Trois miliciens du groupe armé Raïa Mutomboki ont été condamnés, le 22 août dernier par le tribunal militaire de Bukavu (Sud-Kivu) respectivement à 10, 15 et 20 ans de prison ferme pour crimes contre l’humanité par meurtre, viol, esclavage sexuel, tortures et autres actes inhumains.
Les condamnés sont notamment le commandant adjoint du groupe Raïa Mutomboki Majinga, Bitale Leonard Luc, et deux membres de ce groupe armé, Asifiwe Muzaliwa et Doudou Ndoto Philippe. Les prévenus avaient commis ces crimes dans divers villages du territoire de Kalehe, notamment à Lungomangoma, Bulambika, Miriwa, Bukanga, Bitale, en 2016, et à Bulambika, Lungomangoma, Cibimbi, et au Parc National Kahuzi Biega, en 2017, faisant 61 victimes identifiées.
Le verdict est tombé au terme de six jours d’audience d’un procès qui s’est déroulé du 17 au 22 août 2020. Des sources de la Mission de l’organisation des nations unies pour la stabilisation du Congo (Monusco) signalent qu’ «aucune circonstance atténuante n’a été admise pour les accusés, également condamnés à payer des dommages et intérêts en réparation des préjudices causés à 22 victimes constituées parties civiles».
Raïa Mutomboki, rattrapé par la justice
Créé en 2005 pour lutter contre les groupes armés étrangers, dont les combattants hutus rwandais des Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FRDL), la milice Raïa Mutomboki, qui s’est aujourd’hui divisée à plusieurs factions, se rend également coupable de violences dans des villages sous son occupation. Ce n’est pas pour la première fois que certains de ses membres tombent sous le coup de la justice congolaise pour divers crimes commis à l’encontre des civils. Novembre 2019, le chef milicien Frédéric Alimasi Musada, surnommé Kokodikoko, a été condamné à perpétuité et deux de ses acolytes à 15 et 20 ans de servitude pénale pour crimes contre l’humanité, pour avoir commis des viols, meurtre, torture, esclavage sexuel, privation de liberté, pillage et destruction de biens contre des civils à Shabunda et Mwenga, toujours au Sud-Kivu. Environ 350 victimes, dont plus de 190 ayant subi des violences sexuelles, avaient pris part à ce procès.
Un travail réussi pour la Task Force Justice
D’après nos sources, cette affaire fait partie des cas identifiés comme «prioritaires» du Sud-Kivu approuvés lors d’un atelier de validation tenu en novembre 2019 par la Task Force justice pénale internationale. Cette dernière est un réseau informel d’acteurs internationaux qui collaborent afin de soutenir le travail des juridictions militaires congolaises dans l’enquête et la poursuite des crimes de masse en République Démocratique du Congo (RDC). Il s’agit entre autres acteurs, du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), de la section d’appui à la justice de la MONUSCO, de l’ONG TRIAL International, de la Fondation Panzi, ainsi que du Bureau conjoint des Nations unies aux droits de l’homme (BCNUDH).
Claude Sengenya