L’INVESTITURE PARLEMENTAIRE DU GOUVERNEMENT EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO (RDC). Quels enjeux et défis pour le Gouvernement de Sama Lukonde ?

Photo d'illustration/droits tiers

Par

Paulin PUNGA KUMAKINGA

Chercheur au Centre de Recherches et d’Etudes sur l’Etat de Droit en Afrique (CREEDA)(www.creeda-rdc.org)

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Introduction

Outre le fait qu’elle  a mis fin à une longue et harassante attente, la publication du gouvernement Sama Lukonde a suscité dans le chef  d’une importante frange des députés une fronde contre l’ordonnance présidentielle, critiquée pour n’avoir pas respecté la représentativité nationale, mais surtout pour  n’avoir pas suffisamment récompensé les efforts consentis pour faire basculer la majorité parlementaire. 

En effet, le 13 avril 2021, soit un jour après cette publication, 138 députés nationaux s’étaient réunis au Palais du peuple où un mémorandum contenant leurs principales revendications  était rédigé à l’attention du Président de la République. Ils s’apprêtaient à en livrer le contenu au public le lendemain, à travers une déclaration à la presse.  Mais le Président de l’Assemblée nationale les avait persuadés de lui remettre ce mémorandum afin qu’il le transmette, de ses propres mains, au Chef de l’Etat. Entretemps, le 14 avril au soir, l’on apprenait que le nombre des frondeurs avait atteint deux cents.

S’agissant de la représentativité nationale, ces députés prétendent que l’ordonnance présidentielle n’a pas suffisamment respecté ce critère constitutionnel, tant certaines provinces sont mieux représentées que d’autres ; ils vont jusqu’à révéler que dans une province, certains territoires sont servis alors que d’autres pas du tout. Ils concluent purement et simplement à l’injustice. 

Pour ce qui est de la récompense en rapport avec le basculement de la majorité parlementaire, ces députés frondeurs prétendent que le Chef de l’Etat lui-même leur avait fait une promesse selon laquelle le gouvernement serait essentiellement composé des députés, parce que non seulement ils avaient été très braves et héroïques dans la décision qu’ils avaient prise de faire chuter Jeanine Mabunda et le FCC, mais surtout parce que la réussite de son mandat dépendrait entre autres du travail qu’ils feraient dans leurs circonscriptions respectives en tant qu’élus.

Que ces prétentions soient légitimes ou non, l’objectif de cette réflexion est d’explorer les implications d’une telle fronde sur le plan aussi bien juridique que politique, étant entendu que le gouvernement est l’émanation du parlement, mieux de la majorité parlementaire, dans le régime politique congolais. En d’autres termes, les députés frondeurs peuvent-ils bloquer l’investiture du gouvernement, comme ils le prétendent ? Si oui, sur quelle base pourraient-ils le faire ?

Pour tenter d’apporter quelque lumière sur ces questions,  cette réflexion est axée sur deux points essentiels. Le gouvernement en tant qu’émanation du parlement sera premièrement étudié(I) et les leçons à tirer du Gouvernement Sama Lukonde au regard des critères de formation existants(II).

 I. LE GOUVERNEMENT, EMANATION DU PARLEMENT DANS UN REGIME PARLEMENTAIRE

Contrairement au régime présidentiel où le Président jouit de la pleine liberté de choisir ses ministres en dehors et sans l’implication du Parlement, le régime parlementaire soumet le choix des membres du gouvernement au contrôle des forces politiques (partis politiques) qui composent la majorité au Parlement. En d’autres termes, en régime parlementaire, le gouvernement reflète la physionomie du Parlement, principalement de l’Assemblée nationale qui tire sa légitimité du peuple.

