Il y a quelques jours sur les réseaux sociaux, les Congolais ont pu lire l’un des poèmes les plus poignants et acerbes proposé par un poète qui n’en est pas à ses débuts dans le domaine ! « Je pleure mon vote » a été partagé plus d’une centaine de fois via les plateformes Whatsapp, Facebook et Twitter. Rédigé par un auteur discret qui cumule plusieurs casquettes, ce poème est venu enrichir une longue liste comprenant, entre autres, « Beni, je suis toi… » ou encore « Un vent nouveau se lève».
Rencontre avec l’auteur atypique qui se « cache » derrière ces rimes.
Jean Claude Mputu, bonjour et merci de nous répondre à ces questions. Vous êtes politologue, professeur d'université et poète...
J’écris depuis que je respire !
La poésie est pour moi une manière de dire ma réalité, le monde tel que je le vois et comme je le vis. Que ce soit sur des thèmes politiques ou ceux qui touchent au quotidien, j’écris ! Mes rimes reflètent mon état d’esprit, ma pensée et c’est ma manière à moi de dire ma vérité, toute ma vérité. A l’heure actuelle, ma vérité concerne la situation actuelle de mon pays et tout naturellement mes rimes me viennent. Donc non, écrire ce n’est pas de la politique, écrire c’est parler, c’est s’exprimer, c’est être. Mes rimes, c’est ma vie !
Qu'est ce qui vous amène à la poésie ? Pourquoi ce genre plutôt qu'un autre ?
Je ne fais pas que de la poésie, j’écris des textes simples, j’écris des histoires. L’écriture est une véritable passion pour moi. La poésie fait partie de ma nature, j’adore écrire et partager à travers la poésie.
Récemment l'un de vos poèmes "Je pleure mon vote" a été reliée plus d'une centaine de fois sur les réseaux sociaux. Qu'est ce qui vous a poussé à l'écrire, la haine ? la rage ? le dépit ? la résilience ?
Je pleure mon vote a été le résultat d’un sentiment très fort d’injustice et de désir de vérité. J’avais juste envie de témoigner à propos de ce qui c’était passé pendant le scrutin en RDC. Dire que ce qui c’était passé était une injustice, que nous nous comportions en hypocrites et qu’il fallait témoigner pour que tout le monde sache et que personne ne dise qu’il ne savait pas quand les conséquences de cette forfaiture, de ce désordre se fera sentir. Témoigner aussi parce que je ne comprenais pas pourquoi du jour au lendemain un homme que l’on traitait de tous les noms pouvait devenir tout d’un coup un démocrate, le champion de l’alternance, oubliant des amis, des camarades qui ont perdu leur vie et ça c’est quelque qui m’insupporte. C’est pourquoi, “Je pleure mon vote” a été écrit pour dire cette douleur, et affirmer cette vérité.
A chaque fois qu'il y a une actualité "chaude" en RDC vous la décliner en rime, est ce un exutoire pour vous ? Une manière d'aller plus loin que ce que vous pouvez faire en tant que politologue ?
Je pense que je vis tellement fort ce qui se passe dans mon pays que j’en parle en tant que politologue mais j’ai besoin de m’exprimer en tant qu’Homme, en tant que citoyen au-delà de tous calculs, au-delà de toute étiquette. Dans ce sens là, la poésie reste le seul moyen parce que je me retrouve face à moi même et je prends mon stylo et une feuille, ensuite je me mets à écrire. Quand j’écris ce genre de texte, de poème, je ne le fais jamais sur ordinateur, j’écris toujours sur un papier parce que j’ai le sentiment de communier avec mes mots donc oui c’est ma manière de parler pour moi même, pour mes amis à travers les textes que je partage, de parler pour mon pays, pour mon peuple, parce qu’écrire finalement c’est crier plus fort ce que l’on vit, ce que l’on ressent… Ecrire c’est aussi dénoncer, c’est aussi compatir, c’est ma solidarité, c’est mon engagement !
Entre la politique et la poésie, un seul pas à franchir en rime ?
Ma poésie n’est pas du tout de la politique, ma poésie c’est mon engagement. Le jour où j’aurais envie de faire de la politique, je la ferais. Peu importe où je serais et le chemin que je choisirais de prendre, je continuerais à écrire parce que c’est ma manière de m’exprimer.
Quels sont les retours que vous avez de vos proses ?
Tout dépend du texte. En général, les gens aiment, ceux qui n’aiment pas sont gênés par ce que je dénonce. Les gens me demandent pourquoi je ne les publie pas. J’écris pour partager, je ne suis pas encore nécessairement intéressé par la publication. Je parle surtout à mes amis, je ne les partage qu’à mes amis et les retours sont encourageants, parfois ça interpelle, parfois je me pose des questions mais in fine je suis au-delà de cela.
Peut-on s'attendre un jour vous retrouver sur les planches pour déclamer ces poèmes ?
Je l’ai fait en étant plus jeune. Durant mon adolescence, j’écrivais pour des spectacles. A l’époque déjà j’écrivais ma vérité et je déclamais mes poèmes. Aujourd’hui, il m’arrive encore très rarement de le faire, je ne suis pas tenté de le faire publiquement mais, bon, sait on jamais !
Propos recueillis par Nabintu Kujirakwinja