Sud-Kivu : MSF alerte sur les conditions de vie “déplorables” des réfugiés de Katasomwa

Photo d'illustration/MSF Belgique

Plusieurs milliers de personnes se sont réfugiées entre les deux provinces du Sud et du Nord Kivu fuyant l’insécurité occasionnée par les conflits qui ravagent la partie Est de la RDC depuis 2 ans. Nombreux sont ceux qui ont trouvé refuge à Katasomwa (Sud-Kivu) mais qui, malheureusement, vivent dans des conditions très déplorables.

C’est  l’alerte de Médecins sans frontières (MSF) dans un communiqué, ce vendredi 29 janvier.

« Nous avons entendu qu’à Katasomwa il y avait la paix donc nous avons décidé d’y aller. Plusieurs personnes ont été tuées en cours de route. Depuis notre arrivée ici, en juillet dernier, nous mangeons très difficilement. Nous sommes menacés par la pluie, les abris dans lesquels nous vivons peuvent brûler à tout moment. Notre vie est misérable », fait savoir Justin, originaire de Masisi, un des réfugiés, relayé dans un communiqué de MSF ce vendredi.

Ce sont aujourd’hui près de dix mille personnes qui ont trouvé refuge dans ce territoire (Katasomwa), éloigné de toutes infrastructures médicales, note MSF.

« La longue route qu’ils ont dû parcourir à pied, pendant plusieurs semaines, n’a pas été sans embûches. Nombreux sont ceux qui déclarent avoir été victimes de vols, de violences, y compris sexuelles. A leur arrivée, elles ont dû se rendre à l’évidence : la région est très pauvre et offre peu de ressources et de services de base ; l’accès à la santé, à l’éducation et à la protection n’est pas assuré », dit MSF dans son communiqué.

Ces réfugiés à la frontière des provinces du Sud et du Nord Kivu cohabitent avec des communautés tout aussi vulnérables et dans le besoin notamment des pygmées. L'afflux de personnes déplacées met le système de santé à rude épreuve. Le poste de santé de Katasomwa est tenu à bout de bras par un personnel motivé, mais dépourvu de moyens.

« Les femmes déplacées évitent le centre de santé car elles n’ont pas d’argent pour payer les soins, Du coup, elles accouchaient dans le camp. Certaines y trouvaient la mort », raconte Esther Isabayo Benimana, infirmière titulaire interrogée par MSF.

Au référent médical du poste de santé de Katasomwa David Namegabe de renchérir :

« La priorité a été de répondre aux besoins médicaux : on a ciblé les populations au sein desquelles le taux de mortalité était le plus élevé. Nous avons constaté que c’était notamment les enfants de 0 à 15 ans et les femmes enceintes, avec un fort taux de mortalité maternelle dans la communauté. Nous avons aussi ciblé toutes les urgences médico-chirurgicales, qui sont l’autre cause principale de décès au niveau de la communauté et de la structure (de santé), ».

Selon MSF, ces personnes n’ont bénéficié d’aucune vaccination depuis 2017, précipitant l’organisation d’une campagne de vaccination multi-antigène, en collaboration avec les autorités sanitaires. Dans les trois aires de santé concernées, ce sont près de 7 000 enfants qui pourront être protégés de maladies évitables, telles que la rougeole.

MSF ajoute que les communautés pygmées font face à la discrimination dans ces airs de santé depuis qu’ils y sont arrivés, comme le témoigne la représentante de la communauté nomade.

« N’importe quel enfant peut voler et on accuse toute la communauté des pygmées, les gens disent que ce sont les pygmées qui volent. Même si ce n’est pas quelqu’un de notre communauté. Pourquoi ? Parce que nous n’avons pas d’activités. Nos filles se font violer. Elles partent le matin pour demander une compensation, mais reviennent sans rien. Elles sont prises de force et parfois on connait les gens qui ont fait ça mais on ne peut pas les traduire en justice parce qu’on n’a pas d’argent pour payer le procès. Nous aussi, nous mettons neuf mois à naître, nous ne comprenons pas pourquoi nous sommes toujours oubliés. Cela nous fait mal au cœur », dénonce Roza Nyirakongomani, représentante de la communauté nomade auprès de MSF.

Afin de répondre aux besoins des communautés les plus isolées, MSF a identifié un membre par village comme agent de santé capable de traiter rapidement les cas les plus bénins et de référer les cas plus graves au centre hospitalier le plus proche, à Chigoma.

Thérèse Ntumba