A. Le gouvernement procède indirectement de la volonté du peuple 

Lorsqu’au 18ème siècle, les révolutionnaires qui s’étaient opposés à l’ancien régime monarchique dépouillèrent les rois de leurs pouvoirs absolus au profit des parlements, la légitimité gouvernante se déplaça également du monarque vers le parlement. La souveraineté royale ou monarchique se mua en souveraineté nationale, la nation étant représentée par le Parlement. Cette logique a été conservée jusqu’à nos jours, raison pour laquelle dans la Constitution congolaise du 18 février 2006, il est affirmé que « La souveraineté nationale appartient au peuple. Tout pouvoir émane du peuple qui l’exerce directement par voie de référendum ou d’élections et indirectement par ses représentants ».

En principe, et suivant cette logique, ne peut gouverner que celui qui tire sa légitimité du peuple. De ce point de vue, les membres du gouvernement sont aussi des représentants du peuple, parce qu’ils procèdent du parlement qui, lui, est directement l’émanation du peuple à travers les élections législatives organisées au suffrage universel direct. Cette légitimité procédant de l’élection au suffrage universel direct est parfois déterminante pour la désignation comme membre du gouvernement. En France, après la victoire de Nicolas Sarkozy à la présidentielle d’avril 2007, Alain Juppé avait été nommé Ministre de l’Ecologie. Mais lorsqu’il échoua aux élections législatives, il démissionna de son poste, parce qu’il jugea qu’il n’avait pas la légitimité nécessaire pour pouvoir occuper ce grand ministère taillé à sa mesure.

Si dans plusieurs régimes parlementaires les membres du gouvernement ne sont pas forcement des élus, en Angleterre, ne devient membre du gouvernement que celui qui a été préalablement élu député. Dans ce pays, le cumul de mandat de député et de membre du gouvernement est d’ailleurs admis et toléré. 

Comme on le voit, le régime parlementaire, ainsi que l’a insinué Georges Burdeau, permet de concilier l’autorité gouvernementale avec l’exigence démocratique de la souveraineté du peuple. Ce lien qui attache le gouvernement au peuple par l’entremise du Parlement aboutit à deux conséquences en régime parlementaire : la confiance qui est exprimée par l’investiture et l’arbitrage du peuple  en cas de divergences persistantes des vues entre le gouvernement et le Parlement.

B. L’investiture, expression de la confiance du Parlement envers le Gouvernement

En régime parlementaire, un gouvernement nouvellement nommé ne peut légitimement  commencer à travailler s’il n’a pas été investi par le Parlement, essentiellement par la chambre des députés. En effet, l’investiture parlementaire du gouvernement est une procédure qui a pour objet, dans la plupart des régimes parlementaires, de subordonner la nomination du chef du gouvernement (et de son gouvernement) à un vote préalable de confiance du Parlement, lequel vote traduit une sorte de contrat de confiance visant à solenniser l’engagement de l’Assemblée de soutenir le chef du gouvernement ainsi investi et le programme politique présenté. C’est pourquoi, l’article 90 alinéas 4 et 5 dispose expressément :

Avant d’entrer en fonction, le Premier ministre présente à l’Assemblée nationale le programme du Gouvernement. Lorsque ce programme est approuvé à la majorité absolue des membres qui composent l’Assemblée nationale, celle-ci investit le Gouvernement.

Puisque le gouvernement est l’émanation de la majorité parlementaire, il est censé appliquer la politique du parti ou de la coalition majoritaire au Parlement. Pour cela, il faut ouvertement prendre l’engagement de soutenir celui qui est appelé à conduire cette politique quotidiennement. En réalité, ce n’est pas la personne du Premier ministre qui obtient le soutien, mais c’est la politique qu’il va mettre en place, dans la mesure où celle-ci concorde avec les vues partagées par l’ensemble des élus constituant la majorité parlementaire. Et lorsque la majorité parlementaire coïncide avec la majorité présidentielle, c’est la politique sur la base de laquelle a été élu le Président de la République qui sera d’application. La raison est simple, dans la mesure où le Président est, dans ce cas de figure, leader de la majorité parlementaire.

