Adoptée par l’Assemblée nationale et le Sénat avant la clôture de la session parlementaire de septembre 2025, la loi portant habilitation du gouvernement de la République a été promulguée par le Président de la République, Félix Tshisekedi, le jeudi 24 décembre 2025. Cette décision s’inscrit dans le cadre des dispositions de l’article 129 de la Constitution, qui autorise le gouvernement à solliciter du Parlement l’habilitation à légiférer par ordonnances-lois pendant la période des vacances parlementaires.
L’exposé des motifs de cette loi, lu lors de la diffusion de l’ordonnance présidentielle sur la chaîne nationale RTNC, justifie cette démarche par l’inscription, dans le programme d’action du gouvernement — inspiré des engagements pris par le Chef de l’État lors de sa dernière campagne électorale — de plusieurs priorités majeures. Celles-ci portent notamment sur la restauration de la paix et l’assainissement de la gouvernance économique et financière, en vue de relever les défis structurels du pays, en particulier l’amélioration du climat des affaires.
« La restauration de la paix exige, dans le contexte actuel marqué par l’agression dont fait l’objet la partie Est de notre pays, d’une part le maintien de l’état de siège en cours et, d’autre part, des réformes du système judiciaire militaire afin d’assurer la discipline et de lutter contre l’impunité. Quant à l’assainissement de la gouvernance, il convient de souligner l’impact négatif de la corruption et du détournement des deniers publics sur la gouvernance et sur la vie de la Nation. La lutte contre ces fléaux devient plus qu’une urgence et appelle la mise en place d’un dispositif judiciaire moderne, spécialisé dans la répression des infractions économiques et financières, ainsi que d’autres comportements assimilés et complexes, pouvant impliquer des mécanismes internationaux », précise l’ordonnance présidentielle.
Le même texte rappelle que l’introduction, dans la structure du système fiscal congolais à partir du 1er janvier 2026, de l’impôt sur les sociétés et de l’impôt sur les revenus des personnes physiques, nécessite l’adaptation des dispositions relatives à l’imposition des revenus prévues dans certaines législations spécifiques à régime fiscal particulier. Il s’agit notamment du Code minier, du Code des investissements, de la législation portant régime général des hydrocarbures et de celle fixant les principes fondamentaux relatifs à l’agriculture.
L’article 2 de la présente ordonnance précise les matières couvertes par l’habilitation accordée au gouvernement. Celles-ci concernent, entre autres, l’autorisation de la prorogation de l’état de siège instauré par l’ordonnance n° 21/015 du 3 mai 2021 dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu ; la modification de la loi n° 023/2002 du 18 novembre 2002 portant Code judiciaire militaire ; la création, l’organisation, le fonctionnement et les compétences du Tribunal pénal économique et financier (TPEF) ainsi que du Parquet national économique et financier (PNEF) qui y est rattaché ; et enfin l’adaptation des législations spécifiques comportant des dispositions relatives à l’imposition des revenus.
Il convient de souligner que la modification de la loi portant Code judiciaire militaire intervient dans un contexte sécuritaire particulièrement préoccupant, marqué par l’agression de la République démocratique du Congo par le Rwanda à travers la rébellion de l’AFC/M23. Dans ce cadre, plusieurs militaires sont régulièrement traduits devant la justice pour des faits tels que la fuite devant l’ennemi, la trahison et d’autres infractions assimilées. S’agissant de la réforme du Tribunal pénal économique et financier et du Parquet y rattaché, l’objectif est de renforcer ces institutions afin de leur permettre de jouer pleinement et efficacement leur rôle une fois opérationnelles sur l’ensemble du territoire national.
Le délai d’habilitation accordé au gouvernement couvre toute la période des vacances parlementaires, soit du 16 décembre 2025 au 14 mars 2026. Sous peine de caducité, les ordonnances-lois prises en exécution de cette habilitation devront être soumises au Parlement sous forme de projets de loi de ratification, à déposer à l’Assemblée nationale et au Sénat dans un délai de soixante (60) jours suivant leur publication au Journal officiel de la République démocratique du Congo.
Clément Muamba