La République Démocratique du Congo se trouve confrontée à une multitude de défis, chacun d'eux se présentant comme à la fois urgent et crucial pour le développement harmonieux du pays. Qu'il s'agisse de la nécessaire stabilisation de l'est du territoire national, de la diversification de l'économie congolaise pour générer des millions d'emplois, ou de l'amélioration de l'efficacité des services publics, chaque enjeu mérite une attention particulière.
Tous ces défis peuvent, en réalité, être inscrits dans le cadre d'une lutte plus vaste contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, une problématique à laquelle la RDC s'est engagée depuis 2004, mais qui n'a connu que peu d'avancées significatives. Pourtant, cette question revêt une importance capitale, car elle influence profondément l'image de l'État sur la scène internationale. La capacité du pays à surmonter ces obstacles déterminera non seulement son avenir économique, mais aussi la perception qu'en ont les partenaires étrangers, condition essentielle pour attirer les investissements nécessaires à son essor.
Dans une note datée du 22 novembre dernier, l'Ambassadeur des États-Unis d'Amérique a souligné un constat alarmant : « Ce n’est un secret pour personne que la RDC est confrontée à des problèmes de réputation qui poussent les grandes entreprises internationales à hésiter à venir faire des affaires ici. » Ce constat s'inscrit dans un contexte où, malgré le potentiel géologique immense du pays, des scandales notoires éclipseraient ses atouts économiques.
L'Ambassadeur a formulé ces remarques à l'issue de sa participation à un atelier ayant réuni des délégués des secteurs public et privé, ainsi que des représentants de la société civile, visant à « discuter d’un plan d’action national sur les principes volontaires relatifs à la sécurité et aux droits de l’homme ». Au cœur de cette démarche, il s'agit, à travers ces principes volontaires, de « garantir que les entreprises engagées dans les industries extractives – notamment celles du pétrole et des mines – respectent les normes les plus rigoureuses en matière de droits de l'homme tout en favorisant des investissements responsables. »
Une telle initiative viserait à créer un environnement où les capitaux investis ne proviennent ni du blanchiment d'argent ni du financement du terrorisme, mais plutôt de sources éthiques et transparentes. Il n'est pas superflu de rappeler que la recrudescence des violences armées dans l'est du pays serait aussi alimentée par ce fléau insidieux. L'effectivité de la diversification de l'économie nationale dépend de réelles avancées dans la lutte contre cette « malignité ».
À cet égard, la République Démocratique du Congo dispose, depuis décembre 2022, d’une nouvelle loi pour renforcer cette lutte. Il va sans dire que le contexte actuel appelle à une réflexion approfondie sur les avancées réalisées, mais aussi sur les obstacles et les reculs rencontrés dans la mise en œuvre de ses dispositions.
En outre, au-delà des réformes juridiques et institutionnelles nécessaires, il est impératif de mener un examen rigoureux de l'état des pratiques sociales. Celles-ci doivent constituer des remparts solides contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme au sein de la société congolaise. En intégrant suffisamment une dimension sociale à cette lutte, il sera possible de bâtir une résilience collective, essentielle pour un environnement propice au développement économique et social.
Il va sans dire que la sortie de la République Démocratique du Congo de la liste grise du GAFI ne devrait pas être considérée comme le sommet à atteindre. En effet, l'esprit des prescriptions internationales relatives à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme incarne une ambition véritablement transformatrice, visant à réformer en profondeur les pratiques sociales, y compris celles qui semblent les plus banales mais qui sont pourtant à proscrire.
C'est notamment, dans le contexte congolais, le cas du « maboko banque » (le paiement en espèces), une pratique qui, bien que courante, favorise l'opacité et l'érosion de la transparence financière. Pour construire une société résiliente et éthique, il est impératif d'aller au-delà des simples exigences réglementaires et de promouvoir une culture de responsabilité et de conformité. Ce n'est qu'en intégrant ces principes dans le quotidien de chaque citoyen que la RDC pourra véritablement tourner la page de pratiques néfastes et s'engager sur la voie d'un développement durable et inclusif.
Il incombe au Gouvernement de la République d'impulser l'élaboration d'une stratégie globale, ouverte à de multiples secteurs, afin de prendre en compte le caractère systémique du problème. Cette vision devrait s'étendre sur au moins deux décennies, permettant ainsi de définir l'image que nous souhaitons projeter de la RDC et de fixer les étapes de son processus de construction.
Dans cette démarche, il est essentiel de considérer les forces et les faiblesses du pays, tout en évaluant les menaces qui pèsent sur son présent et son avenir, ainsi que les opportunités à saisir. En agissant de manière proactive et inclusive, il devient possible de fédérer un maximum d'intelligences et de talents afin de renforcer la conscience nationale face à ce fléau qui empêche notre Etat de réaliser son plein potentiel.