La confiance censée régner  dans les rapports entre le Gouvernement et le Parlement n’est pas caractéristique du début de mandat gouvernemental ; elle doit accompagner ces deux institutions durant toute la mandature ou toute la législature. De sorte que si, en cours de mandat cette confiance vient à s’évanouir, le Gouvernement peut se présenter, motu proprio, devant les élus pour la jauger et ce, à travers l’engagement de sa responsabilité sur le vote d’un texte de loi. Il peut également se faire que le jaugeage de cette confiance procède de l’initiative du Parlement qui met en jeu la responsabilité politique du Gouvernement à travers une motion de censure.

Le contrat de confiance entre le Gouvernement et le Parlement est d’autant plus indispensable que l’absence d’investiture signifie que le gouvernement est désavoué et qu’il ne peut, par conséquent,  pas entrer en fonction. C’est le risque que court tout gouvernement nommé sans l’assentiment de la majorité des élus à l’Assemblée nationale. Dans le cas sous examen, il est conseillé que cette fronde ne soit pas minimisée ou traitée à la légère. Il faut tout mettre en œuvre pour rétablir la confiance de ces députés envers ce Gouvernement afin qu’ils l’investissent.

Le formateur du gouvernement qui tente d’ignorer les élus dans le processus de formation de son équipe peut se voir  opposer un veto, c’est-à-dire un vote de défiance qui peut conduire, s’il est répété, à une dissolution de la chambre qui renvoie ainsi et le Gouvernement et le Parlement à l’arbitrage du peuple, à travers de nouvelles élections dites anticipées.

C. L’arbitrage du peuple, conséquence d’une divergence persistante des vues entre le Gouvernement et le Parlement

En principe, en régime parlementaire, la complicité entre le Gouvernement et le Parlement doit être la règle. En tout temps, et sur toute la politique menée, le gouvernement doit se rassurer du soutien de sa majorité parlementaire. La convergence des vues est presque souvent évidente lorsque la majorité au Parlement est détenue par un parti, contrôlé par un leadership unique. Mais si la majorité est composée des partis multiples et indisciplinés formant une coalition, les divergences apparaissent souvent dans la politique à mener. De telles divergences peuvent enfin de compte opposer le Gouvernement et le Parlement. C’est lorsque les divergences persistent entre ces deux institutions supposées travailler de connivence, notamment à travers le vote négatif, par le Parlement, des lois initiées par le Gouvernement que le Chef de l’Etat, au nom de la Nation qu’il représente et du bon fonctionnement des institutions qu’il assure, fera appel à l’arbitrage du peuple en prononçant la dissolution du Parlement(en réalité de la chambre des députés) qui renvoie ainsi tout le monde devant le peuple, arbitre du conflit entre ses représentants aussi bien de l’Assemblée nationale que ceux du Gouvernement.

La dissolution du Parlement qui remet le peuple sur le terrain du jeu est une procédure consistant à mettre fin à un conflit persistant entre la majorité et le gouvernement qu’elle est censée soutenir. La Constitution du 18 février 2006 dispose à cet effet qu’en cas de crise persistante entre le Gouvernement et l’Assemblée nationale, le Président de la République peut, après consultation du Premier ministre et des Présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat, prononcer la dissolution de l’Assemblée nationale.

Il faut noter ici que l’arbitrage du peuple consécutif à la dissolution de l’Assemblée nationale n’est admis que dans le cas où les divergences de vue entre le Parlement et le Gouvernement seraient insolubles sur le plan strictement parlementaire, c’est-à-dire lorsque le Parlement rejette systématiquement les projets de lois initiés par le Gouvernement pour mener sa politique.

