Produits surgelés : les kinoises s’expriment sur le contraste entre procès-verbal et réalité sur terrain

Kinshasa: baisse des prix des produits surgelés
Kinshasa: étale de poisson dans un marché.

Un carton de cuisses de poulet (ou 10Kg) à 15.9 USD, celui de poulets entiers (ou 10 Kg) à 15.5 USD, les côtes de porcs (10Kg) à 16.8 USD ou encore les chinchards à 1.44 USD/Kg,  ce sont les nouveaux prix conclus entre le gouvernement et les sociétés importatrices de produits surgelés. Et pourtant sur le terrain, les ménagères observent une toute autre réalité.

« Cette décision du gouvernement impliquant la baisse des produits a  tourné en une hausse des prix.  Les responsables  des chambres froides nous disent que les prix des produits ont baissé à la télévision et sur le papier mais pas à leur niveau. Je suis vendeuse détaillant des tripes, de la viande et des côtes de porc. Je ne sais plus avoir m’approvisionner auprès des chambres froides. Les prix ont augmenté, et sur le marché les clients ne voudront pas acheter à ces prix-là », s’inquiète Annie Lombo, vendeuse au marché de la liberté. 

Selon le ministère de l’économie, plusieurs raisons ont été évoquées par les opérateurs pour justifier la hausse des prix des produits surgelés. Il s’agit notamment des taxes qui seraient régulièrement perçues par la DGM, la CVM, les LCM ainsi que la mairie de Matadi.  Une raison qui a été rejetée par les responsables de ces différentes institutions. Après confrontation entre les deux parties, le ministère a appelé les sociétés à se conformer aux justes prix. Samedi dernier, certaines d’entre elles ont fermé leurs portes. D’autres refusent de livrer les produits aux grossistes ou de donner des factures. 

« C’est une bonne chose d’avoir baissé les prix de quelques produits surgelés. Si le gouvernement évolue ainsi, bientôt les familles congolaises  ne vont plus se soucier de pouvoir trouver de la nourriture de bonne qualité à un prix abordable. C’est une mesure qui devrait s’étendre au niveau des autres produits de première nécessité,» confie Henriette Tshidibi.  

Pour sa part, Chantal Kelani invite les autorités à passer aux sanctions. « Le gouvernement devrait contraindre ces sociétés à la fermeture si elles ne veulent pas se conformer aux nouveaux prix. Aucun investisseur n'est au-dessus de la loi. Ils ont organisé des réunions, ils ont pu discuter calmement avec les autorités, les compromis ont été trouvés. A présent ils font un bras de fer avec le gouvernement ? Non, les sanctions doivent suivre », dit cette  sexagénaire, agent dans une banque.  

La situation se complexifie 

Brigitte Mangela, vendeuse des chinchards au marché de Sélémbao se plaint d'encaisser des pertes journalières. « Nous avons recours aux femmes manœuvre pour avoir des produits. Ce sont des femmes qui par moment achètent leurs cartons de produits à Brazzaville (cuisses et poulet). Nous achetons une rame de poissons à 52.000 francs. Chaque jour, il faut effectuer la même dépense. Mais les clients n’ont pas assez de moyens, ils nous supplient de baisser les prix. En fin de journée, c’est  nous qui enregistrons les pertes. la situation se complexifie. » 

« Nous sommes dans une société où les conditions sociales ne  se sont pas encore améliorées. La plupart des familles kinoises consomment régulièrement des chinchards mais les prix augmentent tous les jours. En une semaine, je constate que le prix des Mpiodi 20+ et 25 + sont passés de 5300 à 6700. Selon les explications des vendeurs, les produits sont de plus en plus rares. Où allons-nous ? Nos familles vont-elles survivre à cette crise ? », s'interroge une femme à l’entrée de la chambre froide Prédestiné à Somba Zigida. 

José Fabiola, un agent de la fonction publique, pense qu’avant de baisser le prix des produits surgelés, le gouvernement devrait songer à baisser le taux de change du dollar. « Tout tourne autour du taux de change du dollar, » dit-elle.  Et d’ajouter, « Si le taux est abaissé à au moins 9200 Fc pour 1$, tous les produits vont connaître une baisse. Et les autorités devraient y songer. »

Pour rappel, le consensus a été trouvé entre le gouvernement par le biais du ministère jeudi 12 août. Les prix officiels ont été publiés pour un premier palier, le vendredi. Aucun moratoire formel pour l’application de ces prix n’a été donné. Cependant, le ministère a dû accorder un délai de quelques jours pour permettre aux opérateurs d’actualiser ces différents prix.

Prisca Lokale