RDC : l’Actualité de la semaine vue par Rose Mbuyi

Photo/ Droits tiers
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De la réouverture des bars et discothèques à la mobilisation contre la nouvelle drogue « Bombé » à Kinshasa, en passant par la pollution des rivières au Kasaï ainsi que la question orale avec débat au sujet de l’exploitation illégale de l’or au Sud-Kivu,  le desk Femme d'Actualité.cd vous propose un retour sur les faits marquants de la semaine qui s'achève avec  Rose Mbuyi militante des droits humains, présidente de la société civile au Kasaï oriental. 

Bonjour Madame Rose Mbuyi et merci de nous accorder de votre temps. Les bars et les discothèques vont pouvoir rouvrir leurs portes après une fermeture datant du mois de décembre suite à la pandémie du covid-19. Comment avez-vous accueilli cette décision du gouvernement ? 

Rose Mbuyi :  je salue cette décision du gouvernement congolais qui est une conséquence de l'évolution positive des cas de contamination notamment à Kinshasa. Nous souhaitons que cette mesure soit accompagnée par le respect des gestes barrières. La population devrait prendre conscience de l’existence de la maladie et observer les mesures barrières pour limiter la propagation de cette maladie qui sévit le monde. 

Au-delà du respect des gestes barrières, que faudrait-il faire pour limiter la propagation de la maladie ?

Rose Mbuyi : l’Etat congolais devrait également songer à organiser des campagnes de sensibilisation d’envergure au sein des communautés pour encourager la population à se faire dépister. Cela pourra éviter les nouvelles vagues des cas de contamination à travers le pays et permettre une prise en charge rapide et efficace.  

En économie, le député national Lutundulu Okito Didier a déposé au bureau de l’Assemblée nationale une question orale avec débat adressée à la ministre des mines, Antoinette N’Samba Kalambayi. Sa préoccupation concerne l’exploitation illégale de l’or par des sociétés étrangères majoritairement tenues par des chinois dans le territoire de Mwenga (Sud-Kivu). Cette démarche intervient alors que le gouverneur du Sud-Kivu avait également accordé un moratoire pour l’enregistrement de toutes les entreprises minières dans cette région. Quelles sont vos attentes par rapport aux réponses de la ministre ? 

Rose Mbuyi : il s’agit d’une importante question adressée à la ministre des mines, Mme Antoinette N’samba Kalambayi par rapport à l’exploitation minière illégale dans le Sud-Kivu. Ce type d’exploitation ne répond pas aux normes des sociétés minières. Que la réglementation (le code minier) soit respectée scrupuleusement et que les autorités au niveau provincial et national veillent à l’exploitation clandestine des minerais. C’est l’une des raisons qui ne permettent pas à l’Etat de mobiliser les ressources au niveau local. Que les entreprises qui voudront s’installer dans le Sud-Kivu et y extraire de l’or soient sensibilisées au respect des lois et règlements en vigueur. 

Concernant les produits surgelés, les opérateurs économiques étaient parvenus à la signature d’un procès-verbal avec le gouvernement, impliquant une baisse des prix. Sur terrain, le PV n’est pas encore d’application. Comment le gouvernement congolais devrait-il réagir face à cette situation ? 

Rose Mbuyi : c’est une bonne initiative de la part de l’Etat congolais d’avoir songé à réduire les prix des produits de première nécessité. Notre souci est de voir ce Procès-verbal être mis en application. En RDC, la mise en œuvre de plusieurs lois et recommandations prend énormément de temps. Que l’Etat congolais veille à la prise en compte dans les meilleurs délais de cette nouvelle mesure.   

En sécurité, le chef de l’armée a exprimé son ras-le-bol après des incursions de la marine angolaise dans les eaux territoriales congolaises. Célestin Mbala a notamment suggéré au ministre de la défense de rappeler son homologue d'Angola à revenir au bon sens tout en respectant les frontières congolaises et aussi que le ministère des affaires étrangères fasse la saisine du mécanisme de suivi de la SADC pour rappeler à l'Angola le respect des clauses de la communauté. Comment l’Etat congolais devrait-il réagir sachant que depuis quelques jours, plusieurs rivières congolaises sont polluées par des déchets toxiques déversés par les usines en Angola ? 

