La campagne de vaccination contre la Covid-19 a été lancée en République Démocratique du Congo depuis le mois d'avril. Parmi les catégories privilégiées selon le ministère de la santé, il y a notamment le personnel de santé. Qu'est-ce qui pousserait le personnel soignant à ne pas se soumettre à cet exercice ? Le Desk femme d'Actualité.cd est allé à la rencontre de certains qui expliquent les raisons de leur refus par rapport à la vaccination.
"Je ne veux pas le faire! " s'exclame Élise, infirmière dans un hôpital affecté à la prise en charge des cas Covid-19 d'environ 10 commune.
Pour elle, se faire vacciner est d'abord une question de choix et de volonté.
"Ce n'est pas parce que je suis infirmière, dans un tel hôpital que je dois me faire vacciner. J'ai encore des doutes, je reçois des personnes, je vois les effets secondaires sur la plupart des vaccinés. Psychologiquement, je ne me sens pas encore prête à me soumettre à cet exercice. Je choisirais de le faire quand je serai convaincue", a-t-elle ajouté.
S'appuyer sur le respect des gestes barrières
Parmi les raisons avancées par l'Organisation Mondial de la Santé et le Ministère de la santé, il y a notamment le fait que le personnel de santé est en première ligne de la riposte contre la pandémie. Selon les dernières informations de l'OMS, en Afrique, plus de 10 000 travailleurs de la santé dans 40 pays ont été infectés par la COVID-19.
Nadine Shabunda, estime pouvoir se protéger en respectant les mesures barrières. "Il est vrai que nous sommes en première ligne dans la riposte. Mais, nous prenons des précautions pour ne pas attraper la maladie. Nous respectons les gestes barrières (port du masque, lavage régulier des mains, désinfection et stérilisation du matériel, du milieu ainsi que de nos tenues de service).Je ne pense pas que le vaccin soit la seule arme contre la Covid-19, " dit-elle.
Et de renchérir, "nous pouvons nous protéger par le respect de ces mesures et protéger ceux qui nous entourent. Pour l'instant, je ne prendrais pas de vaccin."
C'est également le point de vue de Rosiane Masiala, au sein d'une maternité à Lingwala.
"Ce qui aiderait le monde à repousser ce virus, c'est le respect des mesures d'hygiène. Nous (la RDC) avons la chance de ne pas être ravagés par la pandémie comme cela a été le cas dans plusieurs pays du monde. Ce sont peut-être les effets secondaires qui renforcent le doute au niveau du personnel de santé comme de toute la population. Tel vaccin peut avoir des effets secondaires sur l'organisme d'un individu, et ne pas en produire chez un autre individu. Entre temps, respectons les gestes barrières" a dit la sage-femme.
Le doute au sommet de l'État
Début juillet, lors de son séjour à Goma, Félix Tshisekedi, au cours d'une interview accordée à la presse, a fait savoir qu’il n’avait jamais été convaincu par l'efficacité du vaccin AstraZeneca. « Nous étions prêts à lancer la campagne de vaccination. La veille, j'ai vu cette information (inefficacité d’AstraZeneca, ndlr) à la télévision d'abord puis dans les réseaux sociaux. J'ai transféré cette information au ministre pour lui dire attention, demain nous lançons la campagne de vaccination mais regardez ce qui se passe en Europe. Tous ces pays scandinaves de l'Europe de l'Ouest avaient pris la décision de suspendre AstraZeneca. Ils estimaient que ce n'était pas efficace. A fortiori, nous qui avions bénéficié de ce produit, on ne pouvait qu'aller dans le même sens » expliquait le chef de l'état. Fatuma s'appuie sur la position de Félix Tshisekedi.
"Le personnel de santé est composé de citoyen au même titre que les politiques et autres personnes, peu importe le secteur dans lequel elles évoluent. Si le Chef de l'État a lui-même émis des doutes concernant le vaccin AstraZeneca, de nombreuse autre personnalitésdu pays ne se sont pas soumis à cet exercice, qu'est-ce qui pourrait nous encourager à nous soumettre à notre tour ?" s'interroge Fatuma Diasiwa, dans un centre de santé de Barumbu.
Et d'ajouter, "peut-être que les autres vaccins, tels que Pfizer pourront aider les gens à croire à leur efficacité et nous même à nous faire vacciner".
Clémence Makala, chef de laboratoire dans une maternité espère également se soumettre à la vaccination lorsque les prochaines doses seront arrivées en RDC.
"Au départ, je ne pensais pas pouvoir me faire vacciner. Tout d'abord, parce que j'ai vu à travers les médias et réseaux sociaux, ce qui se racontait autour du vaccin AstraZeneca (...). Plus les jours avancent, plus je comprends l'importance de se faire vacciner. Notamment, avec l'augmentation des cas confirmés et des décès. Si les nouveaux modèles des vaccins arrivent, j'irais également me faire vacciner", confie-t-elle.
Pour rappel, selon le dernier bulletin de l'équipe de la riposte, depuis le début de l’épidémie déclarée le 10 mars 2020, le cumul des cas est de 45.868 cas confirmés, dont 45.867 et 1 cas probable. Au total, il y a eu 984 décès et 28.801 personnes guéries. Parmi les 26 provinces touchées, Kinshasa occupe la première place avec 32.254 cas. Le pays se trouve depuis le 03 juin sous la troisième vague de la pandémie.
*Les noms et prénoms des personnels de santé ont été changés par peur de représailles au niveau de leurs centres.
Prisca Lokale