RDC : L’archevêque de Kananga interpelle Félix Tshisekedi sur la nécessité de penser à l’électricité en complément de la construction de la route de Kalamba Mbuji

Félix Tshisekedi devant la population de Kananga
Félix Tshisekedi devant la population de Kananga

Au deuxième jour de son itinérance à Kananga, chef-lieu de la province du Kasaï Central, le Chef de l'État Félix-Antoine Tshisekedi, accompagné de sa délégation, a participé ce mercredi 25 décembre 2024 à la messe de la nativité, célébrée par l’archevêque métropolitain de Kananga, Félicien Tambwe, en la cathédrale Saint-Clément. Outre l'homélie du jour, le prélat a profité de cette circonstance pour présenter à Félix Tshisekedi les desiderata ou priorités de l'espace Grand Kasaï.

Désenclavement routier et impératif énergétique

« Le Grand Kasaï, qui ne se limite pas à ses grandes villes, reste un espace gravement isolé et tristement enclavé. Outre les routes nationales, il y a un besoin impérieux de construire des routes interprovinciales et de dessertes agricoles pour faciliter la circulation des personnes, des biens et des services. Sans cela, le développement tardera à venir. Nous vous félicitons de prendre le temps de visiter la route de Kalamba Mbuji, qui nous ouvrira sur l'Angola », a déclaré l’archevêque Félicien Tambwe.

Cependant, concernant la finalisation de la route de Kalamba Mbuji, le prélat a attiré l'attention de Félix Tshisekedi sur la nécessité d’aller au-delà de ce projet pour éviter que la RDC ne subisse le diktat économique de l’Angola.

« Nous émettons quelques réserves sur ce projet. Certes, il faut construire cette route pour nous désenclaver, mais le risque est que, si rien d'autre n'est fait, nous ne devenions qu’un marché pour l'Angola, qui viendra déverser son ciment, ses bières et d'autres produits transformés. Que pourrons-nous offrir en retour si nous ne transformons rien et ne conservons rien faute d'énergie électrique ? Le développement doit être pensé selon notre point de vue », a-t-il interpellé.

Lien entre industrialisation et énergie

Félicien Tambwe a souligné que, sans électricité, l’espace Grand Kasaï restera éloigné de toute forme d’industrialisation.

« Nous ne sommes pas opposés à la construction de cette route. Nous voulons dire qu'en plus des routes, le peuple a besoin d'énergie électrique pour transformer et conserver ce qu'il produit à l'état naturel. Ce n'est qu'avec les routes et l'électricité que notre peuple pourra s'inscrire dans une logique d'échanges avec les autres et ne sera pas simplement un marché de ce qui est produit ailleurs. Sans énergie électrique, le Kasaï sera loin de toute industrialisation, et ses fils et filles s'en iront ailleurs, où ils sont souvent stigmatisés, maltraités, pourchassés et même tués comme des pestiférés », a-t-il alerté.

Des ravins qui nécessitent l'intervention du gouvernement central

Par ailleurs, Félicien Tambwe a sollicité l'implication du gouvernement central pour se pencher sur la question des ravins qui rongent cette partie du pays.

« La multiplicité et l'ampleur des ravins dans toutes les provinces du Grand Kasaï dépassent les capacités des habitants et demandent une intervention résolue des pouvoirs publics. C’est la densification croissante de la population, la multiplication des habitations non planifiées et sans drainage des eaux de pluie, ainsi que les lotissements désordonnés qui génèrent ces ravins. Ces derniers menacent et engloutissent le peu d'infrastructures que nous avons déjà. Voilà les doléances de notre population que j'ai l'honneur de vous présenter en ce jour de Noël », a-t-il plaidé.

Pour lui, l'absence d'industries dans cette région est directement liée au manque d'énergie électrique.

« Chef de l'État, vos frères et sœurs vous demandent de leur donner de l'électricité, de sorte que, la prochaine fois que vous viendrez avec vos invités, nous puissions leur poser la question : "Chez vous, est-ce comme chez nous ?" Aujourd'hui, tout l'espace Grand Kasaï n'a ni cimenterie, alors que d'autres en ont deux, ni aucune industrie, même pas une brasserie. Ce n'est pas parce que les Kassaiens ne sont pas forts, ni parce qu’ils ne sont pas intelligents, ni parce que la terre du Kasaï n'est pas fertile. C'est parce que nous manquons d'électricité », a-t-il conclu.

Les attentes de la population

Après l'étape de Kananga, Félix Tshisekedi doit se rendre à Mbuji-Mayi, chef-lieu de la province du Kasaï Oriental, puis à Tshikapa, dans le Kasaï. Bien avant cette tournée, il avait visité l’espace Grand Katanga, ainsi que les provinces du Haut et Bas-Uélé.

Lors d'un briefing à Kalemie, le ministre de l'Intérieur, Jacquemain Shabani Lukoo, ancien directeur de campagne de Félix Tshisekedi, a expliqué que ces itinérances visent à remercier la population pour sa réélection et à toucher du doigt les réalités du Congo profond.

La population de l'espace Grand Kasaï attend des autorités une réponse concrète sur la reconstruction des infrastructures routières pour désenclaver la région, mais aussi sur le développement énergétique pour relancer les activités socio-économiques. Depuis l'accession de Félix Tshisekedi à la magistrature suprême, plusieurs grands projets structurants peinent à se concrétiser dans cette partie du pays.

Clément MUAMBA