Soutien de Kigali à l'AFC/M23 : "Il est impératif de mettre fin aux doubles standards en matière de justice, les leçons apprises dans d'autres situations de conflit doivent être appliquées pour mettre un terme à la tragédie congolaise" (Mukwege)

Denis Mukwege
Denis Mukwege

Les Congolais ont droit à la justice, à la vérité, à des réparations et à des garanties de non-répétition des atrocités. Cette interpellation est du Docteur Dénis Mukwege dans sa réaction à la suite du nouveau rapport du groupe d'experts des Nations-Unies sur la situation sécuritaire dans l'Est de la République Démocratique du Congo.

Ce rapport confirme, preuves à l'appui, que le régime de Kigali dirige et contrôle de facto les opérations du M23 et les Forces de défense rwandaises (FDR). Ils ont joué un rôle déterminant dans la conquête et l'occupation de nouveaux territoires et villes, notamment Goma et Bukavu dans les provinces du Nord et Sud-Kivu.

"Nous aspirons à ce que la Cour Pénale Internationale poursuive ses enquêtes et ses poursuites en RDC pour les faits commis après le 1er juillet 2002, date de l'entrée en vigueur du Statut de Rome, et nous encourageons également les États à utiliser le principe de la « compétence universelle » pour mener des enquêtes et des poursuites sur les crimes graves commis en RDC, notamment ceux répertoriés dans le rapport Mapping. De plus, les Nations Unies se sont pleinement investies dans la mise en place des mécanismes de la justice transitionnelle dans de nombreux pays africains, notamment au Rwanda, en Sierra Leone ou en République Centrafricaine, confirmant la lutte contre l'impunité et le soutien à l'instauration d'un état de droit comme des outils nécessaires pour prévenir la répétition des violences et instaurer une paix juste et durable", a plaidé le Docteur Dénis Mukwege dans une déclaration faite mercredi 9 juillet.

Et de poursuivre :

"La souffrance des victimes est universelle, et le droit à la justice doit l'être tout autant. Il est impératif de mettre fin aux doubles standards en matière de justice à rendre aux populations martyres, en Afrique et partout ailleurs. Les leçons apprises dans d'autres situations de conflit doivent aujourd'hui être appliquées pour mettre un terme à la tragédie congolaise.Enfin, nous réitérons donc notre appel à des sanctions fortes et coordonnées contre les acteurs de la déstabilisation en RDC et à la mise en œuvre des prescrits de la résolution 2773 du Conseil de Sécurité, qui appelle à un cessez-le-feu sans condition, au retrait inconditionnel et immédiat de l'armée rwandaise du territoire congolais, et au démantèlement des administrations illégales implantées par le M23 et l'AFC au Nord et au Sud Kivu".

Pour Denis Mukwege, l'activisme de l'armée rwandaise aux côtés de la rébellion de l'AFC/M23 est à la base de la détérioration de la situation sécuritaire et humanitaire dans l'Est de la RDC.

"Les experts onusiens fondent leurs conclusions sur des photos et des vidéos authentifiées ainsi que sur des témoignages et du renseignement. Ces sources fiables et concordantes attestent qu'il n'y a aucun doute que les FDR ont mené en territoire congolais des incursions systématiques et massives et que les forces d'agression ont été positionnées en première ligne pour s'engager directement dans les combats en utilisant des armes de haute technologie. Depuis l'offensive éclair en janvier 2025 des troupes rwandaises et du M23, en violation flagrante de la Charte des Nations Unies, plus de onze millions de citoyens congolais vivent entre la famine et la violence sous le joug des forces d'occupation qui contrôlent de larges pans des Provinces du Sud et du Nord Kivu, ce qui a provoqué un regain préoccupant de violations graves des droits humains et des Conventions de Genève, et a aggravé la crise humanitaire et augmenté le déplacement forcé des centaines de milliers de civils", a dénoncé Mukwege.

Le dévoilement de ce rapport coïncide au moment où le Rwanda et la République Démocratique du Congo viennent de signer un accord de paix sous la médiation américaine. Cet accord ambitionne de mettre fin à près de trois décennies de conflits armés causant la mort de milliers de personnes et déplacés dans l'Est de la République Démocratique du Congo.

De son côté, Kigali a toujours justifié ses agissements suite aux menaces des FDLR qui selon le régime rwandais collaborent avec les FARDC alors qu'elles constituent une menace pour le Rwanda.

Clément MUAMBA