La convergence des vues entre le Gouvernement et le Parlement, dans le processus de formation de l’équipe gouvernementale tout comme dans l’exécution de son programme politique durant toute la législature, est un élément clé de l’équilibre institutionnel dans le régime parlementaire. Il reste vrai que la formation du gouvernement en elle-même obéit à des règles et principes dont le formateur doit tenir compte pour sauvegarder cette convergence avec les élus formant la majorité, et de surcroit avec le peuple qui les a mandatés.

II. LES LEÇONS À TIRER DU GOUVERNEMENT SAMA LUKONDE AU REGARD DES CRITÈRES DE FORMATION EXISTANTS

A sa publication le 12 avril 2021, dans une conférence de presse qu’il avait animée, dans la foulée, le Premier ministre Sama Lukonde avait manifesté sa satisfaction pour le travail bien accompli. De nombreux observateurs avaient également apprécié l’équipe gouvernementale présentée, pendant que les députés frondeurs la critiquaient pour sa non représentativité. Face à ces deux positions diamétralement opposées, que peut-on retenir au regard des critères de formation existants ?

A. De la représentativité nationale

Aux termes de l’article 90 alinéa 3, la composition du Gouvernement tient compte de la représentativité nationale. En s’exprimant de cette manière, le constituant n’entendait pas dire que toutes ethnies qui composent la nation congolaise devaient être représentées au Gouvernement. Il n’entendait pas également avancer que toutes les provinces de la RDC devraient coûte que coûte être représentées au Gouvernement.

La représentativité nationale est un idéal, un objectif vers lequel il faut tendre sans nécessairement l’atteindre. Il s’agit d’un effort à fournir par le formateur du Gouvernement pour que ce dernier reflète plus ou moins la configuration nationale, et pas forcement provinciale. Et la configuration nationale est, à notre avis, celle qui correspond aux quatre zones linguistiques, en référence aux langues nationales telles qu’elles sont définies à l’article 1er alinéa 8 de la Constitution. 

De ce qui précède, un gouvernement qui renferme en son sein des ressortissants de ces quatre zones linguistiques peut être réputé suffisamment représentatif de la nation congolaise. Le Gouvernement Sama Lukonde est, de ce point de vue, hautement représentatif de la nation congolaise. En effet, ce Gouvernement composé de 57 membres y compris le Premier ministre,  a largement dépassé les proportions de la représentativité nationale pour atteindre celles de la représentativité provinciale. Toutes les provinces ont au moins un représentant, sauf les provinces du Nord-Ubangi, de Maï-Ndombe et de Kinshasa. Il est vrai que trois députés élus de Kinshasa comme Ville et Capitale de la RDC ont été nommés membres du Gouvernement Lukonde mais dans le cadre de leur appartenance géographique, ils sont comptés comme étant issus de leurs provinces d’origine respectives.

En suivant la représentativité nationale équivalant aux zones linguistiques, les statistiques de répartition des postes gouvernementaux se présentent comme suit :

  • Espace swahiliphone : 22 postes (Grand-Kivu : 12 ; Grand Katanga : 6 ; Province orientale : 4) ;
  • Espace lubaphone : 15 postes (Grand-Kasaï : 15) ;
  • Espace kikongophone : 12 postes (Grand Bandundu : 6 ; Kongo central : 6) ;
  • Espace lingalaphone : 8 postes (Grand Equateur : 8).

Alors que l’actuel Président de la République n’est pas de l’espace géographique swahiliphone comme du temps de Joseph Kabila, cette zone linguistique conserve la tête en termes de nombre des postes au Gouvernement de la République. Ceci s’explique non seulement par le gigantisme de cet espace qui occupent à lui seul 11 provinces sur les 26 que compte la RDC, mais surtout par l’influence de deux grands leaders politiques qui ont contribué à faire pencher la balance, à savoir les leaders de l’UNC et de l’AFDC qui ont produit à eux seuls sept(7) ministres dont cinq ministres sont ressortissants du Sud-Kivu, un ministre du Maniema, une autre ministre de Lwalaba. 

