons pas accès sans l’autorisation de Kimbuta. Donc quand nous partons là-bas, ils ne reçoivent personne. </span>
<b>Pensez-vous que son corps ait été enterré dans une fosse commune ?</b>
<span style="font-weight: 400;">Je ne sais pas. C’est peut-être à Kimbuta de nous le dire. Mais connaissant le régime en place et ses pratiques, ça peut être possible.</span>
<b>Comment se porte la famille biologique de votre militant ?</b>
<span style="font-weight: 400;">Ils sont malheureux. Beaucoup de tristesse. Nous sommes des Bantous. Perdre quelqu’un et ne pas lui rendre un dernier hommage, ça coûte beaucoup. Donc sa famille est déstabilisée. Nous aussi, sa famille politique, d’ailleurs. Beaucoup d’émotions de voir un jeune être abattu juste parce qu’il s’était levé pour réclamer ses droits. </span>
<b>Un an après ces évènements, les choses n’ont pas beaucoup changé sur le plan politique. Alors quelle suite entrevoyez-vous après tout cela ?</b>
<span style="font-weight: 400;">Nous sommes dans une démarche pour dire non au 3ème mandat de Joseph Kabila. Nous croyons fermement à l’alternance. Parce que l’alternance, c’est l’oxygène de la démocratie, nous devons aller aux élections. Nous avons une constitution et elle doit être respectée. C’est suite à cela que nous sommes allés à la CENCO. Cela a abouti à l’accord du 31 décembre. Voilà, Kabila a eu un sursis d’une année pour qu’il organise les élections. Mais comme vous le savez, il ne respecte rien. Il a procédé à la corruption et au débauchage. Et voilà où nous en sommes aujourd’hui. Mais nous nous tenons toujours à l’Accord. On doit avoir les élections cette année parce que l’Accord a été signé. Et l’élection la plus attendue, c’est la présidentielle. Alors seule la population doit décider de son destin.</span>
<b>Votre dernier mot?</b>
Mon dernier mot, c’est que je réclame le corps de notre militant. Depuis qu’on se pose des questions il n’y a aucune réponse. Alors nous attendons toujours la réponse.
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Interview réalisée par<b> Jacques Kini</b>