Le président de l’Alliance pour le Renouveau du Congo (ARC), Olivier Kamitatu, qualifie les travaux d’évaluation du processus électoral par la tripartite CENI-CNSA-gouvernement d’une réunion de la centrale électorale de la Majorité présidentielle. Dans une interview ce samedi 2 septembre 2017 à ACTUALITE.CD, le membre du G7 affirme que la voie pour obtenir l’alternance en RDC reste l’application de l’article 64.1 de la Constitution, le pouvoir ayant violé l’accord de la Saint-Sylvestre.
<b>Comment réagissez-vous aux travaux d’évaluation du processus électoral par CNSA-CENI-gouvernement à Kananga ?</b>
Il s’agit d’une grossière mascarade qui consacre l’inféodation totale de la CENI et du CNSA à la Majorité Présidentielle. En réalité, il s’agissait bel et bien d’une réunion de la centrale électorale de la MP déguisée en prétendue séance d’évaluation. La CENI n’a plus aucune crédibilité. Elle a une fois encore manqué à sa parole en ne publiant pas le calendrier le 31 août, date annoncée par elle-même. Les observateurs invités à cette réunion doivent se rendre à l’évidence : Monsieur Kabila ne veut pas d’élections. Il oblige la CENI à louvoyer, à chercher des prétextes pour repousser la publication d’un calendrier qui annonce l’issue fatale d’un dictateur qui cherche encore et toujours par tous les moyens à changer la constitution, organiser un référendum et à se représenter.
<b>L’accord expire en principe le 31 décembre, que sera l’avenir du pays après cette date ?</b>
Lors de son second et dernier mandat, Monsieur Kabila et son régime se sont évertués à saboter le processus électoral. Quand il n’a pas recours à la violence et à la terreur, il utilise la ruse et le mensonge. Il n’a pas hésité à abuser de la confiance des évêques pour duper les Congolais et violer les dispositions de l’Accord de la Saint-Sylvestre. C’est la raison pour laquelle, à la suite de l’appel des mouvements citoyens, Moïse Katumbi, Félix Tshisekedi, Pierre Lumbi et tous ceux qui soutiennent le retour à l’ordre Constitutionnel ont salué cette approche qui consiste à recourir à la mise en œuvre de l’article 64 de la Constitution. Kabila doit partir. Il a assez abusé de la bonne foi des Congolais. Le 31 décembre 2017, il aura épuisé la prolongation et le peuple sifflera la fin de la partie.
<b>Lumanu Sefu reconnaît que le rôle du CNSA est aussi de faire le suivi de l’application des mesures de décrispation politique, êtes-vous de cet avis ?</b>
De quel CNSA parle-t-on ? Le club d’amis réunis sous la baguette de Monsieur Kabila est le fruit de la violation de l’Accord. Les propos de Lumanu Sefu prêteraient à sourire n’eût été le caractère tragique des massacres à grande échelle de nos populations, de la privation systématique des libertés, de l’exil des opposants, de l’instrumentalisation de la justice, du verrouillage de l’espace public au profit de la minorité à la solde de Monsieur Kabila. Qu’attend-on pour libérer Eugène Diomi, Jean-Claude Muyambo, Franck Diongo, Huit Mulongo et tous les jeunes de Lucha injustement emprisonnés ? Pourquoi menacer d’arrestation des opposants ou poursuivre à leur encontre des procédures judiciaires iniques pour les exclure du processus électoral ? Dans l’histoire de notre pays, l’exclusion a toujours conduit à la révolte. Monsieur Kabila le sait très bien. Est-ce que ce n'est peut-être pas ce qu’il cherche aujourd’hui. Qu’il sache que nous ne tomberons pas dans ce jeu de violence. Les Congolais paient déjà un lourd tribut au régime actuel. Le CNSA et la CENI sont aujourd’hui responsables de la tension qui règne dans le pays. Leurs dirigeants auront à rendre compte tout comme Monsieur Kabila de ce qui arrivera au Congo s’ils continuent à défier le peuple congolais et à lui confisquer les droits qui lui sont reconnus par la Constitution.
<b>Quels commentaires faites-vous de la signature du “Manifeste du Citoyen Congolais” par des mouvements citoyens congolais à Paris ?</b>
Les mouvements citoyens ne sont pas suspectés de se battre pour accéder au pouvoir. Leur manifeste est le fruit d’une réflexion commune qui répond à l’appel des évêques de la CENCO. Nous soutenons sans réserve cette démarche et nous l’appuyons. C’est la responsabilité de chaque congolais et c’est son devoir sacré de faire échec à la dictature qui s’est installée et qui conduit le pays au chaos. Désormais, à la faveur de ce manifeste, l’exigence faite à chacun de nous consiste à faire un choix et un seul. Et de répondre à une seule question : Dans quel camp se place-t-on ? Celui de l’oppression ou celui de la restauration de l’ordre démocratique et de nos libertés ? Voulons-nous subir la loi d’un dictateur à vie ou donner un avenir meilleur à nos enfants ? Les évêques de la CENCO et les mouvements citoyens nous posent une question simple. Notre réponse commune déterminera l’avenir de la nation congolaise.
<b>Que répondez-vous à la MP qui qualifie le “Manifeste du Citoyen Congolais” d’une démarche insurrectionnelle ?</b>
Face à ceux qui s’érigent en fossoyeurs de la démocratie et qui renient leur serment et leurs engagements pour se maintenir au pouvoir, il faut opposer une prise de conscience forte. Cette force n’est pas une insurrection mais une démarche citoyenne et responsable. Tous les Congolais sont invités en âme et conscience à s’engager et à ne pas baisser les bras. Les dictateurs ont toujours peur de la prise de conscience des peuples qu’ils espèrent bâillonner en les poussant à la résignation et au fatalisme. Recourir à l’article 64.1 tel que le préconise le Manifeste « Esili » est la seule voie de recours possible pour un peuple courageux qui se bat les mains nues face à une dictature sanguinaire qui n’hésite pas à tirer à balles réelles sur des manifestants pacifiques, à attenter à la vie des juges indépendants ou à les menacer, à arrêter les opposants et les activistes des droits de l’homme et à priver le peuple de son droit à s’exprimer et à manifester.
<b>Interview réalisée par Patrick Maki</b>