Damas Kumbu Ngoy, un homme âgé aujourd'hui de 54 ans, vient de recouvrer sa liberté après avoir passé 21 ans en détention préventive à la prison centrale de Makala, à Kinshasa. Son calvaire a pris fin le 29 juillet 2024, lors de sa première comparution devant un juge. Le document officiel de sa libération lui a été transmis il y a quatre jours. À l’époque de son incarcération, Damas n’avait que 33 ans.
Lors de cette comparution, le juge s'est déclaré incompétent et a ordonné sa libération immédiate, confirmée officiellement deux semaines plus tard par un document. Damas Kumbu Ngoy quitte la prison marqué par deux décennies de détention « injuste », une situation dénoncée par sa défense.
L'Action Congolaise pour l'Accès à la Justice (ACAJ) n'a pas tardé à réagir, qualifiant son incarcération d'« inimaginable ». « Il a le droit de poursuivre l'État congolais en paiement des dommages-intérêts pour dysfonctionnement de la justice. Le magistrat instructeur de son dossier ne doit pas non plus jouir de l’impunité », a déclaré l'ACAJ dans un communiqué cinglant.
Pourtant, la libération de Damas Kumbu Ngoy n'a pas été sans controverse. Lors de la cérémonie de libération de 67 prisonniers le 28 mars 2024, le procureur général près la Cour de Cassation, Firmin Mvonde Mambu, avait fermement nié l’existence d’un tel cas. Il avait qualifié de « menteur » celui qui affirmait avoir été détenu pendant 21 ans sans jugement, prétendant que ce détenu avait déjà été jugé à l’époque de la Cour d’ordre militaire.
« Ce Monsieur a même tenté de modifier son nom pour tromper nos services. Il a été jugé et condamné, et se trouve actuellement en pourvoi. Qu’il ne vienne pas dire que son dossier n’existe pas », avait affirmé Firmin Mvonde avec assurance.
Makala, une prison en pleine tourmente
Le contexte actuel de la prison centrale de Makala, théâtre de la récente tentative d’évasion sanglante, rend d'autant plus poignante l'histoire de Damas Kumbu Ngoy. Alors que les réactions internationales affluent suite aux troubles qui ont causé la mort de plus de 100 personnes, les appels à une enquête indépendante se multiplient.
L’ambassade de France en RDC a exprimé sa profonde tristesse face aux événements, tandis que la Belgique, par la voix de son ambassadrice Roxane de Bilderling, a exigé que toute la lumière soit faite sur cette tragédie. De son côté, l’Union européenne, par l’intermédiaire de Nabila Massrali, a souligné l'urgence d'une enquête rapide et indépendante pour établir les responsabilités.
Cette crise à Makala met en lumière non seulement les défaillances du système carcéral congolais, mais aussi les atteintes graves aux droits humains qui continuent de gangrener le pays. La situation de Damas Kumbu Ngoy, bien qu'exceptionnelle, est tristement représentative des dysfonctionnements systémiques qui persistent au sein du système judiciaire congolais.