En difficulté financière, la RDC appelle le SG de l'ONU à soutenir la mission d'enquête du Conseil des droits sur la situation dans l'Est du pays

Volker Türk après rencontre avec Félix Tshisekedi
Volker Türk après rencontre avec Félix Tshisekedi

La République Démocratique du Congo appelle le Secrétaire Général des Nations-Unies à soutenir la mission d’établissement des faits et la commission d’enquête indépendante sur les graves violations des droits de l’homme commises dans l’Est de la RDC mise en place à la suite de la 37ème session extraordinaire du Conseil des droits de l’homme des Nations-Unies.

Les difficultés financières éprouvées par le Conseil des Droits de l'homme de l'ONU préoccupent au plus au point la RDC qui attend de cette commission la réparation des victimes. Hippolyte Mfulu Kingonzila, Chargé d’affaires à la Mission permanente de la RDC auprès de l'ONU a porté ce plaidoyer lors de la réunion du conseil de sécurité de l'ONU à New-York aux États-Unis d'Amérique.

"Pour mettre un terme définitif à l'impunité qui alimente cette récidive, ma délégation appelle le Secrétaire Général à soutenir la commission d'enquête créée par le conseil des droits de l'homme des Nations Unies lors de sa 37e session extraordinaire le 7 février 2025 avec comme mission notamment d'enquêter sur les violations massives des droits de l'homme et du droit international humanitaire en cours dans la province du Nord et Sud-Kivu ainsi que celles commises dans le ville de Goma et de Bukavu après leur invasion par la coalition RDF -M23-AFC, la poursuite par la justice de ces crimes contribuera à une réconciliation nationale durable et à la consolidation du processus de paix en mettant fin à une situation généralisée d'impunité dans l'Est de la République Démocratique du Congo", a déclaré vendredi 27 juin 2025 Hippolyte Mfulu Kingonzila, Chargé d’affaires et premier conseiller à la Mission permanente de la République démocratique du Congo auprès des Nations-Unies.

Pour la délégation de la République Démocratique du Congo, "le manque des ressources et l'impossibilité pour les différents groupes de travail de fonctionner correctement que le Haut Commissaire des Nations-Unies aux droits de l'homme a récemment dénoncé n'augure pas de bon lendemain pour les victimes qui attendent réparation", a interpellé le Chargé d’affaires et premier conseiller à la Mission permanente de la RDC à l'ONU.

Selon une lettre consultée par Reuters et publiée dans sa dépêche du 23 juin 2025, la commission d'enquête mandatée par l'ONU pour enquêter sur des violations présumées des droits humains et des crimes de guerre en République démocratique du Congo ne peut pas poursuivre ses travaux en raison d'une crise de financement au sein du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme (HCDH).

Le Haut Commissariat des Droits de l'homme (HCDH) révèle la source citée, est confronté à une grave pénurie de liquidités, causée par le non-paiement par certains pays de l'intégralité de leurs contributions, aggravée par les coupes sombres de l'aide étrangère décidées par les États-Unis sous la présidence de Donald Trump.

"C’est regrettable que le haut commissariat ne puisse pas disposer des moyens financiers pour ces enquêtes très attendues par les victimes. Nous allons devoir faire le plaidoyer pour que les moyens soient disponibles même auprès des États-Unis. Il y a encore des situations qui se développent sur le terrain. Ça pourrait encourager les criminels à pouvoir continuer leur sale besogne et de massacrer des victimes. Les travaux de cette commission pourraient décourager les auteurs de ces crimes. C’est ce qui est grave.Nous voulons même des sanctions contre tous ces criminels sans distinction", a réagi à Reuters Paul N’sapu, président de la commission nationale des droits de l’homme

Au mois de février dernier, une session extraordinaire du Conseil des droits de l'homme à Genève a décidé de créer une mission d'établissement des faits et une commission d'enquête officielle chargées d'enquêter sur les violations des droits humains, notamment les massacres et les violences sexuelles perpétrés au Nord-Kivu et au Sud-Kivu, dans l'est de la RDC, notamment dans les villes de Goma et de Bukavu, après leur prise par les rebelles du M23 soutenus par le Rwanda.

Moins de six mois plus tard, la commission d'enquête ne peut rendre de résultats « tant que des fonds ne seront pas débloqués », selon l'annexe de la lettre envoyée par le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Volker Turk. Il a averti que les contraintes financières et de personnel « entravent gravement » le travail d'enquête et s'est inquiété de l'impact des coupes budgétaires sur les mesures de protection des droits humains. Les contributions volontaires au bureau de Turk ont ​​diminué de 60 millions de dollars cette année, a déclaré le HCDH à Reuters.

Alex El Jundi, chef de l'Unité d'appui aux enquêtes du HCDH, a déclaré lors d'une réunion informelle avec les membres du Conseil, que la situation était regrettable compte tenu des conclusions préliminaires faisant état d'exécutions sommaires et de « violences sexuelles atroces », entre autres violations.Nombre de ces exactions pourraient constituer des crimes de guerre, a-t-il déclaré.

Les commissions d'enquête (COI) peuvent fournir des preuves pouvant être utilisées dans les enquêtes préliminaires menées par des tribunaux tels que la Cour pénale internationale. El Jundi a déclaré que les réserves du bureau étaient épuisées après l'allocation exceptionnelle de 1,1 million de dollars de fonds ordinaires au lancement de la mission d'établissement des faits, ce qui ne laisse aucune ressource pour démarrer les travaux de la COI. Son budget est d'environ 3,9 millions de dollars.

L'envoyé de l'Afrique du Sud à la réunion a qualifié ce retard de « grave erreur » et le représentant de la RDC a déclaré qu'il risquait de donner l'impression que l'enquête n'était pas importante pour le HCDH. Le HCDH a déclaré à Reuters qu'il ferait « tout son possible » pour obtenir des fonds du budget ordinaire dès 2026 afin de lancer la COI.

Clément MUAMBA