Face aux critiques, notamment de la Fédération des industriels du bois et de la société civile, Yves Kitumba, directeur de cabinet d’Eve Bazaiba, défend le bilan de son ministère. Il se félicite notamment de la participation du secteur du bois dans le processus de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE).
Quand la Fédération des industriels du bois trouve que “le secteur se porte très mal actuellement avec tout ce qui se passe au ministère de l'environnement”, Yves Kitumba estime au contraire que de gros progrès sont faits pour améliorer la gestion de la filière.
"Vous avez appris que le secteur des bois figure maintenant dans le processus de transparence de l'ITIE (l’Initiative relative à la transparence des industries extractives), tout ça, ce sont des réformes, des efforts fournis pour qu'il y ait de la transparence dans ce secteur des bois”, a expliqué Yves Kitumba, directeur de cabinet d’Eve Bazaiba au cours d’un entretien accordé à ACTUALITE.CD le jeudi 11 mai 2023.
Avant d’ajouter :
“Vous venez de suivre le Président de la République mettre en place les zones économiques spéciales où il y aura des exploitations pour la transformation des bois. Vous avez appris également que Madame la ministre d'État et l'ensemble du gouvernement ont décidé que la loi soit respectée notamment, qu’il y ait une quantité de 30% de la production permanente qui peut sortir à l'état brut et les 70% transformés localement, tout ça c'est pour mettre de l'ordre dans le secteur. En terme juridique, nous avons tous les instruments, c'est dans la faisabilité qu'il faudra pousser. Comme je vous ai dit, le secteur de bois devra contribuer à l'augmentation du budget de l'État, le secteur du bois doit être transparent et maintenant on l'a mis dans le processus ITIE", a-t-il fait savoir.
Pour Yves Kitumba, on ne peut pas accuser le ministère de ne pas contrôler ce secteur.
"Ça, c'est une insulte pour notre pays, vous ne pouvez pas accepter ça. Il y a le code forestier, il y a des textes, les différents instruments juridiques sont là, nous ne sommes pas dans une jungle, c'est un pays la République Démocratique du Congo, ce n'est pas pour rien qu'on nomme un ministre de l'environnement, ce n'est pas pour rien qu'il y a un secrétaire général, ce n'est pas pour rien qu'il y a une administration. Nous avons des coordinations dans toutes les provinces, surtout dans les provinces forestières, il y a des coordinations qui représentent le Secrétariat général. Ce sont des agents de l'État, ils sont payés par l'État pour faire ce travail de contrôle, on ne s'en plaint pas et ces coordinations, il y a tout un service de contrôle est vérification qui appuie le travail et il y a des inspecteurs " s'est-il défendu au cours de cet entretien.
Avant d’ajouter :
"Je crois que les instruments juridiques sont là, ce sont les mesures d'application et d'accompagnement qui doivent suivre et ça demande un leadership et aujourd'hui je peux affirmer qu'il y a un leadership fort", a soutenu Yves Kitumba. "Le ministère n'a pas abandonné les communautés locales”.
Yves Kitumba a indiqué que la question relative au respect des clauses sociales préoccupe au plus haut point le ministère de tutelle. Des mesures ont été proposées face aux entreprises qui ne les respectent pas.
"Le ministère n'a pas abandonné les communautés locales. Le suivi est fait, la preuve : quand vous regardez notre rapport annuel, il y a ceux-là qui n'ont pas respecté, les clauses sociales ont été proposées à la résiliation, d'autres ont été proposées à la suspension donc ça veut dire qu'il y a toute une série des procédures à respecter et maintenant nous y veillerons encore davantage parce que c'est parmi des conditions pour avoir un contrat d'exploitation et les évaluations doivent se faire comme prévu", a-t-il fait savoir.
Pour la Fédération des industriels du bois, la forêt congolaise est sous-exploitée par rapport à celle des autres pays du bassin forestier du Congo. Yves Kitumba rétorque en expliquant que si aujourd'hui la RDC se décide d'exploiter à fond ses forêts, il y aura toujours des voix qui vont se lever pour accuser la RDC de vendre les forêts en violation des règles internationales.
"Si aujourd'hui, on commence à donner des exploitations permanentes, des Ongs vont dire qu'on est en train de vendre les forêts, si nous demandons la compensation par rapport aux services rendus par notre écosystème à la planète, les autres pays ne respectent pas leurs engagements. Je crois que c'est de la manipulation", a indiqué Yves Kitumba.
Selon lui, la RDC a beaucoup plus à gagner à faire des concessions de conservation pour espérer bénéficier de la compensation relative à la protection des forêts.
"Aujourd'hui, je peux vous affirmer : un arbre couché coûte moins cher qu'un arbre debout. Nous, en termes de réformes, nous avons proposé la modification de la loi pour insérer la question du crédit carbone, le climat donc on va plus dans une logique de conservation pour gagner plus en termes des crédits carbones. Ces ressources aideront facilement les populations, cela nous permettra également de préserver la planète mais aussi de déclencher des projets de développement pour ses protecteurs des forêts", a-t-il soutenu.
Les entreprises en manque d'adresses doivent se mettre en ordre, le processus de restitution des droits et taxes de l'État est en cours
Revenant sur certaines des conclusions du rapport de l'IGF, Yves Kitumba a déploré l’existence de sociétés d’exploitations sans adresses.
"Nous avons recommandé à ces sociétés de régulariser surtout en termes d'adresses pour permettre à ce qu'on ait une identité cadastrale nette pour nous permettre de correspondre avec ces sociétés", a rassuré Yves Kitumba
À ceux qui doivent aussi régulariser avec les services de l'État en ce qui concerne le paiement
"Dans le rapport préliminaire de revisitation des contrats forestiers, il y a une colonne des constats et des propositions des solutions. La loi dit quoi ? Vous ne vous acquittez pas des droits et taxes pendant trois ans, l'État a le droit de résilier votre contrat. Bien entendu le processus est en cours, le rapport est là où l'on a repris tout ça", a-t-il ajouté
Yves Kitumba a rassuré sur la coordination des actions avec d'autres services étatiques.
"Dans le souci d’assainir la gestion du secteur de l’environnement, d’instaurer la bonne gouvernance et de mettre en œuvre la stratégie d’élargissement de l’assiette fiscale, parmi les mesures que nous avons proposé, il y avait la conciliation avec d'autres services de l'État. Nous sommes en étroite collaboration avec la DGRAD en termes de conciliation des chiffres pour voir les déclarations et ce que nous pouvons améliorer. Nous sommes en contact avec tous ses services d'assiettes et de recouvrement pour faire généralement des commissions mixtes pour essayer de concilier les chiffres", a-t-il fait savoir.
S'agissant de la présence massive des expatriés dans le secteur du bois et la quasi-absence d’exploitants nationaux, Yves Kitumba estime que le ministère n'a pas pour rôle de chercher des investisseurs mais plutôt d'améliorer le cadre de travail pour plus d'investissements.
"Aujourd'hui, les opérateurs économiques ce n'est pas le ministère de l'environnement qui doit aller les chercher, le ministère a pour rôle d'améliorer le cadre de travail avec des réformes", a-t-il conclu.
Cet article fait partie d’une série d'enquêtes réalisée avec l’appui de Rainforest Journalism Fund, en partenariat avec Pulitzer Center.
Propos recueillis par Clément Mwamba