En République Démocratique du Congo où le mariage est souvent perçu comme une étape importante de la vie, de nombreuses femmes se retrouvent confrontées à une pression sociale et familiale considérable. Trois célibataires, âgées de 33, 37 et 40 ans, que nous avons rencontrées ce 22 juillet livrent leurs témoignages.
Julie, 33 ans, enseignante, confie qu'"à chaque fête de famille, les questions fusent : et toi, quand est-ce que tu te maries ? Tu ne veux pas d'enfants ? Ils donnent l'impression qu'être célibataire est une anomalie. On me demande souvent si j’ai un petit-ami sérieux. C’est comme si ma valeur en tant que femme se mesurait à ma capacité à fonder une famille. J’ai l’impression de ne pas avoir le droit de choisir mon propre rythme de vie."
Evelyne, 37 ans, entrepreneure, abonde dans le même sens : "la société a des attentes très précises vis-à-vis des femmes. Être célibataire à mon âge, c'est comme si j'avais échoué quelque part. J’ai réussi à me construire une carrière solide, mais ma mère ne cesse de me rappeler que je suis une femme et que ma place est au foyer. Elle me dit que je suis trop exigeante et que je ne trouverai jamais personne si je continue comme ça. Cette pression est parfois difficile à gérer, surtout quand elle vient de la part de sa propre mère."
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Les stéréotypes de genre profondément ancrés dans la société poussent ces femmes à se conformer à un modèle unique de réussite féminine : le mariage et la maternité. Les conséquences de ces pressions se manifestent dans tous les aspects de leur vie. "Je me suis retirée de certaines réunions de famille pour éviter les commentaires désobligeants et les regards inquisiteurs. On me dit que je suis vieille, que je vais finir seule. Ces jugements me blessent profondément", confie Esther, 40 ans, fonctionnaire.
Les regards insistants, les questions indiscrètes, les conseils non sollicités... ces femmes sont confrontées au quotidien à des situations qui mettent à mal leur estime de soi. "On a l'impression d'être constamment jugée, de ne pas avoir le droit de vivre comme on l'entend", renchérit-elle .
Face à cette pression sociale, elles ont développé des stratégies d'adaptation. Certaines se sont réfugiées dans le travail, d'autres dans leurs passions. "J'ai créé mon entreprise pour me sentir utile et indépendante", explique Evelyne.
Julie, quant à elle, a trouvé du soutien auprès d'un groupe de femmes célibataires : "Échanger avec d'autres femmes qui vivent la même chose m'a beaucoup aidée à relativiser."
Si les stéréotypes sont tenaces, des signes d'évolution apparaissent. De plus en plus de voix s'élèvent pour défendre la liberté de choix des femmes.
"Je souhaite que les choses changent, que les femmes soient libres de choisir leur propre chemin", espère Esther.
Les témoignages de ces trois femmes mettent en lumière une réalité souvent occultée : la pression sociale exercée sur les femmes célibataires en RDC. Si les défis sont nombreux, leur courage à faire face est une source d'inspiration pour toutes celles et ceux qui luttent pour la construction d’une société juste et égalitaire pour tous.
Nancy Clémence Tshimueneka