RDC : le consortium DFJ-Cordaid lance « École de campagne » pour préparer les femmes politiques du Nord-Kivu aux élections de 2028

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Les femmes qui ont pris part à "Ecole de campagne"

En prélude aux élections de 2028 en RDC, une quarantaine de femmes politiques provenant de Goma, Rutshuru, Masisi, Nyiragongo, Lubero et Beni (Nord-Kivu) ont participé, du lundi 10 au vendredi 14 juin à Goma, à l’École de campagne organisée par le consortium Dynamique des Femmes Juristes (DFJ) et Cordaid. Cet événement, s’inscrit dans le cadre du projet « Promouvoir la participation et la représentation politique des femmes », financé par le ministère des Affaires étrangères de la République fédérale d’Allemagne. Pendant cinq jours, ces femmes sélectionnées pour ce projet pilote ont été formées à l’élaboration d’un agenda politique, d’un plan de campagne, d’un plan de communication et autres compétences essentielles.

« Tout est communication. Et la campagne, on ne la fait pas seulement pendant la campagne. Si vous voulez être candidate pour réussir, il faut déjà commencer à faire la pré-campagne dès maintenant. À travers tout ce que vous faites, puisque vos gestes, les organisations auxquelles vous appartenez, vos églises où vous priez, tout cela fait partie de votre campagne. Quand vous faites un discours de campagne, il faut recourir aux anecdotes pour attirer l'attention des gens. Le message de campagne doit respecter les 4C : il doit être consistant, court, cohérent et convaincant. Il faut recourir aussi aux slogans. Par exemple, 'Goma Sécure' pour dire la sécurité à Goma. Il faut parler simplement. Il y a aussi le choix des médias. Il faut s'auto-évaluer régulièrement. Il faut se poser la question de savoir quels sont mes atouts et mes faiblesses », a expliqué le professeur Muhesi Ono, l'un des facilitateurs de cet atelier.

Selon Merveille Bauma, point focal de ce projet à la DFJ, l'École de campagne s’aligne avec l'objectif global du projet qui est de créer un environnement favorable aux femmes pour qu'elles puissent agir et être représentées dans les instances décisionnelles.

« L'École de campagne vise particulièrement à renforcer les capacités des femmes dans le cadre d'un processus de formations, de partage d'expériences et de compétences pour que ces femmes puissent être conscientes de leurs besoins, de leurs compétences, de leur savoir-faire pour qu'elles sachent planifier leur carrière politique. Le projet prévoit un processus d'accompagnement pour soutenir les femmes ambitieuses dans leur carrière politique afin de leur doter des compétences nécessaires pour qu'elles soient prêtes en 2028. Les femmes sont engagées et ont prouvé leur intérêt à cet accompagnement dans leurs ambitions politiques », a déclaré Merveille Bauma.

Les résultats des récentes élections ont mis en lumière la sous-représentation des femmes, avec une faible proportion élue aux postes de députées nationales et provinciales. La province du Nord-Kivu ne compte que deux femmes sur les 48 députés provinciaux qui composent l’Assemblée provinciale.

« Nous venons d'apprendre beaucoup de choses durant ces cinq jours d'atelier. Nous avons appris comment élaborer nos agendas politiques. Peut-être que lors des élections passées, nous ne nous sommes pas bien préparées et c'est pourquoi nous n'avons pas gagné les élections. Nous avons été aussi candidates dans la ville de Goma. Cet atelier nous permet donc de nous améliorer parce que c'est aujourd'hui déjà que nous devons nous préparer pour les élections de 2028. Cette École de campagne nous renforce davantage afin de bien élaborer nos projets de société, commencer à approcher les médias pour parler de nos visions. En 2028, nous voulons changer les choses. Nous ne nous étions pas préparées à tous les niveaux en 2023. Nous comptons donc relever les défis, notamment des frustrations et autres », a reconnu Rebecca Malimutoto, une des participantes à l'École de campagne.

« L'École de campagne est arrivée au bon moment pour moi personnellement. J'ai appris beaucoup de choses. J'ai compris qu'en 2023, je me suis lancée précipitamment dans la campagne sans savoir beaucoup de choses. Je ne savais pas que je devais élaborer un agenda politique axé sur les problèmes rencontrés par les électeurs. J'ai appris comment élaborer mon plan de campagne, mon plan de sécurité, mon plan de communication et même le plan de restitution de tout ce que je rencontrerai sur le terrain. Nous n'avons pas réussi en 2023 parce que nous ne faisions pas les choses correctement. Nous étions sur le terrain mais, par exemple, je n'avais pas de chargé de communication. Peut-être que je faisais beaucoup d'actions mais elles étaient méconnues du grand public. Je n'avais pas de chargé de la santé, de la sécurité et autres. Mais avec ce que nous venons d'apprendre, nous espérons que nous allons nous y mettre. Nous n'allons donc plus attendre la dernière minute pour 2028. Nous sommes déjà en action dès maintenant », se réjouit Despine Kabuo Karuke, femme politique du Nord-Kivu.

Pour le professeur Kavugho Kahindo Véronique, femme politique et participante à l’École de campagne, les femmes veulent éviter de se lancer dans la course électorale de 2028 à la dernière minute. Pour elle, 2028 se prépare maintenant.

« On est venues pour qu'on nous forme sur comment faire le plan de campagne, comment faire l'agenda politique, le plan de communication, le plan de restitution et autres. Et dans tout cela, j'ai appris ce qui m'aidera à bien battre campagne en 2028. La faille que j'ai remarquée de mon côté, c'est que je n'avais pas bien budgétisé ma campagne électorale en 2023. Je ne m’étais pas préparée financièrement. Mais avec le plan de préparation des ressources financières que nous avons vu, je sais maintenant comment mobiliser les ressources humaines, matérielles et même financières pour que, le moment venu, tout soit prêt. L'autre faille, je n'avais pas élaboré le plan de communication. J'allais partout sans savoir quoi communiquer à qui. Je dois donc approcher les médias pour me vendre à la population. Plus jamais, je n'attendrai la dernière minute », a dit le professeur Kavugho Kahindo Véronique.

Le projet « Promouvoir la participation et la représentation politique des femmes en RDC » est mis en œuvre au Nord-Kivu, Sud-Kivu et Kinshasa. Il s'agit d'un projet pilote qui s’étend sur deux ans.

La parité en RDC est un principe constitutionnel qui, en théorie, offre une opportunité unique pour une représentation égale des hommes et des femmes dans les organes de décision du pays. La récente nomination de Mme Judith Suminwa à la tête de la Primature démontre une volonté politique de la part du chef de l’État, Félix Antoine Tshisekedi, de faire avancer la lutte en faveur des droits des femmes en RDC.

La participation équitable des femmes aux instances de prise de décision en République Démocratique du Congo est essentielle pour assurer un développement durable et inclusif. Cependant, les femmes en RDC, à cause de plusieurs obstacles, restent fortement sous-représentées au niveau politique et dans les postes de décision en général. En dépit de la majorité numérique des femmes au sein de la population congolaise, plus de 52 % étant féminine, leur représentation dans les sphères décisionnelles reste largement insuffisante, soit moins de 30 %, que ce soit dans le gouvernement, les institutions ou les entreprises. Malgré leurs compétences maintes fois démontrées en tant que leaders et agents de changement, et leur droit à participer de manière égale à la gouvernance démocratique, cette disparité est encore plus prononcée dans l'Est du pays, où les conflits armés ont exacerbé les inégalités de genre, limitant la participation des femmes dans la sphère politique et sociale.