Covid-19 : Quelles mesures de prévention pour les prisons en RDC !

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La rédaction vous propose cette tribune de Muasa Patoka Kalonji Guillaume, Chargé d’enseignement au Département de Santé Publique de l'Université Officielle de Mbuji-Mayi

La République Démocratique du Congo, fait face actuellement à une pandémie de Coronavirus qui va crescendo. Notre pays compte aujourd’hui plus de six cents cas d’infections avérés, et une septantaine d’individus signalés guéris et trente-deux décès. Quant à la situation dans les prisons, généralement surpeuplées, l’incertitude règne à cause du confinement et le risque de propagation de l’épidémie demeure présent selon l’ONG de Droits de l’Homme Human Right Watch.

En effet, comme on pourra bien le constater, le système pénitentiaire Congolais fait face à toute une série de problèmes, découlant des mauvaises conditions de détention, la vétusté des infrastructures pénitentiaires, le sous-financement et la surpopulation. La situation de la pandémie à l’heure actuelle montre à suffisance la réalité carcérale de notre pays. Ainsi donc, nos prisons constituent une bombe à retardement auxquelles nos politiques doivent faire très attention. Déjà, depuis quelques jours, une quarantaine de cas a été signalée à la prison militaire de Ndolo.

Par ailleurs, il faut reconnaître que notre système de santé est faible, car n’ayant pas la capacité de supporter le danger extrême que le Covid -19 impose. Pour cela, une cartographie d’hôpitaux et des centres de secours devrait être très vite définie. Dès lors, il faudrait travailler non seulement sur les compétences de chaque site d’hospitalisation, mais aussi sur le personnel soignant sur lequel il peut compter.

L’on sait qu’il existe actuellement de véritables prisons-dortoirs, comme celle de Mbuji-Mayi (où des études ont été réalisées) Ndolo avec ses quarante et un cas de coronavirus dépistés, Makala, Bukavu, etc... où le niveau de surpopulation exige une prudence extrême.  Comme proposition de solution provisoire, il est urgent de procéder dans de tels lieux d’incarcération à une libération des personnes retenues pour des délits mineurs, ainsi que ceux dont les peines sont presqu’à terme.  En ce qui concerne des détenus ayant commis des crimes de sang ou de détournements de deniers publics, il serait souhaitable d’envisager de reconvertir les cellules réservées aux VIP en cellules d’isolement afin de permettre une distanciation sociale suffisante. 

D’autre part, il s’avère urgent de mettre à disposition dans les différents chefs-lieux des provinces un ou deux locaux pour recevoir les détenus déclarés positifs au coronavirus afin de mieux assurer leur surveillance tout en garantissant les soins aux malades les plus touchés.  Quelques mesures pratiques devaient aussi être rigoureusement appliquées.  Il s’agirait entre autres de l’interdiction de toutes les visites aux prisonniers.  Dans ce cas précis, il serait préférable de privilégier l’usage des téléphones portables pour faciliter la communication avec les familles et les avocats. Le port des masques devrait être obligatoire même dans les provinces qui n’enregistrent pas encore les cas d’épidémie.  Une équipe multidisciplinaire d’intervention sanitaire rapide (composée de médecins, infirmiers, kinésithérapeutes, auxiliaires de soins, protection civile, croix rouge, chauffeurs...)  devrait être constituée dans chaque province et mobilisée pour faire face au flux de travail qu’engendre la pandémie dans les différents centres de soins.

Muasa Patoka Kalonji Guillaume

Chargé d’enseignement

Département de Santé Publique

Université Officielle de Mbuji-Mayi

Unité de recherche : Santé et prison