Elections en RDC : pro et anti-machine à voter s’expliquent

Photo ACTUALITE.CD

C’est un débat à n’en plus finir entre ceux qui soutiennent et ceux qui rejettent la Machine à voter (MAV), proposée par la Commission électorale nationale indépendante (CENI) pour les scrutins combinés (présidentielle, législatives nationales et provinciales) du 23 décembre 2018. Le JDC vous propose les arguments politiques et techniques croisés des uns et des autres. Débat.

L’un des cadres du FCC, Patrick Kanga,  justifie la position du FCC, du fait qu’il  tient aux principes républicains et constitutionnels consacrant l’indépendance de la Centrale électorale. «A ceux qui décrient la machine à voter de fournir des éléments probants et irréfutables contre cet outil. Nous ne soutenons pas la machine à voter. Il n’en va pas du rôle des politiques de la soutenir ou non», clame Patrick Kanga.

«Nous nous en tenons aux principes républicains, légaux et constitutionnels qui consacrent l’indépendance de la Commission Electorale Nationale Indépendante. Maintenant, ceux qui la décrient, n’est-ce pas à eux de sous-tendre leurs propos par des faits techniques probants et irréfutables? Jusque-là, c’est un débat politicien», ironise-t-il.

«Le vote électronique est prohibé dans notre pays»

De son côté, Steve Kivuata, porte-parole de l’opposant Adolphe Muzito, est plutôt d’un avis contraire. «Le vote électronique, soutient-il, est «prohibé» dans notre pays. Même si la machine à voter est bonne, ce n’est pas à ces élections qu’elle devrait être utilisée», clame-t-il, tout en soulignant qu’il craint «la tricherie avec l’usage de la MAV».

«Je suis donc à 100% contre la machine à voter, soutient-il. Sur le plan technique, l’audit des anglais a pu le démontrer. Il a fait remarquer qu’il y a beaucoup de possibilités de tricherie à travers cette machine à voter, entre autres un probable piratage informatique, même à travers la transmission de données et même par rapport à beaucoup de sources qui peuvent être tronquées pendant la fabrication de cet outil».

«Le Congolais ne s’est pas encore approprié la machine à voter»

Steve Kivuata brandit un autre argument technique : «Le fait que l’électeur congolais ne se soit pas encore approprié cette machine et n’aura pas suffisamment de temps pour se l’approprier. Pourtant, le vote doit être simple. Ce n’est pas une interrogation. Nous savons tous que la majorité de Congolais est analphabète et même ceux qui ont étudié n’ont pas, pour la plupart, utilisé l’ordinateur».

«Et leur demander de voter via un ordinateur risque d’être très compliqué pour eux. Même le Congolais le plus intelligent. Un candidat à la présidentielle a pris plus au moins trois minutes pour simuler le vote. En faisant les calculs, nous nous rendons compte que, sur 600 électeurs dans un bureau de vote, seul le tiers peut espérer voter le jour du scrutin», argumente Steve Kivuata.

«La démocratie ne suppose pas la dictature de l’opposition»

Au regard de la marche du vendredi 26 octobre dernier, l’opposition congolaise se montre radicale sur la machine à voter, dont elle propose le rejet. Son utilisation ne risquerait-elle pas d’embraser le pays après les élections ?

A cette interrogation, Patrick Nkanga est formel : «L’opposition s’est toujours comportée ainsi et ce depuis 2006. La démocratie ne suppose pas la dictature de l’opposition, mais la soumission, par tous, aux principes que nous avons nous-mêmes édictés».

«Il n’y aura pas des conflits post-électoraux, renchérit le porte-étendard du FCC. La population a acquis une certaine maturité. Certains candidats ne remplissant pas des conditions d’éligibilité ont été recalés, soit par la Haute cour, soit par la CENI. Plusieurs prédisaient en effet l’hécatombe. Mais après, il n’y a rien eu. La population sait, à présent, faire la part de choses».

«La machine à voter n’a pas obtenu le consensus de toute la classe politique»

Politiquement, qu’est-ce qui motive la position de l’opposition ? Steve Kivuata réagit aussitôt : «Les raisons politiques. Nous savons que, sur le plan légal, le vote électronique est prohibé pour les élections qui doivent se tenir ce 23 décembre. En plus, dans l’accord de la Saint Sylvestre, il était dit que toutes les décisions qui devaient être prises pendant ce processus après qu’on n’ait pas organisé les élections en 2016, devaient l’être par consensus. Or, il se fait que la machine à voter n’a pas obtenu le consensus de toute la classe politique».

Finalement quel crédit accorder aux résultats issus de ces scrutins? «Nous devons nous revêtir d’un état d’esprit démocratique et républicain en ce que nous croyons. Notamment à nos institutions, et en l’occurrence la CENI. Il n’y a rien de parfait sur cette terre», réplique Patrick Nkanga.

Pour sa part, Steve Kivuata est convaincu qu’«un bon pourcentage de Congolais risque d’être exclu du processus électoral à cause de la machine à voter. Toutes ces questions réunies nous montrent donc à suffisance que la machine à voter, même si elle peut être bonne, ce n’est pas au cours des élections du 23 décembre qu’elle devrait être utilisée».

               Stéphie MUKINZI