A Kinshasa, en dehors du ministère des Affaires sociales, qui a notamment pour mission la réinsertion sociale des enfants de la rue, des organisations nongouvernementales sont également actives dans ce domaine. Le Desk Femme d'Actualité.cd s’est entretenu avec Fanny Kamweni, responsable de la fondation Evangile actif auprès des personnes vulnérables (EVAPEV).
Bonjour Madame Fanny Kamweni, pouvez-vous nous parler de vos activités?
Fanny Kamweni : Je coordonne l’ONG Evangile actif auprès des personnes vulnérables (EVAPEV). Depuis six ans, j’accueille dans ma maison, des enfants de la rue et d'autres enfants vulnérables (orphelins notamment). Nous avons accepté, mon époux et moi, de les accueillir en plus de nos enfants biologiques. Ma maison les a accueillis avant de créer une ONG.
Qu’est-ce qui vous a motivé à mettre en place une telle ONG ?
Fanny Kamweni : Ayant des parents divorcés et un parcours parsemé de difficultés, j’ai vécu dans la rue parce que les circonstances de la vie m’y ont obligées. J’ai été accusée de sorcellerie. Plus tard, j’ai rencontré Arnold Mushete, un éducateur, qui est devenu mon coordinateur parce que j’ai aussi bénéficié d’une réinsertion scolaire. Après mon diplôme, j’ai été admise au CAFES (Centre Africain de formation des éducateurs spécialisés). J’ai ensuite travaillé avec des ONG pendant 14 ans. Après mon mariage, j’ai commencé à accueillir des enfants en situation difficile dans ma maison. Je suis donc éducatrice depuis 2004 et j’ai dirigé cette ONG depuis 2016. J’ai également travaillé en tant que consultante à l’UNICEF.
Vous gérez combien d’enfants actuellement et d’où viennent-ils ?
Fanny Kamweni : nous avons en tout, 65 enfants. 24 en hébergement dans ma maison, plus de 27 à Mangala (une localité de Mont-Ngafula). Nous avons également des enfants qui sont pris en charge depuis le toit parental. Notamment, ceux qui ne peuvent pas être nourris dans ces ménages. 30 % d’enfants nous viennent de la rue (shégués), 30 % d’orphelins et 40% d’enfants vulnérables. La plupart d’entre eux nous ont été envoyés par le ministère des affaires sociales ainsi que la police de protection de l’enfant parce qu’elle n’a aucun centre de transfert d’enfants. Nous sommes certifiées, en tant qu' ONG, par le ministère des affaires sociales.
Rencontrez-vous également des difficultés ?
Fanny Kamweni : oui, nous rencontrons d’énormes difficultés. Notamment, la scolarisation des enfants. C’est un grand défi. La santé ainsi que l’alimentation. Nous avons tiré des enfants des situations difficiles, nous devons aussi être en mesure de leur offrir des conditions plus paisibles. Nous nous battons pour mettre à leur disposition de meilleures conditions de vie et de scolarité. Par moment, nous continuons à payer des frais scolaires même pendant les grandes vacances parce que nous avons plaidé auprès des ONG.
Avez-vous également des partenaires qui appuient le projet ?
Fanny Kamweni : Actuellement, nous avons obtenu le partenariat avec une organisation belge de développement, Enfance Tiers Monde (ETM). C’est elle qui nous appuie en scolarité pour une partie des enfants et qui nous a permis d’avoir un centre à Mangala. Nous avons aussi des proches qui nous envoient des vivres et non vivres. Nous recevons différentes sortes de dons. L’Etat congolais ne nous appuie pas encore matériellement mais, il nous assure une sécurité aussi.
Quelles sont vos perspectives ?
Fanny Kamweni : nous avons pour objectif d’offrir à tous les enfants une famille. Et cette famille, c’est EVAPEV. Leur présenter les droits et leurs devoirs tel que cela s’effectue dans une famille. Nous aimerions multiplier le nombre de centres dans la ville de Kinshasa et ailleurs. Nous avons installé une école maternelle à Mangala mais l’objectif est de capitaliser l'espace de terre que nous avons. Construire une école primaire et secondaire qui va être bénéfique autant à la communauté qu’à nous. L’école la plus proche de cette région se trouve à 8 kilomètres.
Vos recommandations en faveur des enfants de la rue ?
Fanny Kamweni : les services de l’Etat devraient arrêter de détourner les moyens financiers destinés à toutes les personnes vulnérables dans les rues de Kinshasa, y compris les enfants. Il y a des ressources financières disponibles. Mais cela ne leur parvient pas. Les enfants se multiplient dans la rue alors qu’il y a des personnes sensées travailler pour leur bien-être.
Comment faire pour arriver ici ?
Fanny Kamweni : nous sommes sur la route de Kimwenza Gare, à l’entrée couvent des sœurs (Arbre de vie) dans la commune de Mont-Ngafula. Le grand centre se trouve à 15 km d’ici, à Mangala, un autre quartier de Mont-Ngafula mais rural.
Propos recueillis par Prisca Lokale