RDC–AFC/M23 : cinq scénarios possibles pour le processus de Doha, deux jugés les plus plausibles (rapport)

Déclaration de principe entre la RDC et le M23 à Doha
Déclaration de principe entre la RDC et le M23 à Doha

Un rapport du Center on International Cooperation (CIC) de l’Université de New York, réalisé avec le Congo Research Group (CRG), détaille cinq issues possibles au processus de Doha entre le gouvernement de la RDC et le mouvement AFC/M23, du scénario le plus défavorable au mouvement rebelle au plus avantageux, et estime que les options 2 et 3 sont celles qui « auraient la plus grande chance » d’être acceptées par les deux parties, sous forte pression extérieure et avec des compromis.

Le document, intitulé Can a Peace Deal Be Made in Doha? (octobre 2025), rappelle que les pourparlers pilotés par le Qatar ont pour l’instant produit des pas procéduraux (engagement à un cessez-le-feu permanent, mécanisme de vérification du cessez-le-feu, mécanisme d’échange de prisonniers), sans aborder les points substantiels (partage de pouvoir, DDR, amnistie, retour des réfugiés). Il souligne l’interdépendance avec l’accord de paix RDC–Rwanda signé le 27 juin 2025 à Washington, dont la mise en œuvre dépend aussi des avancées à Doha.

Option 1: Retrait du Rwanda, effondrement du M23, pas de processus de paix.
Amnistie limitée pour l’insurrection, intégration minimale et poursuite des dispositifs UNHCR/DDR existants. Un comité de suivi (Qatar, États-Unis, UA) est prévu. Scénario proche de 2013 ; favorable à Kinshasa mais n’adresse pas les causes de fond et serait rejeté par le M23.

Option 2:Retrait du Rwanda, M23 affaibli, processus crédible.
Autorisation de devenir parti politique et création d’une autorité spéciale de stabilisation (Kivus/Ituri) pour DDR, réconciliation (type TRC), retour des réfugiés et reconstruction, avec représentation du M23, de la société civile et des partis. Intégrations « au cas par cas » dans les FARDC. Garants : États-Unis, Qatar, UA ; suivi MONUSCO/UA. Le rapport y voit l’un des compromis les plus réalistes, à condition d’un financement extérieur significatif.

Option 3:  Intégration du M23, véritable processus de paix.
Partage de pouvoir local et provincial (administration et hiérarchie militaire provinciale), zone économique spéciale (Kivus/Ituri), amnistie générale pour les combattants avec filtrage des officiers (accusés de crimes graves). Garants : États-Unis, Qatar, UA ; suivi MONUSCO/UA. Plus incitatif pour le M23, mais politiquement sensible en RDC et exigeant en financements.

Option 4:  Autonomie temporaire du M23 (proposition qatarie d’août 2025).
Nomination de responsables M23 au local, force intérimaire mixte (50 % M23 / 50 % PNC) pendant 5 ans dans les zones occupées, élections locales en 2027, TRC et dialogue national en 2026. Garants : Qatar, UA ; mécanisme multilatéral de suivi (avec MONUSCO, EAC, SADC, CIRGL). Le rapport juge l’acceptation par Kinshasa peu probable et pointe des zones encore floues.

Option 5: Large autonomie du M23.
Transition nationale de trois ans avec partage de pouvoir élargi, statut spécial de huit ans pour l’Est (autonomie financière, militaire, administrative), dissolution des FARDC et réforme constitutionnelle vers un fédéralisme accru. Garants : EAC, Qatar, UA. Scénario proche des demandes du M23, mais politiquement inacceptable pour le gouvernement congolais, avec risque majeur de crise de légitimité.

Le rapport insiste sur une « fenêtre étroite du possible » définie par les intérêts politiques des parties, l’habileté des négociateurs et la pression des acteurs extérieurs. Même en cas d’accord, sa viabilité dépendra d’objectifs réalistes, d’un suivi crédible par des garants et d’une volonté politique soutenue à Kinshasa et Kigali, ainsi que chez les bailleurs (États-Unis, Union européenne et autres). Selon les auteurs, les précédents congolais montrent qu’en l’absence de ces conditions, les accords se délitent et le cycle de rébellion reprend, d’où la centralité des options 2 et 3 pour espérer un compromis assorti de justice, d’imputabilité et de réponses aux causes du conflit.