Rose Mbuyi : La question de la pollution des rivières est très délicate. Nous pensons que l’Etat congolais et l’Etat angolais doivent se mettre autour d’une table pour trouver des solutions adéquates afin de permettre à ce que les déchets toxiques ne soient plus déversés dans les rivières. C’est dans ces rivières que les populations se ravitaillent en eau. Les populations sont mises en péril. Les déchets peuvent être canalisés vers les océans. Si les entreprises minières angolaises s’entêtent, cette démarche va se traduire en violations des droits humains notamment le droit à la vie des populations riveraines.   

Dans le cadre de l’Etat de siège, des militaires des forces d'opérations spéciales américaines sont arrivés à l'Est  en appui à la lutte contre le terrorisme et aux gardiens des parcs naturels. Des Sud-Africains et  des Népalais sont également attendus pour appuyer la mission onusienne. Que pensez-vous de cet appui des forces étrangères en RDC ? 

Rose Mbuyi : nous sommes d’accord avec l'appui des Etats-Unis à nos forces armées pour lutter contre le  terrorisme à l’Est de la RDC. Si certains pays frontaliers s’opposent à cette lutte, nous pouvons en quelque sorte déduire leur implication dans les conflits qui persistent depuis des décennies dans cette partie de notre pays. Nous souhaitons que cette conjonction des forces soit réelle, que la population de l’Est puisse recouvrer la paix, que justice soit également rendue à nos morts et victimes. 

En ce qui concerne la CENI, les confessions religieuses ne sont toujours pas parvenues à un accord autour de la désignation du président. Les délais accordés par l’Assemblée Nationale ont été épuisés. Six confessions ont déposé un PV et deux autres ont sollicité une audience auprès du Chef de l’Etat. Quels sont les différents scénarios à envisager si l'on ne parvient pas à un compromis selon vous?

Rose Mbuyi : j’estime que la loi de la majorité devrait primer sur celle de la minorité. 6/8 confessions religieuses se sont mises d’accord sur un candidat, je considère que le quorum est atteint. La question doit être traitée à présent au niveau de l’Assemblée nationale,  c'est elle qui entérine la nomination du président de la Commission Électorale Nationale Indépendante.   

Les démarches pour la mise en place du Fonds National de réparation en vue d’assurer une prise en charge holistique des survivant.es des violences sexuelles liées au conflit se sont accélérées depuis le mois d’avril. Au cours de cette semaine, la première dame a reçu le ministre des droits humains et la directrice exécutive du Fonds mondial pour les survivants pour échanger autour de la même question. Selon vous, en quoi la mise en place de ce Fonds est-elle si importante ? 

Rose Mbuyi : Nous avons mené une lutte intense pour la mise en place de ce Fonds, en tant que militante des droits des femmes. Si le Fonds National de réparation est effectif, toutes les victimes des violences sexuelles en temps de conflit ainsi que des affres de la guerre pourront obtenir justice. Nous saluons l’engagement de la première dame dans cette lutte. L’Etat congolais aura écouté le plaidoyer de la société civile en faveur de sa mise en œuvre. C’est une chose capitale, un pas vers la justice transitionnelle. 

Il y a actuellement à Kinshasa, une nouvelle drogue "bombé" qui fait des ravages sur les jeunes. Comment  la société peut-elle se mobiliser concrètement selon vous, pour mettre fin à ce phénomène ? 

Rose Mbuyi : ce phénomène mérite d’être éradiqué en RDC. La jeunesse est l’avenir de ce pays. Toutes les communautés devraient se mobiliser pour l’éradication de ce phénomène qui prend de l’ampleur. Les autorités devraient couper les sources de ravitaillement de cette drogue. Qu’il y ait une mobilisation à tous les niveaux contre cette forme de bombe.   

Un dernier mot ? 

Rose Mbuyi : en dernier lieu, nous souhaitons que toutes les recommandations en faveur du bien-être de notre population soient prises en compte et mises en œuvre par le gouvernement et tous les autres acteurs. Merci.

Propos recueillis par Prisca Lokale