La Commission Diocésaine Justice et Paix de l'Archidiocèse de Kinshasa (CDJP-KIN) a sonné l'alarme sur l'urgence de la restauration de la paix dans la partie Ouest de la République démocratique du Congo. Cette organisation a présenté, jeudi 23 janvier 2025, un rapport sur la situation sécuritaire et humanitaire dans le territoire de Kwamouth/Mai-Ndombe et la commune rurale de Maluku/Kinshasa.
Selon ce rapport, la crise de Mai-Ndombe a produit un cortège de conséquences malheureuses, plongeant les communautés de Kwamouth et de Maluku dans une vulnérabilité extrême. Les violences ciblées, les destructions de biens, les confrontations armées et la hausse de la criminalité ont exposé les populations civiles à une situation humanitaire complexe, caractérisée par des déplacements forcés, des décès de civils et de militaires, une insécurité alimentaire accrue et un accès réduit aux services sociaux de base.
De 2022 à 2024, cette crise a causé la mort de plus de 3000 personnes et déplacé plus de 500 000 personnes. Les Mobondo ont attaqué plus de 200 villages à Kwamouth, Kwango et dans la commune de Maluku, sans compter les attaques à Bagata, Kwilu et Kongo-Central.
"Il y a plus de 3000 morts orchestrés par la milice Mobondo, et cette milice n'est pas loin de la capitale, elle est même sur place parce que Maluku, c'est Kinshasa. On tue plus de 3000 personnes, laissant des enfants aujourd'hui orphelins. Cette crise orchestrée par les Mobondo continue d'impacter. Nous avons identifié plusieurs villages attaqués, pillés, avec 60 % des maisons incendiées et plus ou moins 550 000 personnes déplacées. Où vivent-elles ? Tout cela, ce sont les conséquences de la milice. Ils sont éparpillés et leur effectif continue d’augmenter puisque les Mobondo menacent, et on les laisse menacer", a indiqué Barthélémy Ngwangu, expert en droits humains, lors de la présentation du rapport.
Il a poursuivi :
"Parmi cet effectif, à Maluku, on compte 392 300 déplacés, à Kwilu 72 000, à Kwango 54 100, et à Mai-Ndombe 32 000, sans oublier le Kongo-Central où 14 villages ont été vidés. C'est douloureux. Dans cette crise, on a identifié 37 753 enfants de moins de 5 ans atteints de malnutrition. Non seulement les champs sont incendiés, mais on ne peut pas y accéder pour cultiver et nourrir les enfants. Dans cette situation de malnutrition, les chiffres sont énormes et, sans assistance urgente, tous ces enfants risquent de mourir."
Le rapport a également relevé le changement de noms de certaines localités contrôlées par la milice Mobondo : le village Miboro est devenu "Feshi", Engweme rebaptisé "Bumba", et Masia-mbe désormais appelé "Bulungu".
"Voilà pourquoi nous faisons appel aux autorités. Avec le phénomène Kuluna, on a donné des injonctions pour arrêter, juger et condamner à mort. L'État congolais a tous les mécanismes pour activer son appareil judiciaire. Que ce soient les autorités militaires ou civiles, elles doivent enquêter sérieusement et identifier les auteurs intellectuels et matériels sur le terrain. Pourquoi ne pas organiser une série de procès ? On ne peut pas prendre les armes pour résoudre un conflit foncier alors que des gens meurent", a ajouté Barthélémy Ngwangu.
Le rapport déplore également des cas de violations des droits humains dans le Plateau de Bateke, notamment des mutilations, des enlèvements (principalement de motards) et des actes de torture.
La Commission a dénoncé l'attitude des forces de défense et de sécurité, qui contribuent également aux violations des droits humains, en maltraitant les populations civiles.
Ce rapport sur la situation sécuritaire et humanitaire dans le territoire de Kwamouth et la commune rurale de Maluku a été présenté dans le cadre du Projet LISANGA, financé par la Direction générale de la Commission européenne en charge de l'aide humanitaire (DG-ECHO), avec un cofinancement de Caritas International Belgique dans le volet cohésion sociale.
Clément MUAMBA