Affaire Bosco Ntaganda : l’ONG Sofepadi plaide pour la célérité dans le prononcé de la peine et la définition de la réparation en faveur des victimes

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L’organisation Solidarité féminine pour la paix et le développement intégral (SOFEPADI) souhaite le prononcé rapide de la peine contre Bosco Ntaganda, ancien chef d’état-major des Forces patriotiques pour la libération du Congo (FPLC), ancienne branche armée de l’Union des Patriotes Congolais (UPC) de Thomas Lubanga pour les crimes de guerre commis en Ituri.

Lundi, la Cour pénale internationale (CPI) a reconnu Bosco Ntaganda coupable de 18 chefs d’accusation de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, commis entre 2002 et 2003, dans la région de l’Ituri. Dans une déclaration à ACTUALITE.CD, Mme Mambo Zawadi, coordinatrice nationale de Sofepadi, la célérité dans le prononcé de la peine devrait permettre un rapide travail de réparation et de mémoire en faveur des victimes.

« En voyant le temps pris pour qu’on parvienne à ce verdict, nous craignons que le prononcé de la peine et la décision quant à la nature de réparation puisse prendre du temps. On risque d’entamer la réparation quand certaines victimes seraient déjà mortes, car dépouillées de tout », craint-elle.  

Aucune peine n’a été prononcée dans cette affaire car la procédure de la CPI prévoit la tenue d’une audience spéciale pour en discuter. Et il n’existe pas de délai fixe pour une telle procédure, mais dans les affaires précédentes traitées à La Haye, il s’écoulait environ trois mois entre la condamnation et le prononcé de la peine. Sofepadi rappelle que le droit pour les victimes à la justice ne se limite pas à la condamnation du bourreau, mais prend également en compte le droit à la réparation.

« Au-delà de l’aspect pénal, il faut qu’on accorde aussi de l’importance au volet réparation et mémoire. Nous voulons que la Cour puisse innover en définissant des mécanismes de réparation plus rapides. Et nous voudrions que les survivants soient placés au centre de planification de la nature de réparation, et non amener des projets conçus dans des officines, et qui ne rencontrent pas les besoins des victimes survivantes. Certes, la réparation ne va pas ramener les survivants dans leur état initial avant les affres, mais cela doit répondre à leurs besoins spécifiques de survie et de réinsertion communautaire », explique Mme Mambo Zawadi.

Pour le cas de l’Ituri, cette organisation de défense des droits humains soutient également des plaidoyers pour l’amorce d’un travail de mémoire pour honorer celle des victimes.

« Il y a peu, avec la conseillère en matière de violences sexuelles de l’ancien chef de l’Etat (Joseph Kabila, Ndlr), on avait déjà entamé des discussions avec les victimes pour définir le travail de mémoire important pour elles : elles avaient émis le vœu de voir un monument être érigé en Ituri en mémoire des victimes et initier des littératures retraçant l’histoire des affres connues. Jusqu’aujourd’hui, les survivants plaident aussi pour que des journées commémoratives fériées soient aussi décrétées au pays, en souvenir de la situation vécue. Il s’agit des initiatives que nous soutenons au niveau national. C’est important que la communauté internationale puisse capitaliser ces acquis », plaide-t-elle.

Contexte

M. Ntaganda était accusé de 13 chefs de crime de guerre (meurtre et tentative de meurtre, attaque contre des civils, viol, esclavage sexuel de civils, pillage, déplacement de civils, attaque contre des biens protégés, destruction de biens appartenant à l'adversaire ; et viol, esclavage sexuel, enrôlement et conscription d'enfants de moins de 15 ans et leur utilisation pour les faire participer activement à des hostilités) et de cinq chefs de crime contre l'humanité (meurtre et tentative de meurtre, viol, esclavage sexuel, persécution, transfert forcé de population).

Le procès s'était ouvert le 2 septembre 2015 et les conclusions orales ont été entendues du 28 au 30 août 2018. Bosco Ntaganda est détenu par la Cour.

Au total, 2 123 victimes, représentées par les représentants légaux du Bureau du conseil public pour les victimes, Sarah Pellet et Dmytro Suprun, ont participé au procès sur autorisation de la Chambre de première instance qui a rendu 257 décisions orales et 347 décisions écrites. Le dossier complet de l'affaire, qui contient les écritures des parties et des participants ainsi que les décisions de la Chambre, compte à ce jour plus de 2 300 documents.

Claude Sengenya