On peut également lire dans la nomination de certaines personnalités du Kivu l’influence de la première dame. En effet, un ministre nommé dans le quota du Président et un ministre désigné comme personnalité indépendante auraient des accointances avec la première dame. Etant du Sud-Kivu, ils ont certes contribué à allonger la liste des swahiliphones dans le Gouvernement. Les autres composantes y ont également contribué, mais derrière les deux principaux leaders du Sud-Kivu précités.

B. De la représentativité des forces politiques composant la majorité parlementaire 

En principe, la logique parlementaire commande que le gouvernement soit formé par le parti majoritaire ou, à défaut, par la coalition majoritaire à l’Assemblée nationale. Aucun parti n’ayant, à lui seul, la majorité absolue des élus dans la chambre basse, la composition de l’équipe gouvernementale devait absolument suivre l’équilibre des forces politiques de la coalition. C’est pourquoi, au départ, le respect de ce critère avait incité le Premier ministre à fixer le quota de 8 députés pour un poste ministériel. Mais ce critère a été vite abandonné au profit du critère de la solidarité.

En tenant compte et du poids politique et de la solidarité, l’équipe gouvernementale de Sama Lukonde a été finalement composée suivant la configuration ci-après : 

  • Les ex FCC venus à l’Union Sacrée de la Nation : 18 postes (14 ministres et 4 vice-ministres) ;
  • L’UDPS et Alliés : 14 postes (12 ministres et 2 vice-ministres) ;
  • Ensemble pour la République (G7, AMK, MS, AR) : 7 postes (5 ministres et 2 vice-ministres) ;
  • L’UNC : 5 postes (4 ministres et 1 vice-ministre) ;
  • L’AFDC et Alliés : 4 postes (3 ministres et 1 vice-ministre) ;
  • Le MLC : 3 postes (2 ministres et 1 vice-ministre) ;
  • Les Personnalités indépendantes : 3 postes (3 ministres) ;
  • La Société civile : 2 postes (2 ministres).

Comme on le voit, c’est la mosaïque FCC qui caracole en tête avec 18 postes quoique la plupart de frondeurs soient de cette composante. Peut-être auraient-ils voulu avoir plus en prétextant l’importance de leur nombre au sein de l’Union Sacrée de la Nation. Mais face au critère de la solidarité qui a finalement été déterminant dans la composition du gouvernement, ils devraient accepter, de bonne foi, ce qui leur revient. Toutes les composantes de l’Union Sacrée ont dû revoir leurs ambitions et prétentions quant au nombre de postes gouvernementaux à gagner.

C. De la représentativité des femmes et des jeunes

La représentativité des femmes dans les instances de décision est devenue une exigence démocratique dans les Etats modernes. La Constitution congolaise préconise d’ailleurs la parité homme-femme dans les institutions nationales, provinciales et locales, alors que la recommandation de l’Organisation des Nations Unies incite les Etats à réserver un quota de 30% des postes de responsabilités dans les instances officielles de décision. 

Ne pouvant aller jusqu’à la parité, entendue comme égalité mathématique, le Gouvernement Sama Lukonde a aligné 15 femmes, dont 11 ministres et 4 vice-ministres sur un total de 56 membres, soit près de 28% des femmes. Avec ce pourcentage, ce Gouvernement a battu le record en matière de représentativité de la femme. L’on comprend pourquoi le Président de la République avait rejeté fin mars 2021 une mouture qui n’avait pas satisfait à ce critère de la représentativité féminine.

Les jeunes ont également eu la part belle dans le Gouvernement Sama Lukonde qui a atteint le seuil de 28% des membres dont la plupart varient entre 40 et 50 ans. Si les groupes dits vulnérables ont été représentés dans ce Gouvernement, il reste que dans le quota des minorités, on aurait dû également penser aussi aux pygmées ou peuples autochtones qui exigent sans cesse qu’ils soient représentés dans le Gouvernement de la RDC.

