Chronique électorale (J6): la rue, l’autre enjeu de ces élections ! 

Kash/Série électorale
Kash/Série électorale

Descendant avec assurance les escaliers du siège de la CENI ce 8 octobre 2023, Felix Tshisekedi affiche une détermination rare. En présence de ses partisans et des journalistes, il clame son ambition d'un second mandat, comptant notamment sur le soutien des militants de l’UDPS. Il refuse de céder le monopole de la rue et de l’observation électorale à l'opposition. Félix Tshisekedi exhorte ses partisans à rester devant les bureaux de vote, à sécuriser leurs voix et à demeurer sur place après avoir voté. Il sait pouvoir compter sur les fidèles « combattants de l’UDPS », qui l'ont maintes fois soutenu par le passé.

Le 11 novembre 2018, les opposants réunis à Genève désignent Martin Fayulu comme leur unique candidat. Cette décision pousse Félix Tshisekedi à lâcher la phrase devenue célèbre : « le changement aujourd’hui, c’est Martin Fayulu ». Malgré cette déclaration, dès le lendemain, le siège de l’UDPS est en ébullition, les militants descendent dans la rue et expriment leur mécontentement. Finalement, Tshisekedi retire sa signature de l’accord conclu avec ses alliés de l'opposition, marquant un tournant dans l'histoire politique récente.

Alors qu'il s'apprête à rompre avec ses alliés du FCC, Félix Tshisekedi mise sur le soutien des combattants de l’UDPS. Le 24 juin 2020, une masse de militants se mobilise dans les rues, des centaines de motocyclistes et de manifestants expriment leur hostilité envers les députés au Palais du peuple, exigeant le retrait des propositions de lois sur les réformes judiciaires lancées par les députés FCC, Aubin Minaku et Garry Sakata. Ces mêmes militants accompagnent également Jean-Marc Kabund et d’autres élus de l’UDPS lors de la destitution de Jeanine Mabunda.
« Nous avons désormais l'expérience du pouvoir et celle de la rue », affirme un cadre de l’UDPS. Cette base populaire constitue l'appui principal de Félix Tshisekedi pour éviter de quitter le pouvoir après un seul mandat présidentiel. 

La mobilisation dans la rue est enjeu central de ces élections. Si Tshisekedi mise sur ses partisans, d'autres forces politiques comptent également sur la force de la rue. Martin Fayulu, Denis Mukwege et d’autres candidats ont décidé de porter plainte contre Denis Kadima, président de la CENI, l'accusant de préparer un « chaos électoral ». Ils comptent sur la mobilisation pour, disent-ils, imposer la victoire du peuple.

L'Eglise catholique observe également la situation dans la rue avec attention. Le Comité Laic de Coordination semble amorphe, mais il a encore des beaux restes.
« Quand sonnera l'heure des élections, soyons vigilants et éveillés pour protéger notre vote. Nous encourageons ceux parmi vous qui se sont engagés à organiser une « veille électorale » pour prêter mains fortes aux Missions d'observation classique. « Ne quittons pas les Bureaux de vote tant qu'on aura pas affiché les résultats », a dit Abbé Donatien N’shole, secrétaire général de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) le 21 novembre. 

La rue nécessite une mobilisation constante. Cependant, la rue doit être alimenter par les preuves éventuelles de fraude. Bien qu'elle ne puisse aligner les 40 000 observateurs de 2018, la Mission d’observation électorale des églises catholique et protestante envisage d'être présente sur chaque site de vote grâce à ses 25 000 observateurs. Il y aura également d’autres missions d’observation électorale de la société civile. C’est le cas de « Regard Citoyen », composé de quatre plateformes : le Réseau Gouvernance Economique et Démocratie (REGED), le Réseau National pour l'Observation et la Surveillance des Elections au Congo (RENOSEC), Rien-Sans-Les-Femmes (RSLF) et le Réseau des Organisations de Droits Humains et d’Education Civique d’Inspiration Chrétienne (RODHECIC). Cette nouvelle plateforme ambitionne de déployer 22 000 observateurs. La SYMOCEL et Nouvelle société civile se coalisent également pour déployer au moins 20 000 observateurs. D’autres initiatives similaires se développent, mais chacun avec son agenda. Cyrille Ebotoko, membre de la mission d’observation électorale des églises catholique et protestante, se montre prudent : « Nous sommes conscients que certains observateurs pourraient agir au nom des partis politiques. »"