Intelligence artificielle dans l’art : paradoxe entre opportunité et risque 

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Numérique...

En bouleversement ou en évolution, le qualificatif du monde numérique actuel dépend du point de vue que l’on soutient. Avec l’arrivée ou du moins le développement de l’intelligence artificielle (IA) ces dernières années, plusieurs domaines sont bousculés de lui trouver une place, quitte à composer avec elle. Tout en facilitant certaines tâches, l’IA est aussi perçue comme une menace qui pèse sur certains emplois.

Les basiques

L’intelligence artificielle est la construction des programmes informatiques capables d'accomplir des tâches qui, actuellement, sont bien accomplies par des êtres humains. Elle représente tout outil utilisé par une machine afin de reproduire des comportements liés aux humains, tels que le raisonnement, la planification et la créativité. Il est notamment possible de cloner une voix. Ce qui peut permettre l'usurpation d'identités.

Si le phénomène prend de plus en plus d’ampleur ces dernières années, le terme d'intelligence artificielle a été utilisé pour la première depuis plus de 60 ans. C’était à l'occasion d'un colloque scientifique sur le campus de l'université de Dartmouth, dans le New Hampshire, aux États-Unis. L'idée était de voir comment des tâches différentes pourraient être accomplies par des programmes informatiques et pas d’égaler le cerveau humain.

Par après, l’IA a dépassé ses assignations de départ. Elle touche à plusieurs domaines et brandit à la fois la menace et présente des opportunités. Elle peut cloner des voix, modifier des images, répondre aux multiples questions, voire même dessiner en un temps record. L’un des domaines que l’IA touche est celui de l’art.

L’art et l’Intelligence Artificielle 

Interrogés par ACTUALITÉ.CD, quelques artistes qui sont directement concernés par la question se sont mesurés devant le paradoxe d’une opportunité et un risque simultanément. 

Jospin Benameyi évolue essentiellement dans le domaine du numérique comme consultant en vidéographie, en communication visuelle et digitale. Il estime que cela permet de créer des contenus plus pertinents et mieux répondre aux besoins de l’audience.

« Je suis très enchanté personnellement de l’arrivée de l'intelligence artificielle car elle offre de nombreuses possibilités pour améliorer et compléter mon travail créatif. Par exemple, elle me permet de générer des idées innovantes, créer des designs uniques ou même automatiser certaines tâches répétitives. De plus, l’IA m’aide à analyser les tendances du marché, à mieux comprendre mon public cible et à personnaliser mes créations en conséquence », a-t-il dit.

Archimède Body est passionné par la création de solutions informatiques. Il est concepteur d'Eyano Chat, un chatbot conversationnel alimenté par chat-gp 3.5 et 4. En tant que développeur et entrepreneur, il est de plus en plus intéressé par l'IA car, affirme-t-il, elle peut faciliter la vie de l'homme et augmenter sa productivité.

« Je vois l'arrivée de l'IA comme une évolution naturelle de la technologie. Elle offre des possibilités incroyables pour automatiser des tâches qui prenaient beaucoup de temps et pour créer des solutions innovantes qui n'étaient pas possibles auparavant. Pour moi, l'IA est une opportunité. Elle permet de créer des solutions plus efficaces et plus rapides. Cependant, il y a aussi des défis, comme la nécessité de comprendre et de maîtriser cette nouvelle technologie, et le risque que l'IA remplace certains emplois », balance-t-il.

Une aide et pas un remplaçant 

Parmi les risques que redoutent les artistes devant l’intelligence artificielle, c’est la main de l’homme dans la réalisation de certaines œuvres d’art. Cette créativité singulière de l’artiste fait la particularité d’une œuvre, ce qui est un potentiel désavantage de l’IA.

Utiliser l’IA comme outil d’inspiration ou de référence rapide et non comme un outil de création, ce que pense Alex Kadilu, artiste de formation à Boston Media House en Afrique du Sud, concepteur 3D et CEO de Visionblinde VFX Studio. Car, pensent-ils, que les technologies ne remplacent pas les artistes, mais les aident à repousser les limites de leur créativité. 

« Malgré toutes ces avancées, il est important de se rappeler que l’IA ne peut pas remplacer complètement les artistes humains. Bien que les algorithmes puissent aider les artistes à générer des idées et à créer des œuvres d’art de manière plus efficace, ils ne peuvent pas remplacer l’émotion et l’expression humaine qui sont à la base de la création artistique », a-t-il dit.

Pour Archimède Body, l'IA peut être intégrée dans la vie artistique de manière à augmenter la créativité et la productivité. Seulement, que l’utilisation se fasse comme outil d’amélioration de l'art, et non de remplacement.

« L'IA est là pour nous aider, pas pour nous remplacer. Il est important de se tenir informé et de continuer à apprendre. Il existe de nombreuses ressources en ligne pour apprendre l'IA, et beaucoup d'entre elles sont gratuites. Le principal risque avec l'IA est qu'elle pourrait remplacer certains emplois. Cependant, je crois qu’elle créera aussi de nouveaux emplois et de nouvelles opportunités. Il est important de continuer à apprendre pour pouvoir s'adapter à ces changements », ajoute-t-il.

Jospin Benameyi croit qu’il est important pour les artistes de trouver un équilibre entre l'utilisation de l'IA comme outil créatif et la préservation de leur propre expression artistique. Cela pour l'intégrer en tant qu'outil créatif tout en conservant l'expression humaine et l'originalité pour éviter tout effet néfaste.

« Je comprends aussi que son arrivée puisse susciter certaines inquiétudes. Il est important de se rappeler que l'IA est là pour compléter et améliorer notre travail, et non pour le remplacer. En tant qu'artiste, le talent créatif unique et l’approche artistique ne peuvent être reproduits par une machine », confie-t-il.

Conseil prudence 

Étant un phénomène qui bouscule un certain ordre, mieux vaut ne pas rester à l’écart. Dans le regard de ces artistes, ils voient plutôt une obligation pour ceux qui sont directement ou indirectement touchés, de pouvoir se documenter. Connaître suffisamment pour savoir comment se comporter devant cette nouveauté, recommande Alex Kadilu.

A Jospin d’ajouter : 

« Mon conseil serait de rester curieux, de se renseigner sur l'IA, de poser des questions et de comprendre comment elle est utilisée dans différents domaines avant de se sentir à l'aise avec elle et par-dessus tout, restez critique. Gardez toujours l’esprit critique lorsqu'il s'agit de l'IA. Posez des questions sur son fonctionnement, ses limites et ses implications. Ne pas se fier aveuglément à tout ce que l'IA te propose, mais d’utiliser vos propres connaissances et jugements pour prendre des décisions éclairées » 

Parmi les risques de l’IA, il y a des préoccupations éthiques et sociales liées telles que la création des deep fakes ou la propagation de fausses informations. Également, peut-on citer, la dépendance excessive à l'IA. Ce qui peut réduire la capacité à penser de manière critique et à développer ses propres compétences. “Il est donc essentiel de trouver un équilibre entre l'utilisation de l'IA et notre propre expertise”, ajoute Jospin Benameyi.

Avant de conclure : 

« Un autre risque est lié à la confidentialité et à la sécurité des données. L'IA nécessite souvent l'utilisation de grandes quantités de données, ce qui soulève des préoccupations en matière de confidentialité. Il est important de prendre des mesures pour protéger nos données et s'assurer qu'elles sont utilisées de manière éthique et sécurisée ».

Emmanuel Kuzamba