CONCLUSION 

Dix jours après la publication du Gouvernement Sama Lukonde, les congolais attendent avec impatience son investiture qui semble prendre du retard, à cause de la fronde de près de deux cents députés nationaux qui poseraient des conditions avant d’accorder leur confiance à cette équipe. En effet, la règle cardinale du régime de type parlementaire, comme le nôtre, est que le gouvernement ou le cabinet ne peut gouverner, définir librement la politique, l’appliquer et demeurer au pouvoir, que s’il bénéficie de la confiance du Parlement, plus précisément de la majorité issue directement du suffrage universel.

Pour le moment, l’investiture du Gouvernement Sama Lukonde est conditionnée par la confiance des députés qu’il faut rapidement rétablir. Si les députés ont de légitimes revendications qu’ils ont soumises au Président de la République en rapport avec leur traitement et leurs conditions sociales et de travail, le souhait est que le Chef de l’Etat examine froidement leur mémorandum  pour y réserver une suite susceptible d’apaiser ces élus nationaux dont dépend entièrement l’entrée en fonction du Gouvernement. Le dialogue est, à ce point, nécessaire pour  aboutir à ce climat de confiance avant la plénière d’investiture du Gouvernement. 

D’un côté, les députés frondeurs devraient privilégier l’intérêt général pour ne pas faire de l’investiture un objet de chantage. De l’autre, le Chef de l’Etat à qui ils ont adressé un mémorandum contenant leurs revendications ne devrait pas le  rejeter en bloc, en  y répondant par  la menace de dissolution de la chambre, étant entendu que le recours à des solutions extrêmes  n’avantage, pour l’heure, personne. 

RECOMMANDATIONS

Au peuple congolais,

  • Demeurer vigilant et prêt à défendre la Constitution et les acquis de la démocratie contre les caprices des acteurs politiques ;
  • Soutenir l’entrée en fonction du Gouvernement Sama Lukonde pour qu’il travaille et réponde aux multiples préoccupations sociales, économiques et sécuritaires.

Au Président de la République,

  • Assurer continuellement, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics et des institutions, en l’occurrence l’Assemblée nationale et le Gouvernement (article 69 alinéa 3) ;
  • Toujours préserver, par son attitude, sa parole et par son action, l’unité nationale (article 69 alinéa 1).

Au Premier ministre,

  • Engager un dialogue permanent avec les députés pour rétablir leur confiance envers le Gouvernement à investir.

Aux députés nationaux,

  • Privilégier l’intérêt général en acceptant d’investir le Gouvernement censé travailler pour le bien-être de la population, plus particulièrement pour les personnes exposées aux violences injustifiées ;
  • Prendre de la hauteur et se comporter en véritables et dignes représentants du peuple congolais ;
  • Eviter de déshonorer la fonction parlementaire par des exigences démesurées et extravagantes ;

 

REFERENCES

Burdeau, G., Traité de science politique, tome V : Les régimes politiques, 2ème éd., Paris, LGDJ, 1970.

Constitution de la RDC telle que modifiée par la loi n°11/002 du 20 janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution du 18 février 2006, Journal officiel de la République Démocratique du Congo, 52ème année, numéro spécial, 5 février 2011.

Isako, S., « RDC : 200 députés de l’Union sacrée écrivent à Félix Tshisekedi et menacent de bloquer l’investiture du gouvernement », https://cas-info.ca/2021/04/rdc-200-deputes-de-lunion-sacree-ecrivent-a-felix-tshisekedi-et-menacent-de-bloquer-linvestiture-du-gouvernement/ , consulté le 17 avril 2021.

Le Divellec, A. et de Villiers, M., Dictionnaire du droit constitutionnel, 11ème éd., Paris, Sirey, 2017.

Ntumba Luaba Lumu, Droit constitutionnel général, Kinshasa, EUA, 2007.