Littérature : Kisantu accueille la troisième édition du Salon du livre du Kongo Central sous le signe de la paix

Bibliothèque. PH. ACTUALITE.CD
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Promouvoir la littérature dans la province du Kongo Central, faire émerger de nouveaux talents et les accompagner ; telle est l’ambition première du Salon du livre du Kongo Central (SALIK). Après avoir lancé sa première édition en 2021 à Mbanza-Ngungu, puis fait escale à Matadi en 2023 pour sa deuxième édition, le Salon du livre du Kongo Central (SALIK) posera cette fois-ci ses valises à Kisantu, du 25 au 27 septembre 2025, pour l’édition numéro trois placée sous le thème : "Écrire pour la paix".

Dans une République Démocratique du Congo marquée par des crises persistantes, tant sur le plan socio-politique que sécuritaire, en particulier dans sa partie est en proie à des conflits armés depuis près de trois décennies, cette troisième édition du SALIK a pour ambition de faire de la littérature une arme, un outil de résistance contre la guerre et un vecteur d’espoir pour les populations affectées.

« Nous avons choisi ce thème pour faire écho à la situation qui sévit actuellement dans notre pays, avec notamment l’agression armée que subit la population de l’est, et aussi pour voir comment la littérature peut apporter une solution, ou servir de remède contre les problèmes que connaissent le pays. Nous pensons que la littérature peut être une arme fatale pour combattre la guerre », a déclaré Allegria Mpengani, initiateur et coordinateur du salon.

En prélude à cette troisième édition du SALIK, plusieurs ateliers d’écriture ont été organisés avec des élèves dans diverses écoles du Kongo Central, ainsi qu’à Kikwit et à Kinshasa. 

« L’idée avec ces ateliers était de permettre aux élèves de s’exprimer et de partager leur regard sur la situation que traverse notre pays, la RDC. Parce qu’on pense qu’ils ont, eux aussi, une voix qui mérite d’être entendue », explique Allegria.

Un espace d’expression pour la jeunesse

Le SALIK est à sa troisième édition, mais poursuit toujours le même objectif que lors des éditions précédentes : offrir un espace propice à l’émergence de jeunes talents littéraires, tout en servant de plateforme de sensibilisation et de promotion de la littérature. L’idée est d’aller au plus proche des lecteurs, surtout les plus jeunes de cette province de 55 000 km2 pour inséminer la graine littéraire dans leur quotidien et plus largement, transmettre le plaisir de la culture et de la lecture. 

« La particularité de cette édition est qu’on va vraiment mettre un accent sur les élèves, c’est un salon axé essentiellement sur la jeunesse. Nous avons effectué des partenariats avec plus ou moins 20 écoles de la place », indique Allegria Mpengani ;

Et d’ajouter : 

« J’ai grandi dans une mission protestante et j’ai eu la chance d’être entré en contact très tôt avec la littérature, avec les livres. Cette relation avec les livres m’a ouvert à d’autres horizons, m’a donné une nouvelle façon de comprendre et de percevoir le monde. D’où pour moi la motivation et l’envie de vouloir aider ces jeunes à découvrir ce que la littérature peut leur apporter tout au long de leur parcours ou de leur vie ».

Pour cette troisième édition, le SALIK s’est fixé l’objectif de toucher, de manière directe ou indirecte, jusqu’à 4000 enfants. Ces chiffres, une fois atteints, représenteront une très grande réussite selon les organisateurs.

Le programme de ce SALIK s’annonce riche et varié : lectures publiques, conférences et débats, rencontres entre auteurs et élèves, formations destinées aux enseignants de français, projections de films et bien plus.

Plusieurs auteurs venus de divers horizons prendront part à cet événement littéraire majeur de l’ex-province du Bas-Congo. 

Jessica Modua, représentante des éditions Mabiki à Kinshasa, animera des ateliers autour de la littérature jeunesse, avec des œuvres telles que Mutos de Bienvenue Sene Mongaba, Les fables de Christian Gombo, et À la rencontre de l’Okapi. Cire le Griot proposera des sessions de contes, tandis que Élodie Ngalaka se consacrera à des échanges spécifiques avec les jeunes filles. Alice Sakina mènera des animations théâtrales et contribuera à mettre en valeur les œuvres d’auteurs congolais.

À travers cette programmation, les organisateurs souhaitent transmettre aux jeunes le goût de la lecture, en leur montrant qu’elle peut aussi rimer avec plaisir. L’objectif est de faire de la lecture un loisir accessible, vivant et enrichissant. 

Kisantu, ville « littéraire »

Nouvelle terre d’accueil du Salon du livre du Kongo central, Kisantu, également connue sous le nom d’Inkisi, est une localité de la République démocratique du Congo située à environ 120 kilomètres au sud de Kinshasa. La ville compte quelques milliers d'habitants, et regroupe trois communes notamment Inkisi, Kitantu et Nkandu. 

Dans cette ville, l’accès aux livres demeure un véritable défi. Le manque d’infrastructures culturelles, notamment de bibliothèques, prive la majorité de la population, en particulier les jeunes, d’un contact régulier avec les livres. C’est justement pour pallier ce déficit que les organisateurs ont choisi cette localité, avec un but clair de désenclaver cette région sur le plan littéraire.

« La ville de Kisantu souffre d’un manque criant des établissements socio-culturels », décrie Allegria Mpengani, qui indique que dans cette agglomération, « il y a très peu d’accès aux livres et presque pas de bibliothèque ou centres culturels. Le livre est une denrée extrêmement rare à Kisantu, comme aussi dans d’autres villes du pays ».

Tout au long de ce salon, un marché du livre sera établi avec les libraires qui viendront de la capitale Kinshasa. Certains livres seront vendus aux participants, mais les organisateurs prévoient également un lot important de livres à distribuer gratuitement aux établissements scolaires et certains centres de formation de la place.

« On va distribuer des romans, des essais, des contes pour enfants, des ouvrages scolaires et scientifiques », promet Allegria ; qui dit voir la littérature comme « un moteur très puissant pour l’épanouissement, non seulement de jeunes, mais pour la communauté de manière générale. Parce qu’un peuple qui ne lit pas ou qui ne s’éduque pas, est un peuple qui court à sa perte ».

En organisant ce salon du livre en dehors de Kinshasa, les organisateurs veulent également mettre en lumière le profond déséquilibre dans l’accès à l’offre culturelle entre la capitale et les autres provinces. Ils assurent que le SALIK donnera des réponses à toutes ces problématiques.

Le Salon du livre du Kongo Central (SALIK) est une initiative portée principalement par de jeunes écrivains et passionnés de littérature. Cet événement est organisé par l’asbl J’accuse ma génération (JMG), une association engagée et militante œuvrant en République Démocratique du Congo. À travers l’art et la culture, JMG vise à informer, sensibiliser et susciter l’engagement des jeunes autour des grands enjeux de société.

La structure s’articule autour de deux pôles complémentaires, qui lui permettent de mener à bien sa mission et d’ancrer ses actions dans le concret.

Jusqu’à cette troisième édition, le SALIK a été organisé grâce aux fonds propres de ses membres. Toutefois, l’événement bénéficie aussi du soutien de partenaires tels que l’Institut français de Paris, à travers son programme "Ressources créatives", ainsi que d’autres partenaires.

James Mutuba