Région des Grands Lacs : les ONG saluent les annonces de Paris mais exigent des actions concrètes face à la crise humanitaire en RDC

Conférence de soutien à la paix et à la prospérité dans la région des Grands Lacs
Conférence de soutien à la paix et à la prospérité dans la région des Grands Lacs

À l’issue de la Conférence internationale pour la paix et la prospérité dans la région des Grands Lacs tenue jeudi à Paris, des organisations de la société civile ont salué des annonces de soutien tout en appelant à les traduire « très rapidement » en actes concrets pour répondre à l’urgence humanitaire en République démocratique du Congo et dans la région.

En amont puis durant la conférence, des ONG congolaises et internationales ont réitéré leurs demandes de financements accrus, de protection des civils et d’un accès « sûr et sans entrave » à l’aide. Les États participants ont exprimé leur volonté d’appuyer l’aide humanitaire, l’accès humanitaire et les efforts de paix, avec des annonces de financements additionnels et une réponse articulant urgence, développement et paix, ont indiqué ces acteurs.

« La conférence de Paris offre une lueur d’espoir (…) Mais ce ne sera que demain, sur le terrain, que nous pourrons juger si les paroles prononcées aujourd’hui auront un impact concret », a déclaré Florian Monnerie, directeur d’Action contre la Faim en RDC, rappelant que « près de 28 millions de personnes » y font face à une insécurité alimentaire aiguë et qu’« un enfant sur deux souffre de malnutrition chronique ».

La situation des femmes et des filles a été jugée « particulièrement alarmante » par CARE RDC. « En octobre 2025, seuls 35,1% du Plan d’intervention humanitaire pour la protection étaient financés », a relevé Amadou Bocoum, pointant « plus de 67 000 cas d’agressions sexuelles » signalés sur les quatre premiers mois de l’année et des pénuries de kits de prophylaxie post-exposition.

Le CONAFOHD a alerté sur une « bombe sanitaire et biologique à retardement » liée à l’isolement de Bukavu et Goma, aux fermetures d’aéroports et à la « suspension du financement de l’USAID », provoquant des ruptures de médicaments essentiels (antituberculeux, antirétroviraux, antipaludéens, insuline, vaccins…). Les organisations locales, « vitales » dans les zones reculées, subissent « menaces » et « restrictions de mouvements », a averti son président Dr De-Joseph Kakisingi, qui réclame un accès direct à des financements « de qualité » et un espace humanitaire « libre, sécurisé et accessible ».

Pour le Forum des ONGI en RDC (FONGI), la conférence a envoyé « un signal important » mais « les annonces n’auront de sens que si elles se traduisent par des mesures concrètes — en commençant par la levée immédiate de tous les obstacles administratifs et logistiques qui étouffent la réponse humanitaire », a insisté son directeur Luc Lamprière. « Chaque dollar retenu par une taxe ou un blocage, c’est un repas, un médicament ou un abri en moins », a-t-il ajouté, appelant aussi à « protéger les ONG locales et les personnels congolais ».

Human Rights Watch a jugé « positif » le renforcement de la réponse humanitaire mais a exhorté les gouvernements à « agir concrètement pour protéger les civils » et « en finir avec l’impunité persistante » qui « alimente les atrocités depuis des décennies », selon Bénédicte Jeannerod, directrice France.

Médecins du Monde a chiffré à « 15 000 » le nombre de survivantes de violences sexuelles en attente de soins au Nord-Kivu. Sans « contraception d’urgence ni traitements post-exposition », « ces femmes et ces filles sont condamnées à souffrir en silence », a alerté son président Jean-François Corty, décrivant un système de santé « effondré ».

Pour Oxfam en RDC, « la conférence de Paris ne peut se contenter de déclarations » : elle doit « débloquer des financements, garantir l’accès humanitaire et réaffirmer le respect du droit international humanitaire », a déclaré son directeur pays Dr Manenji Mangundu.

SOLIDARITÉS INTERNATIONAL a enfin demandé que l’initiative onusienne Humanitarian Reset soutienne l’accès aux populations « sans déprioriser les besoins » et fasse des « risques et de la protection du personnel » une priorité, a souligné Justine Muzik Piquemal, directrice régionale.

Les ONG préviennent que l’élan diplomatique parisien ne produira d’effet qu’au prix d’une mise en œuvre rapide, coordonnée et exempte d’entraves, au bénéfice direct des populations affectées.