RDC : 7 astuces d’une femme de droit (juge) pour se démarquer des autres

RDC : 7 astuces d’une femme de droit (juge) pour se démarquer des autres

Après vingt quatre ans de service dans le secteur judiciaire congolais, Ilonga Ayitoma Micheline n’a toujours pas abandonner ses rêves de monter en grade. Du poste de magistrat du parquet de Kalamu à celui de Conseillère à la Cour d'Appel de Kinshasa Gombe, en passant par la Présidence du tribunal de paix de Kinshasa/Kasa-vubu, ce 07 avril, elle  partage son expérience au Desk Femme et révèle le secret de sa réussite. 

Dans un bureau d’environ 5/4 mètres, sept tables, une étagère, un plafonnier et un climatiseur, Ilonga Ayitoma Micheline passe ses journées avec ses 6 autres collègues. Comme toutes les fois où elle doit avoir un procès, elle a quitté son domicile ce mercredi à 6heures pour un trajet d’environ deux heures 45 minutes. «Je suis arrivée au bureau à 8h 45. Le procès devait commencer à 9heures,» confie-t-elle. 

Elle a intégré la magistrature depuis 1997, affectée au parquet de Kalamu (commune). Par la suite, elle sera transférée comme juge au tribunal de paix de Kinshasa Assossa en 2000. Ilonga Ayitoma Micheline est ensuite nommée Présidente du tribunal de paix de Kinshasa/Kasa-vubu de 2016 à 2020, avant d’être envoyée à la cour d'appel de la Gombe en tant que Conseillère. 

« C’est pratiquement le grade élémentaire ici. C’est normal, je suis à ma première année de service dans cette Cour. Il y a bien plus à espérer », dit cette ancienne étudiante de l’Université de Kinshasa. 

Du journalisme au Droit 

Plus jeune, Ilonga Ayitoma Micheline voulait être journaliste. « J’appréciais ceux qui parlaient à la radio, à la télévision, je me voyais en eux », se rappelle la juge. Et de renchérir « Mais le droit, c’est une question de vocation. J’aime la droiture, j’aime rendre justice. Je sais que j’ai le pouvoir de décider du lendemain heureux ou malheureux des individus. J’aime mon métier ».  

Après 10 ans dans cette profession, la juge devient mère, un premier défi s’impose à elle, trouver l’équilibre entre ménage et emploi. « Sur le plan professionnel, j'ai eu la chance de rencontrer des collègues masculins qui avaient de la considération pour toutes les femmes. À chaque étape de mon parcours, il y a eu entente, bonne collaboration et respect mutuel. Mais en termes de difficultés, au départ, j'ai eu du mal à trouver l'équilibre entre mon foyer et mon emploi. Je devenais mère. Mes taches professionnelles m’attendaient aussi. Je devais à tout prix faire l’équilibre entre les deux," confie-t-elle. 

Grace au soutien moral de son époux et de sa famille, elle va très vite s’adapter. « Lorsque des incompréhensions naissent dans le foyer, cela impacte négativement le travail », soutient-elle. 

Savoir faire la part des choses

Face aux nombreux préjugés qui entourent les femmes évoluant dans le secteur de droit. Notamment un caractère dur qui ne permettrait pas de construire un foyer. Ilonga Micheline répond, " Quand une femme est juriste et qu'elle accepte de se marier, cela ne la soustrait pas de son statut de juriste ni l'inverse. Quand on est à la maison, on est femme, épouse d'un homme, mère d'une famille, on n’est pas juge ou magistrat chez soi. Il faut bien s'occuper de ses charges ménagères." 

Astuces clés pour se démarquer des autres

En 24 ans de service, Ilonga Ayitoma Micheline estime avoir rendu plus de 500 jugements. "Au parquet, en moyenne 3 dossiers sont instruits par jour. S'il faudrait multiplier ce nombre à plus de 20 années de service, nous allons dépasser les 500", soutient-elle. Pour marquer son empreinte en tant que femme, dans l'histoire de la justice en RDC, elle propose 7 clés. « La discipline, la découverte de soi, de ses objectifs, son apport entant que femme dans le développement des communautés, le travail, la détermination et la persévérance. Sans tout cela, on ne va nulle part », assure-t-elle.

Représentativité des femmes : entre compétences et promotion du genre 

"Les femmes ne sont pas très nombreuses dans les juridictions supérieures. Elles sont beaucoup plus présentes dans les juridictions inférieures. A l'exemple de la Cour d'appel où je suis, les femmes ne représentent qu'environ 20 % du nombre total. Dans les juridictions inférieures, les femmes deviennent de plus en plus nombreuses. Peut-être que dans l'avenir, nous aurons un taux élevé des femmes qui occupent des postes de direction et de prise des décisions dans l'appareil judiciaire congolais," souligne la juge, qui propose cependant de « développer des mécanismes de prise en compte du genre dans le secteur judiciaire congolais. » 

Lèvres sèches, visage fatigué, Madame  Ilonga Ayitoma se contente d’une bouteille d’eau à température ambiante. En effet, depuis 6 heures du matin, la juge n’a rien consommé de consistant. « Nous plaidons pour l’amélioration des conditions de travail des personnels judiciaires congolais et des salaires décents. »

Prisca Lokale