Les combattants d’Allied democratic forces (ADF) ont connu de « progrès modestes » dans la fabrication des explosifs à Beni, révèle un rapport du Groupe d’experts de l’ONU sur le Congo transmis au Conseil de sécurité le 10 juin dernier. Cette « performance » est consécutive à la participation des combattants étrangers venus notamment de la Tanzanie, du Burundi et du Kenya.
Cet apport dans les rangs de l’ADF a favorisé une augmentation du taux d’usage des explosifs dans la région de Beni, note le rapport d’experts de l’ONU qui couvre la période novembre 2020-mars 2021.
« Des progrès modestes sur le plan des techniques de fabrication d’engins explosifs improvisés ont été attribués à la participation de combattants des ADF de l’extérieur, en particulier du Burundi, du Kenya et de la République -Unie de Tanzanie, par des personnes ayant été enlevées et des ex-combattants. Abwakasi et Seka Kahumi ont été cités en tant que fabricants de bombes », dit le rapport.
Et d’ajouter : « Les civils étaient soit des victimes collatérales d’engins explosifs improvisés qu’ils ont eux-mêmes actionnés ou étaient visés directement par les ADF, notamment lorsque les engins explosifs improvisés étaient posés dans des champs agricoles dans les zones d’opérations des ADF. Dans ces cas, l’objectif était d’empêcher les civils d’approcher, de contraindre les agriculteurs et les populations locales à quitter la zone contaminée ou d’empêcher les récoltes, selon des ex-combattants et des personnes ayant été enlevées ».
Les composants sont importés de l’Ouganda
Le Groupe d’experts de l’ONU rapporte que les combattants fabriquent ces explosifs dans des camps principalement à Madina et à Mamove. Les composants, dont des détonateurs, sont importés de l’Ouganda.
« Des personnes ayant été enlevées et des ex-combattants ont déclaré que les engins explosifs improvisés avaient été montés ou assemblés dans les camps des ADF, principalement à Madina et Mamove. La majorité des composants (piles, explosifs et détonateurs) provenaient de l’Ouganda. Des cartouches vides étaient recueillies sur les champs de bataille, réutilisées et placées dans des casseroles pour amplifier l’explosion des engins improvisés. Des mortiers et des projectiles de grenades ayant servi dans des systèmes de déclenchement ont été volés aux FARDC. Même si quelques engins explosifs improvisés télécommandés ont été observés, la plupart de ceux qui ont été documentés récemment avaient été activés par la victime », dit le rapport.
Le rapport cite un ex-combattant en détention qui a indiqué que « les ADF prévoyaient d’acquérir la technologie de fabrication de bombes-suicides ».
Au moins 12 incidents liés aux explosifs ont été confirmés pendant la période sous examen. 36 incidents impliquant au total 64 engins explosifs improvisés suspectés ou confirmés, ont été confirmés par le Groupe d’experts. Les zones autour de Kainama et d’Eringeti le long de la frontière du Nord-Kivu et de l’Ituri ont été en particulier contaminées par les engins explosifs improvisés ces derniers mois, ce qui correspondait à un renforcement de la présence et des attaques des ADF dans le sud du territoire d’Irumu et dans le nord du territoire de Beni, soutient le rapport.
Ces explosifs ont fait plusieurs victimes au sein de l'armée. « De novembre 2020 à mars 2021, au moins 45 membres des FARDC ont été tués ou blessés dans l’explosion d’engins improvisés. Des rescapés, des personnes ayant été enlevées, des ex-combattants des ADF, des membres du personnel médical et des sources des FARDC ont expliqué que les engins explosifs improvisés avaient été posés le long de sentiers lors d’attaques afin d’empêcher les FARDC de poursuivre les assaillants et de couvrir le retrait des ADF».
L’usage des explosifs vise également à sécuriser les routes de liaison se trouvant géographiquement proches de la frontière ougandaise, selon le Groupe d’experts.
Patrick Maki