Assemblée nationale : les députés du Nord-Kivu et de l'Ituri quittent l’hémicycle et suspendent leur participation à toute plénière relative à la prorogation de l'état de siège

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Les députés nationaux de l'Ituri et du Nord-Kivu ont décidé de quitter la plénière ce lundi 18 avril consacrée à la prorogation de l'état de siège en vigueur dans ces deux provinces. Ils ont également résolu de ne plus participer à toute plénière relative à la prorogation de cette mesure d'exception.

Au nom des caucus de ces deux provinces, le député national Singoma Mwanza justifie cette décision par le fait que sur terrain, la situation sécuritaire ne s’améliore pas. Et plus grave, précise-t-il, ils ont été informés qu'à part l'état de siège, il n'y a pas d'autres options envisagées en vue de lutter contre l'insécurité dans cette partie de la République Démocratique du Congo.

“Depuis plusieurs années, nous avons ce problème très grave que nous vivons au Nord-Kivu et en Ituri. Chaque jour nous voyons nos populations tuées, nous voyons nos mamans, nos sœurs et nos enfants assassinés brutalement par des groupes armés. Nous avons tous salué la décision du Chef de l'État de mettre en place l'état de siège qui avait comme objectif de ramener la sécurité et la paix au Nord-Kivu et en Ituri, malheureusement il est constaté que malgré l'état de siège nous continuons à déplorer chaque jour des morts dans tous les territoires de nos deux provinces respectives. Nous nous posons la question, est-ce que réellement l'état de siège pourra mettre fin à cette situation des massacres?”, a déploré Singoma Mwanza au nom des élus du Nord-Kivu et de l'Ituri.

L’état de siège s’est transformé à un moyen de pression fiscale, dénoncent ces élus.

“On continue à insister que c'est la seule solution et malheureusement nous constatons aussi que l'état de siège a basculé plus vers une pression fiscale, mobilisation des recettes, au lieu de se concentrer sur la sécurité et la paix. À cause de cette situation là, nous avons pris cette décision de ne pas participer à une énième prorogation de l'état de siège, nous n'allons pas participer tant que nos cris ne sont pas entendus et les cris ne sont pas les nôtres, c'est les cris de nos populations qui sont tuées”, a ajouté Singoma Mwanza.

Cette plénière consacrée à la prorogation de l'état de siège intervient quelques jours après le séjour de la délégation gouvernementale conduite par le Premier ministre à Goma et à Bunia pour évaluer l’état de siège. 

À son retour à Kinshasa, lors de la 49e réunion du conseil, le Premier ministre a indiqué que son séjour intervenant à près d'un an depuis l’entrée en vigueur de l'état de siège a permis de dégager les avancées et les défis à relever ainsi que de prendre en compte les recommandations adressées au gouvernement de la république par les gouverneurs militaires lors des réunions de sécurité et préoccupations des différents acteurs sociaux et économiques et politiques. 

Sur le terrain, des forces politiques et sociales ont fait remarquer au Premier ministre que cette mesure qui avait été prise en réponse à l'insécurité persistante dans l'Est du pays, caractérisée par des tueries des civils commis par différents groupes armés, n'a pas permis jusque-là d’apporter les résultats escomptés. 

Au cours d’une conférence de presse, le Premier ministre a tenté d’apporter quelques réponses en laissant entendre que toutes les options sont sur la table.

Certains disent "peut-être qu’il faut requalifier l’état de siège étant donné que nous avons des zones où le programme de DDR est voulu. C’est plus dans la partie Sud du Nord-Kivu où nous avons des groupes armés moins virulents qui sont volontaires et veulent entrer dans le DDR. D’autres zones comme Beni, demandent que les opérations militaires s’intensifient, même dans le cadre de la mutualisation". 

Selon Sama Lukonde toujours, Il y a aussi ceux qui ne trouvent aucun intérêt de maintenir cette décision: "D’autres personnes proposent carrément de mettre fin à l’état de siège. L’autre tendance est la réorganisation du point de vue opérationnel tout en gardant l’état de siège. Toutes ces évaluations vont être mises sur la table pour permettre une bonne orientation", avait ajouté le Premier ministre.

Proclamé le 03 mai 2021 et entré en vigueur le 06 mai de la même année, au mois de mai de l'année 2022, l'état de siège va totaliser une année jour pour jour.

Berith Yakitenge et Clément Muamba