Dans la province de la Tshopo, le Programme de mise en valeur des savanes et forêts dégradées (PSFD) est en train de révolutionner l’agriculture locale. Avec le développement de la production de maïs blanc et de sa transformation en semoule, la dépendance aux importations de l’Ouganda diminue progressivement. Mais cette réussite se heurte à des défis majeurs, allant des infrastructures défaillantes aux difficultés politiques et économiques.
Grâce au PSFD, environ 450 tonnes de semoule de maïs ont été produites lors de la phase pilote, remplaçant les importations coûteuses de l’Ouganda. Dominique Kasimba, entrepreneur et porteur du projet, estime qu’avec l’extension à 1 000 hectares de maïs en 2024, la production pourrait atteindre 3 000 tonnes, permettant ainsi d’alimenter non seulement la ville de Kisangani, mais également Kinshasa via le fleuve Congo.
Ce changement est crucial pour une région où le sac de semoule coûtait jusqu’à 50 dollars américains, un montant prohibitif pour de nombreuses familles. « Aujourd’hui, nous consommons localement à moindre coût, et cela soutient aussi nos agriculteurs », explique un consommateur de Kisangani.
Les bénéfices économiques sont déjà visibles, comme en témoigne Djemba Ismaël, un paysan local : « Avec les revenus du maïs, j’ai pu payer les études de mes enfants et construire une maison. »
Des infrastructures en mauvais état
Cependant, cette révolution agricole est freinée par l’état catastrophique des infrastructures dans la province de la Tshopo. Les routes rurales, essentielles pour acheminer les produits agricoles, sont dans un état de délabrement avancé. Par exemple, sur les 790 km de routes de desserte agricole du territoire d’Opala, la majorité est impraticable. La RN4, pourtant stratégique, souffre également d’un entretien insuffisant.
Cette situation limite considérablement la capacité des agriculteurs à acheminer leurs productions vers les marchés urbains. « Sans des routes praticables, nos efforts pour augmenter la production risquent de ne pas porter leurs fruits », avertit Dominique Kasimba.
Un accès limité à l’électricité et à l’eau
L’accès à l’électricité est un autre frein majeur. À Kisangani, le taux de raccordement est de seulement 23%, et dans les territoires, il chute à 0,8%. La centrale hydroélectrique de la Tshopo, autrefois un moteur économique, ne produit plus que 2,5 MW, loin des 15 MW de sa capacité initiale, face à une demande qui atteint 40 MW. Cette pénurie énergétique limite les capacités de transformation agricole, comme celle des moulins pour le maïs.
Défis politiques et organisationnels
Les défis politiques ne sont pas en reste. La province souffre d’un manque d’investissements publics et d’une coordination insuffisante entre les niveaux national et local. Par ailleurs, l’absence d’une banque de crédit agricole limite l’accès au financement pour les agriculteurs, rendant difficile l’acquisition d’équipements modernes ou le renouvellement des semences.
Vers une agriculture durable et compétitive
Malgré ces obstacles, le PSFD continue de montrer des résultats prometteurs. La transformation du maïs en semoule, associée à des cultures pérennes comme le cacao, permet de réduire la pression sur les ressources naturelles et de diversifier les revenus des agriculteurs.
Cependant, pour pérenniser ces acquis, des investissements dans les infrastructures routières, énergétiques et hydrauliques sont indispensables. En parallèle, la mise en place de politiques agricoles adaptées, notamment en matière de financement et de soutien technique, est importante pour garantir la compétitivité de la Tshopo sur le marché national et international